Quand il était question de politique, mon père n'avait qu'un seul et unique conseil à me donner: «Quand un politicien montre la Lune, Fils, demande-toi si son doigt n'est en fait pas dans ton derrière, par la magie des effets spéciaux...»

Mais non, je déconne. Mon père ne m'a jamais dit ça. Mon père était un homme de peu de mots et de-pas-d'opinions-politiques-pantoute.

En fait, sa seule opinion politique était que la municipalité devrait installer au plus sacrant un mur de verdure entre notre maison et l'autoroute 15, devant laquelle nous habitions. Pour atténuer le bruit.

Mais ce n'est pas une chronique sur toi, papa, c'est une chronique sur la confiance envers nos élus...

Donc, la semaine dernière, le gouvernement péquiste a finalement annoncé à l'univers la bonification du régime de redevances minières. En campagne électorale, le PQ promettait que cette bonification ajouterait 400 millions au Trésor public. Ce ne sera pas 400 millions. Ce sera 56 millions!

Le PQ avait fait la même chose avec la taxe santé. Rappelez-vous, en campagne électorale, tous les candidats péquistes promettaient l'abolition de l'injuste taxe santé de 200$ décrétée par les libéraux.

Une fois au pouvoir, le PQ a aboli la taxe santé... Pour les moins bien nantis d'entre nous. Pour ceux qui font plus de 43 000$: pas d'abolition. Autre promesse brisée.

Je tape sur le PQ, mais tous les partis sont coupables.

Pouvez-vous épeler le mot-clé de l'élection de 2003, celui qui devait symboliser la réinvention de l'État? J'ai nommé réingénierie.

Pouvez-vous dire sans rire «La santé, c'est notre priorité» ? Mais quand on attend dix-septheures trente aux urgences en moyenne, il n'y a pas de quoi rire. C'était (juste) quinzeheures cinquante-quatre en 2005-2006.

Je sais, je sais: chialer contre les promesses électorales brisées est un rituel postélectoral aussi inutile que pester contre les nids-de-poule printaniers. On s'y fait.

Mais il y a pire que les promesses brisées. Au moins, la promesse, elle est là, elle fait partie du décor. Pire que ça, il y a ces décisions prises une fois au pouvoir et dont on n'avait rien dit, en campagne électorale.

Prenez l'aide sociale. En campagne électorale, le PQ n'a jamais dit qu'il allait botter le derrière des assistés sociaux. Rien. Pas un mot. C'eût été formidable d'entendre la vision péquiste de l'aide sociale en campagne. C'est le forum idéal, non?

Et que fait le PQ, une fois au pouvoir? Eh oui, il botte le derrière des BS.

Encore là, tous les partis sont coupables. Prenez le Parti conservateur, qui était il y a 25 mois en pleine campagne électorale, espérant être enfin majoritaire.

A-t-il dit qu'une fois au pouvoir, il se dessinerait une petite couronne royale britannique sur la tête? Non.

A-t-il donné la liste de ces organismes et règlements qu'il a décidé d'abolir d'un coup de balai omnibus, dans son budget 2012? Non.

A-t-il dit qu'à son avis, le Conseil national de recherche scientifique (CNRC) devrait uniquement faire de la science «utile», lire au-service-de-l'Entreprise? Non.

Pourtant, si je me fie à la version Disney de ce qu'est une démocratie, c'est en campagne électorale qu'on débat des idées et des gestes qu'on veut poser, une fois élu.

Ce n'est pas ce qu'on a eu.

On a eu le chef conservateur faisant du VTT dans une ferme ontarienne, flattant un chat dans une école vétérinaire de l'Île-du-Prince-Édouard, se servant une bière dans un pub de Nouvelle-Écosse...

Autant de décors génériques peuplés de Canadiens zordinaires (mais crispés pour l'occasion), pour que le PM puisse répéter que l'économie est sa seule et absolue priorité, loin des reporters et de leurs questions.

C'est Michelle Courchesne qui a inspiré cette chronique. Quand Gilles Cloutier a dit au Canal Charbonneau la semaine passée que c'est l'ex-top ministre de Jean Charest qui avait quémandé à Dessau de le libérer, lui, le mercenaire électoral, pour qu'il puisse organiser la campagne du libéral Guy Ouellette en 2007, elle a bien sûr dû s'expliquer.

En entrevue au Devoir, Michelle Courchesne n'a admis aucun tort. Et elle a blâmé les médias pour les procès d'intention faits aux élus: «Je ne suis pas sûre que j'y retournerais [en politique]. Honnêtement, être traités comme on est traités, je ne suis pas sûre...»

Ça ne vient pas à l'esprit de Mme Courchesne que les élus sont «traités» comme ils sont traités parce qu'ils agissent comme ils agissent.

Dit un truc, fait le contraire. Fait un truc, c'était pas annoncé...

Et je ne parle même pas d'aller voir un show de Céline Dion avec Gilles Vaillancourt, alors que des histoires troublantes circulent sur son compte depuis une décennie au moins.

Oh, avant de finir, juste vous dire que le mur de verdure dont rêvait mon père, la Ville a fini par l'ériger. Bon, après sa mort, mais c'est l'intention qui compte, j'imagine.

Quelle Ville?

La Ville de Laval!

Pourquoi je dis ça? Je ne sais pas trop. Parce que toute est dans toute?