Ça fait 10 ans ce mois-ci que j'écris des chroniques dans les journaux. C'est ce que je voulais faire depuis que j'étais ado. Le cliché voudrait que je dise que j'aime toujours autant ma job, mais c'est faux.

Je l'aime encore plus.

Car au début, je haïssais ça. Je ne savais pas écrire des chroniques. J'étais au Journal de Montréal. Mon cerveau était calibré pour écrire des textes de nouvelles. Or, quand t'écris des chroniques, c'est une autre partie de ton cerveau qui est stimulée.

Et cette partie-là, je n'arrivais pas à la stimuler. Cette partie-là du cerveau du chroniqueur est comme le point G: bien dur à trouver. Des heures à piocher sur mon Mac, pour trouver un lead, un angle. Sans oublier ces nuits d'insomnie, à me trouver nul, nul, nul...

Aujourd'hui, je ne suis que nul, nul; pas nul, nul, nul. Je me suis amélioré.

J'ai trouvé mon point G...

J'ai toujours vu la chronique comme un sport de contact. Tu donnes des coups, faut t'attendre à en recevoir (et quand t'en reçois, ta gueule, prends ça comme un grand).

Mais des fois, en regardant la reprise vidéo, bref en relisant mes papiers, ouf...

Je me dis que je suis brutal, des fois.

Tenez, j'avais quasiment raté, cet été, que l'histoire de plagiat à laquelle avait été mêlée Denise Bombardier, en France, avait trouvé son dénouement judiciaire. L'éditeur Fayard a été condamné à une amende parce que la coauteure française de Mme B. sur Ne vous taisez plus! , Françoise Laborde, canon télévisuel français, a été reconnue coupable d'un plagiat aussi gros que le nid-de-poule qui a avalé cette pelle mécanique, cet été, à Montréal.

La nouvelle m'a rappelé la chronique où j'avais évoqué l'affaire, en 2012. On savait que c'était Mme Laborde qui était sur le gril pour ce vol intellectuel et je l'avais souligné dans la chronique. Mais j'aurais voulu que l'intellectuelle québécoise commente l'affaire publiquement...

Cent cinquante mots auraient fait l'affaire, en fin de chronique. J'en avais fait une chronique de 852 mots, avec le nom de Mme B. dans le titre...

C'était vache. Mea-culpa, Mme B. Surtout que vous n'aviez rien à vous reprocher. Votre coauteure vous a roulée dans la farine.

J'espère que vous avez retiré Mme Laborde de vos amis Facebook. En fait, elle mérite que vous la bloquiez!

Bon, tiens, tant qu'à être dans les mea-culpa: mes excuses à Julien Poulin. Le comédien avait agrippé un drapeau du Hezbollah, dans une manif de soutien aux Libanais, pendant les frappes israéliennes de l'été 2006. Je l'avais critiqué de façon épouvantablement dure.

Une chronique de 600 mots là-dessus. C'était trop, beaucoup trop. Deux cents auraient suffi, comme amorce pour parler de cet été sanglant au Liban.

Cette chronique sur le comédien de Minuit, le soir, elle vient d'un ressort capital, quand on fait des chroniques: celui de l'indignation. Mais comme tant de choses, dans la vie, tout est dans la mesure. Celle-là n'en avait pas du tout.

Mes excuses, M. Poulin. Assurément la chronique la plus injuste que j'aie jamais publiée. Je n'avais pas encore trouvé mon point G.

Dix ans plus tard, je trouve encore un peu bizarre ce métier d'écrire des chroniques. Tu racontes des histoires, tu apportes un éclairage - le tien - sur l'actualité, sur la vie. Mais c'est juste ça, un éclairage. Et je sais que ça ne sauve pas des vies, jouer à l'éclairagiste dans un journal.

Récemment, un lecteur courroucé a conclu une longue critique avec cette chute qu'il croyait probablement assassine: "À quoi servez-vous, Patrick Lagacé?»

Ma réponse: "À rien.»

Et je le pense.

Mais merci de me lire, quand même.

Henri Massé à la pêche

Tant qu'à être dans les mea-culpa...

Vendredi, rappelant une vieille histoire du JdeM (sur laquelle j'avais chroniqué à l'époque), j'ai écrit que j'étais convaincu que l'ancien président de la FTQ, Henri Massé, s'était fait payer un voyage de pêche dans le Grand Nord, en 2005, où il était allé avec des entrepreneurs employant des syndiqués de la FTQ.

Quand le JdeM lui avait posé la question, à l'époque, à ce sujet, il avait refusé de répondre. Le JdeM avait traité l'affaire à la une.

Ce week-end, M. Massé m'a faxé la facture de la pourvoirie (1525,01$) et le chèque utilisé pour la régler, en août 2005.

Mes excuses, donc. Ce que j'ai écrit était inexact. M. Massé a payé, que la chose soit dite.

- Mais, M. Massé, n'auriez-vous pas dû montrer ces documents au Journal, dès 2005?

- Non! C'était du chantage. Le journaliste m'a dit, à l'époque: «Vous allez voir, vous allez parler!» Chu un gars fier, pis la presse, vous êtes pas un tribunal, vous êtes pas un juge qui peut ordonner au monde de parler...

(Le journaliste, Martin Bisaillon, nie avoir tenu ces propos.)

Aujourd'hui, M. Massé ferait la même chose, jure-t-il... Enfin, s'il n'était pas à la retraite, à pédaler dans les vallées de l'Estrie, où il est aussi gentleman-farmer.

- Un mot sur la commission Charbonneau, M. Massé?

- Je la regarde pas souvent.

- Et quand vous la regardez?

- J'ai décidé de ne pas jouer à la belle-mère, en quittant la FTQ, alors je n'ai rien à dire.