Cinq semaines. Voilà le temps de réflexion dont dispose Geoff Molson pour jeter les bases de la prochaine saison. Et reléguer aux oubliettes la pathétique performance du Canadien au cours des derniers mois.

Au début du mois d'avril, le calendrier régulier terminé, Molson devra annoncer ses couleurs. Tout retard traduira une hésitation malsaine. Cette organisation a besoin de redresser la barre. Il lui faudra agir vite. Sinon, la confiance des amateurs, déjà sérieusement ébranlée, s'effritera davantage.

On sait déjà que Randy Cunneyworth ne sera pas de retour. Qui le remplacera? La question est prématurée. Il faut plutôt savoir qui choisira son successeur. Identifier son DG en vue du calendrier 2012-2013 est le premier des trois défis de Geoff Molson.

L'avenir de Pierre Gauthier

Pierre Gauthier est en campagne pour conserver son poste. Lundi, en promettant un rebond rapide du Canadien, il a joué une carte audacieuse.

À l'heure actuelle, il jouit toujours de la confiance de Molson. Gauthier sait être convaincant. Ses arguments sont structurés, ses raisonnements logiques et sa confiance en l'avenir, entière. C'est suffisant pour impressionner son patron, un jeune dirigeant qui accomplit un rêve légitime en se retrouvant à la tête d'une organisation quasi familiale.

On a vu à quelle vitesse Molson a tué dans l'oeuf les rumeurs de congédiement de Gauthier samedi. Il l'a fait directement sur son compte Twitter, sans passer par son service des communications.

Molson devra néanmoins évaluer en profondeur le risque de maintenir Gauthier en poste. Sur le plan de la perception publique, il s'agirait d'un gros pari.

Depuis avril dernier, l'équipe est en régression. Elle a maintenant atteint le fond du baril. Rien ne laisse présager un retournement de situation. La tendance de Gauthier à surestimer son équipe - il nous annonce constamment des jours meilleurs - devient inquiétante.

Gauthier s'implique à tous les niveaux au sein de l'équipe. C'est notamment lui qui embauche et congédie les entraîneurs adjoints. Mais quel entraîneur-chef avec du coffre, confiant en ses moyens, acceptera de venir à Montréal dans ces circonstances?

Difficile d'approche, loin du public, Gauthier est une exception parmi les DG des équipes professionnelles. Peu importe le sport, la plupart d'entre eux comprennent leur rôle sur le plan de la communication. Ils aiment prendre le pouls de leur milieu.

L'approche inverse entraîne des conséquences importantes. Ainsi, Gauthier a été étonné par la réaction populaire à la nomination de Cunneyworth. Son manque d'antennes lui a fait mal.

Gauthier possède évidemment de grandes qualités. Sa feuille de route en fait foi. Il est rigoureux et travaillant. Mais peut-il vraiment se relever de cette saison catastrophique?

Chose sûre, si Molson reconduit Gauthier dans ses fonctions, il devra lui fixer des objectifs clairs. Les paroles réconfortantes et les voeux pieux ne sont plus suffisants.

Le rôle de Bob Gainey

Les images ont souvent une grande force d'évocation. Ce fut le cas vendredi soir lors du match entre le Canadien et les Capitals, à Washington. La caméra de RDS a isolé Mathieu Darche, Andrei Markov et Bob Gainey sur la tribune de presse.

À moins de 72 heures de l'heure limite des transactions, cette apparition soudaine de Gainey sur nos écrans a intrigué plusieurs amateurs. Quel rôle joue-t-il dans les affaires de l'équipe? Officiellement conseiller du DG, Gainey travaille aussi avec les entraîneurs et les joueurs.

Lorsqu'il a abandonné son poste de DG en février 2010, Gainey est devenu consultant. Un an plus tard, lorsque je l'ai croisé à la Classique hivernale de Calgary, il paraissait assez éloigné de l'équipe.

Aujourd'hui, Gainey semble jouer un rôle actif. Sinon, il n'aurait pas accompagné le Canadien à l'étranger à une période si critique de la saison. Mais quelle est son influence réelle, notamment auprès de Geoff Molson? Est-il un simple consultant ou demeure-t-il l'éminence grise de l'organisation?

Lorsqu'un administrateur de haut niveau démissionne de son poste, on lui confie souvent un rôle semblable. C'est une manière de le récompenser de ses loyaux services. Sa contribution est habituellement modeste, afin de ne pas miner l'autorité de son successeur.

Chez le Canadien, rien n'est clair à ce sujet. Et cela entretient la confusion.

Autour du président

En 2011, Geoff Molson a pris deux décisions importantes. Il s'est départi des services de Ray Lalonde, vice-président au marketing, et a assumé la succession de Pierre Boivin à la présidence de l'équipe.

Résultat, deux hommes d'expérience, connaissant à fond le marché montréalais, ont quitté l'organisation à six mois d'intervalle.

On peut légitimement croire que Pierre Boivin aurait mis Geoff Molson en garde contre les risques d'embaucher un entraîneur unilingue anglophone. Ce qui aurait évité au Canadien un désastre de relations publiques.

Aujourd'hui, Molson porte à la fois les chapeaux de propriétaire et de président. Il dirige le Canadien et evenko. Et, dès ses débuts, il est confronté à la pire saison de l'équipe depuis des années. C'est beaucoup.

Geoff Molson devra aussi réfléchir à son modèle organisationnel.

Conclusion

La saison 2011-2012 aura été éprouvante pour toute l'organisation du Canadien. Mais à partir de maintenant, ce n'est plus sur les joueurs, l'entraîneur ou le DG que les projecteurs sont fixés. C'est sur Geoff Molson.

Dans son rôle de président, il doit établir les orientations à long terme de son organisation. Mais les circonstances actuelles ne lui donnent pas ce luxe. Il doit parer au plus pressé. Ses décisions auront un impact majeur sur la prochaine saison du Canadien.

Cinq semaines. C'est le temps qu'il lui reste pour trancher.