Un mot sur le chef de la police de Kingston qui a senti le besoin, risible, de dire ceci: les victimes, a dit Stephen Tanner, «partageaient les droits, dans notre grand pays, de vivre sans peur, en sécurité, d'exercer la liberté de choix et d'expression».

Pourquoi rappeler ça? Pourquoi souligner une évidence? Pourquoi dire que la Terre est ronde?

Ah, parce que ce qui est désormais considéré comme un quadruple meurtre, ce qu'on soupçonne être un «crime d'honneur», a une dimension culturelle. Les accusés sont des gens originaires d'Afghanistan. Musulmans.

Pourquoi préciser ça?

Juste le dire, juste le fait que le chef d'un corps de police d'une ville canadienne sente le besoin de rappeler ce genre de chose est une concession aux extrémistes, aux illuminés qui vivent en fonction de superstitions rétrogrades.

Crime d'honneur? So what!

Quatre femmes sont mortes. On a cru à un accident. La police traite l'affaire comme un quadruple meurtre. C'est tout ce qui compte. Et la plus grande taloche à infliger aux barbares, parce que c'est de la barbarie, de tuer parce que le code de la tribu a été «enfreint», c'est justement que l'appareil judiciaire s'y attarde aussi peu que possible.

À commencer par un flic qui est le bras armé de l'État.

Le Canada a un Code criminel. Dans ce Code criminel, on détaille les crimes que la société n'accepte pas. Et, à côté, on y accole des sanctions: prison, amendes, etc. Le crime le plus grave: tuer quelqu'un, avec préméditation.

Dans ce Code criminel, c'est assez clair, je crois: on ne peut pas tuer sa soeur (ou sa fille ou sa femme ou sa voisine) parce qu'elle désirait avoir un iPhone, coucher avec le laitier, manger du porc ou s'adonner à la danse sociale. Il n'y a pas d'accommodement raisonnable pour cause d'obscurantisme.

Alors, on peut bien expliquer ce qu'est un crime d'honneur. Donner du contexte. Donner des statistiques, c'est très bien, les statistiques et le contexte.

Mais ça n'a pas rapport. Justement, parce que ce n'est pas l'Afghanistan, le Pakistan ou l'Arabie Saoudite, ici, ce n'est pas un État islamique aux lois et aux coutumes rappelant le Moyen-Âge, on ne devrait pas avoir à le préciser. Surtout pas quand on est chef de police.

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII

Les trois accusés ont-ils comploté pour tuer trois des leurs, trois êtres humains partageant leur sang? Ainsi qu'une femme qui, dit-on, était la première épouse de Mohammad Shafia, femme présentée par la famille comme une cousine?

Oui, et c'est la taule. Non, et c'est la libération.

C'est à peu près aussi simple que cela, désolé. Commencer à chercher à comprendre, à relativiser, c'est embarquer sur le terrain des excités, des extrémistes et des barbares qui ont des systèmes de justice parallèles.

Ce qui compte, c'est la preuve. Est-elle solide? Les «noyées» avaient-elles de l'eau dans les poumons? Des traces de violence sur le corps? Le volant de la Nissan portait-il les empreintes des accusés? La triangulation des signaux de portables des accusés les place-t-elle près des lieux du crime au moment estimé des faits? Le trio accusé a-t-il tenu des propos incriminants sous écoute électronique?

Des preuves, de la science, des faits. C'est ce qui compte.

C'est pour ça que je suis tombé sur le derrière en entendant ce policier préciser ce qui ne devrait jamais l'être. Bien sûr que ce pays est un pays qui valorise l'égalité entre les hommes et les femmes, la liberté de choix, tout ça.

Mais c'est très canadien, non, de préciser ainsi l'évidence? Surtout en matière multiculturelle. On veut tellement être multiculturel. On s'est tellement fait dire - à mots couverts, bien sûr - que critiquer l'ethnique est par essence raciste, que nous en sommes rendus à voir des chefs de police, en pleine télévision, souligner qu'il n'est pas canadien de tuer des femmes... Donnez-moi 15 coups de bâtons, quelqu'un, je rêve!

Ce n'est pas raciste de dire qu'il y a des «nouveaux Canadiens» qui proviennent de cultures rétrogrades. Ce n'est pas raciste de dire que la charia est une hérésie. Ce n'est pas raciste de dire que l'islam militant, depuis quelques années, veut restreindre la liberté d'expression pour soustraire Mahomet à la critique.

Pourtant, on se fait traiter de raciste quand on ose s'aventurer dans ces eaux.

Le flic qui précise que les femmes, ici, ont les mêmes droits que tout le monde, est un flamboyant symbole de cette mollesse from coast to coast.

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII

Les accusés sont musulmans. Et des musulmans, à les voir, tout ce qu'il y a de plus intégrés. Madame ne porte ni le voile, ni le niqab, ni la burqa. Monsieur est un homme d'affaires prospère qui venait de s'acheter un centre commercial à Laval. Un centre commercial, à Laval! Peut-on être plus «intégré» que ça?

Et pourtant, de toute évidence, non. Ce dont on les accuse témoigne du contraire. Ce qui transpire témoigne d'un siècle qui n'est pas le nôtre.

Le plus beau pied de nez qu'on puisse faire aux obscurantistes, à ceux qui lisent le Coran avec des yeux d'attardés, c'est justement de faire ce procès uniquement sur les faits.

C'est le meilleur «message» à leur envoyer: tu tues ta soeur (ou ta fille, ou ta femme, ou ta voisine) parce qu'elle t'a «déshonoré»?

Le système va te trouver, va recueillir des preuves, va te faire condamner. Ensuite, voici la prison, on y trouve une petite salle de prière, tu pourras y lire tes recueils de superstitions. Pendant 25 ans.

DANS LA MÊME VEINE - S'il y a un procès, si ces gens ne plaident pas coupables, il sera aussi très intéressant d'entendre la DPJ et ses représentants témoigner. La DPJ a été impliquée dans la famille, parce que Hamed Mohammed Shafia, 18 ans, le fils, jouait apparemment au matamore avec ses soeurs. Pour une fois, la DPJ ne pourra se réfugier derrière la sacro-sainte confidentialité des dossiers pour ne pas expliquer ce qu'elle a fait. Ou pas.