Certains ont dit qu'il ne fallait pas rire des Pineault-Caron, ces Saguenéens en commission parlementaire pour révéler en exclusivité planétaire que dans les mosquées marocaines, les hommes prient «à quatre pattes»...

Mais non, mais non, il faut en rire !

C'est ce qui manque dans notre délirant débat sur la Charte : un peu d'humour. Les Pineault-Caron se sont portés volontaires pour un peu d'humour involontaire. Je voudrais bien ne pas rire, mais c'est plus fort que moi...

D'ailleurs, selon mes sources, quand les Pineault-Caron sont sortis de l'Assemblée nationale, ils ont vu leur ombre, comme cette marmotte censée nous dire combien de semaines d'hiver nous devrons encore endurer...

Alors, vous savez ce que ça veut dire : encore huit semaines de témoignages dans cette commission parlementaire sur la Charte !

Huit !

Mais je regarde la liste des intervenants qui vont venir nous éclairer, au cours des deux prochains mois, et je me console.

On va encore rire, c'est sûr.

Je déconne, mais cette commission parlementaire est un remake de la commission Bouchard-Taylor. Beaucoup de singeries, quelques flashs intéressants et d'épiques combats contre le sommeil...

Mais, surtout, cette commission parlementaire rappelle à quel point Bouchard-Taylor fut une vaste et inutile diversion. Après des mois de tournée québécoise pour gratter le bobo identitaire de la nation, les commissaires ont remis un rapport...

Et qu'a fait le gouvernement de Jean Charest après avoir pris connaissance de ce rapport ?

Rien. Ou presque.

Il l'a foutu sur une tablette, pariant sur une accalmie de la fureur populaire. Le PLQ a continué à gouverner, est redevenu majoritaire. Les manchettes de hidjabs et de kippas et de cabanes à sucre sans porc se sont estompées...

Après la déroute électorale de 2007 - il est arrivé troisième -, le PQ s'est juré que plus jamais, il ne céderait le terrain de l'identité à un autre parti. Le PLQ a beau être redevenu majoritaire fin 2008 après le dépôt du rapport de Bouchard-Taylor, il ne s'est jamais fait une tête sur ces enjeux identitaires.

Là, sept ans plus tard, il arrive quoi ?

La tablette sur laquelle Bouchard-Taylor a été remisée par Jean Charest tombe sur la tronche des libéraux...

Tant pis pour eux.

Je ne suis pas d'accord avec les positions identitaires du PQ, je l'ai écrit cent fois. Mais le PQ a fait ses devoirs sur ces enjeux, il s'est fait une tête, pendant que les libéraux mettaient la leur dans le sable.

Résultat : les libéraux font aussi de l'humour involontaire, ces jours-ci, à improviser des idées sur l'identité, les accommodements, tutti tchador, avance, recule...

Je parlais de vaste diversion, plus haut, pour la commission Bouchard-Taylor. Pas que le travail des commissaires ait été mal fait. Mais quand on y repense, pourquoi eux ?

Pourquoi pas des députés pour aller sonder le pouls des Québécois ?

Pourquoi pas une commission spéciale, comme celle qui fut constituée par l'Assemblée nationale, en 2009, pour demander aux Québécois ce qu'ils pensent des soins de fin de vie et du suicide médicalement assisté ?

Cette commission spéciale fut un exemple de la beauté potentielle du travail de député. Un travail de moine, méticuleux, effectué dans le respect des collègues et du public, au-delà des intérêts partisans. Son rapport a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée. Et l'adoption du projet de loi révolutionnaire est imminente. Il traduit un consensus dans la population.

On peut toujours rêver, mais ce genre de commission spéciale composée de députés de tous les horizons est un modèle inspirant pour les questions délicates qui touchent le coeur et les tripes des Québécois.

Comme l'identité, tiens...

Si le PLQ avait choisi en 2007 de confier le diagnostic du bobo identitaire à des députés plutôt que de faire de l'impartition à des universitaires chevronnés, s'il avait agi sur les recommandations d'une telle commission non partisane, peut-être qu'il aurait moins mal à la tête ces jours-ci...

Peut-être que ces questions explosives et émotives auraient été réglées sans un oeil sur la sortie électorale. Et on n'aurait pas à se taper les singeries de nos citoyens les plus obtus une nouvelle fois.