Charles Philip Arthur George Windsor, bien connu sous son titre officiel de Prince de Galles, mais encore mieux connu sous son diminutif de Prince Charles, est au Canada jusqu'à demain.

Une courte visite, cependant, j'ai le regret de vous l'annoncer. Trois jours, trois provinces, six villes, 41 événements officiels. D'où le choix du verbe « stupéfiant » utilisé par le Daily Mail pour décrire la visite de Charles et de son épouse Camilla au Canada. Staggering, indeed...

Pas le temps de niaiser. À 66 ans, Charles n'est pas tuable.

Je regarde les photos, je consulte le fil Twitter officiel @@:LaCouronneCa - 800 abonnés en français, 16 000 en anglais -, je lis les comptes-rendus médiatiques de cette visite en Nouvelle-Écosse, à l'Île du Prince Édouard et au Manitoba (bizarre d'itinéraire, by the way) et force est de constater l'évidence: ce n'est pas du tourisme, être un prince en déplacement dans les colonies.

Plante un arbre, prends le thé avec des vétérans du débarquement de Normandie, rencontre le Gouverneur général local, jase avec des écoliers, regarde des feux d'artifices, inspecte un nouveau sentier pédestre, dépose une couronne au pied d'un monument militaire, prononce un discours, donne des médailles...

Et toujours - toujours ! - cette obligation de sourire aux indigènes pour qui vous voir ne serait-ce que de loin est en soi quelque chose comme une expérience quasi-religieuse.

Ouf. Épuisant, juste d'y penser.

On comprend mieux pourquoi Charles et Camilla n'auront pas le temps de faire un pit-stop aux chutes du Niagara pour la traditionnelle photo dans l'imperméable jaune.

Et il y a les discours ! Charles en prononcera quatre, dans ce petit voyage. Quatre occasions de marquer le coup, de distribuer ça et là des miettes de sagesse qui ne manqueront pas d'épater les masses en ce temps où les raisons de se réjouir nous manquent si cruellement...

Tenez, voici un extrait du premier de ses discours, prononcé alors qu'il débarquait fraîchement de l'avion à Halifax : « Notre tournée place l'accent sur les réalisations canadiennes dans une grande célébration du passé et de l'avenir. »

Puis, joignant le geste à la parole, le prince Charles est allé visiter marché agricole Seaport de Halifax, pour célébrer le passé et surtout l'avenir de la gastronomie néo-écossaise...

Il faut voir cette visite au Canada comme un autre étape de l'interminable stage de formation de Charles au poste de roi. En effet, Charles est premier prétendant au trône de la monarchie britannique depuis plus de soixante ans.

C'est ça le problème, avec le poste de monarque, basé sur l'hérédité : la dextérité avec laquelle vous plantez un arbre devant public, la facilité avec laquelle vous nouez un lien instantané avec une pâtissière rencontrée en visite officielle, la détermination qui marque le trait de votre crayon quand vous signez quelque livre d'or - bref, le talent - tout ça ne compte pas.

Non, il faut attendre son tour. Attendre que votre génitrice trépasse pour devenir « Roi du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, de ses autres royaumes et territoires, Chef du Commonwealth, Défenseur de la foi », titre officiel du boss de la monarchie britannique.

Et le « problème », pour Charles, c'est que sa mère, Élizabeth II, est dotée d'une santé de fer. Elle ne meurt pas, Élizabeth. Le thé vert, chuchote-t-on à Buckingham Palace, quoique son époux le prince Philip prétend avoir quelques trucs de son cru qui expliqueraient une partie de la vitalité de sa vénérable épouse...

Je vous dis tout cela mais j'allais quasiment oublier de vous parler du point marquant de la visite de Charles au Canada, je parle du moment où il nourrira un ours polaire à Winnipeg. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le Daily Mail (encore) : « The highlight is set to be Charles feeding a polar bear named Hudson. »

C'est demain. Et avec un peu de chance, RDI va nous montrer la manoeuvre en direct. Ça promet d'être spectaculaire : une plante verte qui nourrit un animal en cage, c'est probablement une première.

LA TRANSPARENCE

The Gazette a publié la semaine dernière le détail du traitement salarial d'Arthur Porter, quand il était grand boss du grand hôpital universitaire de l'Université McGill (CUSM). Ainsi que ses notes de frais.

Ainsi, on a su un tas de choses stupéfiantes sur son traitement: c'est l'hôpital qui a payé la mise de fond de 60 000$ pour sa Bentley, en plus de lui consentir 1700$ par mois pour les frais de ladite auto de luxe. L'Université McGill a payé le grand homme pour enseigner un cours... qu'il n'a jamais donné. Le CUSM l'a payé pour des mandats de radiologie qu'il n'a jamais remplis.

On lui a aussi remboursé 5000$ pour des chambres d'hôtel à Montréal, alors qu'il habitait Montréal (grâce à un prêt de 500 000$ consenti par l'université à taux préférentiel)...

Des chambres d'hôtel à Montréal, alors qu'il habite Montréal ? Mme Porter était-elle au courant ?

Scandaleux, bien sûr. Si on a perdu le contrôle sur des trucs super faciles à encadrer - les dépenses d'un cadre -, imaginez quand il s'agit de trucs super difficiles à encadrer.

Ce qui l'est dix fois plus: le CUSM a mis deux ans et demi à rendre ces documents publics. Tiens toi, la Loi sur l'accès aux documents publics. Encore une fois.

L'opacité, mère de toutes les crosses.

Le pire ?

Le CUSM n'aura à subir aucune conséquence désagréable pour avoir multiplié les délais dans le traitement de la demande de The Gazette.