Vêtu d'un polo vert pâle et d'un short kaki, chaussures de sport noires aux pieds, Rafael Nadal s'asseoit dans la salle d'entrevue. Il porte avec élégance cette tenue simple. Sa voix est douce et son anglais, langue de travail des rencontres de presse, est teinté d'un fort accent hispanophone. Parfois, l'interprète à ses côtés intervient pour préciser à sa demande le sens d'une question.

Pendant une vingtaine de minutes, Nadal, une des plus grandes stars de la planète sportive, s'exprime avec confiance et gentillesse. De son regard perçant, il fixe son interlocuteur droit dans les yeux et prend le temps de réfléchir avant de livrer son opinion.

Nous sommes ici en présence d'un sportif de haut niveau, pour qui la concentration est une préoccupation de tous les instants. On sent que cet homme ne laisse rien au hasard, ce qui explique en partie sa formidable feuille de route.

Accueillir de grands champions comme Roger Federer, Novak Djokovic et Rafael Nadal représente un honneur pour Montréal. Avec un peu de chance, ils n'entendront peut-être pas parler de l'effondrement d'une poutre de béton dans le tunnel Ville-Marie la semaine dernière. Et ils garderont cette image positive de notre ville, celle qui a incité Nadal à se déplacer à Montréal. Un malaise récurrent au pied est en effet venu près de le contraindre à faire l'impasse sur la Coupe Rogers.

«Je n'ai repris l'entraînement que la semaine dernière, dit-il. Mais j'aime Montréal et j'ai voulu venir. Les gens sont gentils et il y a de bons restaurants. Le tournoi s'améliore toujours. L'ambiance est décontractée, il n'y a pas beaucoup de stress. Et je me sens bien dans ce club de tennis. C'est un des tournois que j'apprécie durant la saison.»

Pour les dirigeants du tournoi montréalais, difficile de trouver plus beau compliment. Surtout que Nadal a abordé ce sujet de lui-même. Il est vrai que le stade de tennis Jarry demeure le plateau sportif le plus accueillant de Montréal. Les aménagements réalisés au cours des derniers mois ont ajouté à son charme.

Suffit de jeter un coup d'oeil sur les terrains de terre battue aménagés sur le toit de l'édifice principal pour s'en convaincre. Accessibles toute l'année, ils sont entourés de larges portes qui permettent de profiter de l'été. Un restaurant doté d'une superbe terrasse y a été aménagé pour la durée du tournoi.

Hier, plusieurs joueurs se sont entraînés sur le court central devant un public de connaisseurs. L'ambiance était chaleureuse. On comprend les joueurs d'apprécier.

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L'influence de Nadal au sein des athlètes professionnels franchit les cadres du tennis. Plus tôt cet été, après avoir remporté l'Omnium de golf des États-Unis, Rory McIllroy a accordé une entrevue au réseau CNN.

Lorsqu'on lui a demandé quels athlètes l'inspiraient, le jeune Nord-Irlandais a répondu sans hésitation.

«J'ai grandi en surveillant les exploits de Tiger Woods à la télévision. C'était extraordinaire. Aujourd'hui, c'est Rafael Nadal qui m'impressionne le plus. Je le connais depuis quelques mois et je suis impressionné par sa préparation et son approche du jeu.»

McIlroy, véritable passionné de sport, a assisté à la dernière finale de Wimbledon lorsque Djokovic a pris la mesure de Nadal.

«J'ai rencontré Rory l'an dernier, raconte Nadal, lui-même fou de golf. Nous sommes demeurés en contact par la suite. Il est un gars humble et relaxe. J'aime les gens comme lui. Ce qu'il a réussi en remportant l'Omnium des États-Unis est formidable, surtout après sa dernière ronde si difficile au Tournoi des Maîtres. Il faut être très fort mentalement pour rebondir de la sorte dès le tournoi majeur suivant. J'étais heureux pour lui.»

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On croit souvent que les grandes vedettes du sport international  sont des gens blasés et arrogants. C'est parfois vrai. Mais il y a aussi des gars comme Nadal. À la fin de l'entrevue d'hier, il a été questionné sur l'importance du premier rang mondial, titre qu'il a abandonné à Djokovic cet été.

«J'ai travaillé toute ma vie pour devenir un joueur professionnel. J'ai gagné des tournois majeurs et une médaille d'or olympique. C'est plus que je ne l'avais jamais espéré. Même si ma carrière devait prendre fin aujourd'hui, je rentrerais à la maison heureux d'avoir accompli ce chemin.»

Rafael Nadal est un vrai champion.

Le mépris de Saputo

Je n'ose même pas imaginer le ressac si Pierre Boivin, ancien président du Canadien, s'en était pris aux fans de l'équipe comme Joey Saputo l'a fait à l'endroit des Ultras, ce petit groupe d'amateurs passionnés qui vibrent au rythme de l'Impact depuis plusieurs années.

Chose sûre, Boivin aurait sûrement été convoqué au bureau du propriétaire de l'équipe pour s'expliquer. Et celui-ci aurait exigé des excuses publiques de la part de son plus haut gestionnaire. Pas une pathétique lettre de justification comme celle expédiée par l'Impact en début de soirée, hier. Mais voilà: Saputo et sa famille sont aussi les actionnaires de l'équipe et n'ont malheureusement de comptes à rendre à personne.

Je ne me souviens pas d'une charge aussi méprisante d'une équipe québécoise contre ses fans les plus enthousiastes. Le propos méprisant, le ton arrogant, la faiblesse de l'argumentaire, tout cela est très inquiétant pour l'avenir de cette concession. Saputo a trouvé le moyen de transformer une occasion de fête, le dévoilement du nouveau logo très réussi de l'équipe, en catastrophe de relations publiques.

Au-delà des fans, les partenaires corporatifs de l'Impact sont sûrement inquiets de cette sortie irréfléchie. Groupe Financier BMO, qui s'est associé à l'Impact en vue de son accession à la MLS la saison prochaine, soigne son image de marque. Insulter la clientèle ne fait pas partie de ses stratégies. Pas sûr que ses hauts dirigeants, Jacques Ménard en tête, ont apprécié cette charge.

L'Impact connaît une saison désastreuse. Les Ultras, comme tous les autres fans, ont le droit de juger sévèrement le directeur sportif. Avant de dénoncer leur comportement, Saputo devrait analyser son propre rendement. Et s'inspirer du respect que Pierre Boivin a toujours montré aux fans du Canadien.

Photo: Hugo-Sebastien Aubert, La Presse

Rafael Nadal écoute les instructions de son entraîneur Francis Rolg durant une pratique.