J'adore ce siècle. Un siècle où tout le monde peut s'improviser éditorialiste émérite et lancer son opinion à la face de l'univers. Vous pouvez le faire en petites tranches de 140 caractères sur Twitter. Ou en 404 mots sur Facebook.

La plupart des éditoriaux écrits par monsieur et madame Tout-le-Monde se noient en silence dans les flots numériques. Mais Janine Krieber, évidemment, n'est pas madame Tout-le-Monde: elle est l'épouse d'un ex-chef du Parti libéral, Stéphane Dion, toujours député de Saint-Laurent-Cartierville.

Une montée de lait épique, 404 mots politiquement très incorrects. Qui ont rapidement été retirés de la page Facebook par Mme Krieber. Qui a ensuite carrément supprimé sa page Facebook, introuvable hier soir.

Ce qui me frappe, ce n'est pas le propos de Mme Krieber. C'est sa candeur. Cette certitude que tout cela allait demeurer entre elle et ses «amis» Facebook. C'est toujours la candeur qui revient mordre les fesses des éditorialistes en herbe qui se lancent dans de grandes envolées sur Twitter, sur Facebook ou dans la blogosphère.

Prenez Allan Walsh, mieux connu sous le pseudonyme walsha sur Twitter; encore mieux connu dans la vie comme étant agent de joueurs de la LNH. Dont Jaroslav Halak, goaler de son état, adjoint de Carey Price, vacillant gardien de but titulaire du Canadien de Montréal.

Eh bien, sur Twitter, au début du mois, Walsh a souligné que Carey Price, rival de son poulain, peinait devant les buts. Il a souligné les statistiques quelconques de «Scary» Price dans un accès d'indélicatesse.

Choc, stupeur, controverse ont suivi les candides propos de Walsh.

Puis, l'agent de la LNH a opté pour la même porte de sortie que l'épouse de l'ex-chef du PLC: il a appuyé très fort sur la touche DELETE.

Ce qui me fascine, à vrai dire, dans ces controverses qui naissent de paroles lancées sur Twitter, sur Facebook ou dans la blogosphère, c'est que ces bibittes ne sont pas nées hier. On sait que des mots écrits sous le coup de la colère, pour consommation par un auditoire restreint, possèdent un potentiel viral très réel.

Un de mes hobbies est de lire les statuts de mes 2688 «amis» sur Facebook. Et je suis régulièrement ébahi par l'imprudence de bien des gens. Des insultes, des informations très personnelles, des blagues cochonnes: on trouve de tout, chez nos amis. Même des choses qui pourraient, un jour, leur nuire. L'imprudence, sur le web, est la soeur siamoise de la candeur.

Le plus drôle, dans l'«affaire Krieber»?

C'est que Michael Ignatieff, principale cible des taloches de la femme de M. Dion, n'a pas répondu aux attaques, prétextant que les commentaires ne sont plus sur ladite page Facebook. Il faudrait expliquer à M. Ignatieff la métaphore du dentifrice qui, une fois sorti du tube, ne peut pas être remis dedans. C'est un peu la même chose sur les internets...

Le plus ironique?

Eh bien, on a appris au début de la semaine passée que le New Oxford English Dictionary a admis en ses pages un nouveau mot, pour son édition 2010: le verbe unfriend. C'est l'action de larguer quelqu'un de ses amis Facebook, justement. En français, on pourrait dire «décopiner».

Je pense que le PLC et Mme Krieber vont bientôt décopiner.

Et M. Dion, lui? Va-t-il décopiner d'avec le PLC?

Ah, ça, je ne sais pas. On verra qui porte les culottes chez les Dion-Krieber.