Dans un hôtel anonyme en banlieue de Toronto, on a bizarrement senti la magie olympique, ce week-end. Environ 150 athlètes canadiens se sont réunis pour préparer les Jeux de Londres, l'été prochain.

«Je ne savais pas à quoi m'attendre, mais c'est super inspirant, lance Jo-Annie Fortin, membre de l'équipe de nage synchronisée. Tout le monde a partagé ses expériences, ses hauts et ses bas. Et quand Mark Tewksbury nous a montré sa course pour la médaille d'or aux Jeux de Barcelone, j'ai pleuré. Moi aussi, je veux mon moment olympique!»

Le concept mis de l'avant par le Comité olympique canadien (COC) repose sur une prémisse simple. Les Jeux sont devenus une si grosse entreprise que les préparations physique et mentale traditionnelles ne suffisent plus.

Pour produire à son mieux, un athlète doit démystifier ce grand rendez-vous. Sinon, il sera submergé par la pression le jour de son épreuve. La foule, les médias, la sécurité et les attentes du public, voilà des facteurs uniques aux Jeux olympiques.

Pour transmettre les connaissances, les athlètes expérimentés ont pris la parole. La première séance a réuni quatre champions des Jeux de Vancouver, dont Alexandre Bilodeau; la seconde, quatre médaillés des Jeux d'été, dont Émilie Heymans et Alexandre Despatie.

«J'ai expliqué combien chacune de mes participations aux Jeux a été différente, raconte Despatie. En 2000, par exemple, j'avais 15 ans. J'étais si jeune que je pouvais me contenter de savourer l'expérience. Mais j'ai terminé quatrième à la tour des 10 mètres.

«Des journalistes m'ont demandé si j'étais déçu de rater le bronze. Déçu? Hé, vous ne comprenez pas ce que je vis, je suis sur un nuage! Je visais le top 12 et j'ai lutté jusqu'au bout contre mon idole, Dimitri Sautin.»

Ce jour-là, Despatie a vite rectifié le tir sur le bilan de sa performance. À 15 ans, il avait déjà le flair de la communication publique. Des anecdotes semblables ont aidé les futurs olympiens à cerner l'environnement des Jeux.

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Mark Tewksbury est un redoutable communicateur. La réaction de Jo-Annie Fortin à ses propos était largement partagée. Le nageur n'a pas seulement raconté une histoire, il a aussi lancé une réflexion sur l'attitude en compétition.

Avec passion et intensité, Tewksbury a replongé tout le groupe en 1992, le jour de sa finale.

Avant la course, au Village des athlètes, il a analysé ses chances. Un podium était probable, peut-être même une deuxième place. Puis, il a été frappé par un éclair: «Quelqu'un gagnera forcément cette course. Pourquoi pas moi?»

C'était la première fois que Tewksbury s'autorisait une pensée si audacieuse. Quelques heures plus tard, après une remontée spectaculaire, il a remporté l'or. «Il a clenché tout le monde, dit Jo-Annie Fortin. Ça m'a impressionnée...»

Le récit de Tewksbury a touché son auditoire. Pour un athlète olympique, difficile de trouver un meilleur mantra: «Pourquoi pas moi?»

Parlez-en à Andréanne Morin, qui a prolongé sa carrière pour effacer la déception de Pékin, lorsque son bateau a raté le bronze par une fraction de seconde. Âgée de 31 ans, athlète volontaire et expérimentée, étudiante en droit à l'université, on pourrait la croire au-dessus de ces séances de motivation. Pas du tout.

«J'adore ça, dit-elle. C'est excitant de rencontrer des athlètes d'autres sports. Je n'avais jamais parlé à la boxeuse Mary Spencer avant ce week-end. Maintenant, je veux voir un de ses combats à Londres. Et j'ai été fascinée de voir mes jeunes coéquipières éblouies par tout ce qu'elles ont entendu ici.»

Les athlètes ont été invités à une séance de remue-méninges pour décrire l'équipe canadienne. Les qualificatifs sélectionnés - inébranlable, de classe mondiale, fière, agressive - seront inscrits sur des affiches, signées par eux-mêmes, qui les accompagneront à Londres.

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Les entraîneurs des athlètes olympiques canadiens ont eu une bonne nouvelle. Ils recevront une récompense en argent si leurs protégés montent sur le podium: 10 000 $ pour une médaille d'or, 7500 $ pour l'argent et 5000 $ pour le bronze.

C'est la moitié de la somme remise aux athlètes victorieux. (En sports d'équipe, chacun des membres reçoit une part complète.) Après les Jeux de Vancouver, les médaillés canadiens se sont partagé 1,7 million.

Cette initiative est bienvenue. Les entraîneurs constituent un élément fondamental de la pyramide sportive.

Le Canada prépare avec un bel enthousiasme les Jeux de Londres. Mais attention! Le succès ne sera pas celui des Jeux de Vancouver. Le pays a plusieurs marches à gravir avant de menacer aux Jeux d'été. À Londres, l'objectif est de terminer parmi les 12 premiers au classement.

Mais, comme toujours, quelques athlètes nous réserveront de belles surprises. Ce week-end, à Mississauga, ils étaient plusieurs à se dire tout bas: «Pourquoi pas moi?»

Photo: archives PC

Au cours d'une rencontre avec les athlètes olympiques canadiens, Mark Tewksbury leur a montré la reprise de sa conquête de la médaille d'or aux Jeux olympiques de Barcelone en 1992, tout en lançant une réflexion sur l'attitude en compétition.