On ne saura probablement jamais le fond de l'histoire. Pourquoi Julie Snyder a-t-elle été écartée de l'entrevue qu'elle devait réaliser avec Céline à Las Vegas ? Qui a pris la décision de confier l'entrevue à Marie-Claude Barrette et pour quelles raisons ? Est-ce que ça venait de Céline elle-même ? D'Aldo Giampaolo ? De René-Charles, devenu, aux dires de sa mère, son nouveau proche conseiller ?

Est-ce que ça venait de la haute direction de TVA qui, après s'être enfermée dans le mutisme le plus complet, affirme maintenant que Julie n'avait jamais même été pressentie pour cette entrevue ?

Qui dit vrai ? On ne le saura jamais. Tout ce qu'on sait, c'est ce qu'on a vu mercredi : une entrevue menée par une intervieweuse fantôme qui a posé tout au plus quatre questions - et encore - et qui, pendant plus de 30 minutes, a laissé Céline s'envoler « up, up, up » dans le ciel étoilé de Disney.

Interviewer est un art. C'est aussi un rapport, une intimité, une chimie. Même si Julie et Céline ne sont pas les plus grandes amies du monde et que le vrai allié de Julie était René, il reste qu'à l'écran, une rencontre entre Julie et Céline était toujours riche et intéressante. Parce que Céline avait une idée très claire de qui était Julie et savait répondre à ses attentes et se mouler, en somme, à son énergie et à sa personnalité. Julie savait en faire autant, allant chercher chez Céline cette étincelle, cet éclat spontané, cette confidence loufoque, autant d'éléments qui, au final, produisaient un moment de télévision, parfois un peu énervant mais fort et jamais banal.

Or, dans l'entrevue qu'a menée Marie-Claude Barrette, j'ai eu la désagréable impression que Céline ne savait pas à qui elle avait affaire, qu'elle était perdue et sans repères.

Et pour compenser l'absence de signes connus et de marqueurs, elle parlait, parlait, parlait, se perdant dans un flot de paroles qui aurait commandé un frein, un recentrage, une précision. Mais à tout coup, Céline se heurtait au regard béat et admiratif de son intervieweuse qui se pinçait sans doute d'être là, mais qui ne lui opposait aucune résistance. Et surtout qui ne lui était d'aucun secours, ne lui offrant rien pour la ramener sur terre, avec le reste de l'humanité, la laissant plutôt s'égarer dans d'interminables conjectures à moitié ésotériques, qui étaient plus inquiétantes qu'autre chose.

Dormir avec ses jumeaux toutes les nuits, faire comme si papa était toujours présent, voire omniprésent comme un dieu tout-puissant, tout cela aurait mérité des explications, sinon un soutien psychologique.

L'entrevue avec Deborah Roberts sur ABC ou même celle de Catherine Tabouis dans Paris Match étaient-elles meilleures ou si différentes que cela ? Oui et non. De toute évidence, certains thèmes comme la vie sans René ont été imposés par les circonstances et probablement aussi par l'entourage. On trouve partout la référence au film Up de Disney et au fait que papa n'est pas mort, mais seulement envolé.

Il reste qu'avec Deborah Roberts, Céline était moins évanescente et enlisée dans la mort et le deuil, et beaucoup plus présente et incarnée. Quant à l'entrevue avec Paris Match, la journaliste y ratisse plus large et nous apprend un tas de choses qui sont absentes de l'entrevue de TVA. Des révélations sur René-Charles, qui étudie en ligne à la maison et qui se fait réveiller et servir à déjeuner tous les matins par un médecin de famille. Des confidences sur le désir de Céline d'avoir une maison au bord d'un lac au Québec ou sur sa relation avec son nouveau manager, Aldo Giampaolo, relation qui, selon Céline, grandit chaque jour. Et à la fin, un aveu de Céline qui jure qu'elle est la femme d'un seul homme, qu'il n'y en aura pas d'autres et qu'elle a fermé son coeur à clé à jamais.

Si Julie avait été là, c'est à peu près certain qu'elle aurait posé ces questions et plusieurs autres à Céline. Manque de chance : bien que Julie soit encore de ce monde, quelqu'un semble l'avoir envoyée professionnellement « up, up up » dans le ciel étoilé avec René, ce qui, bien franchement, n'est pas mérité.

MEGYN ET DONALD

Pour certains, l'entrevue de la semaine ne fut pas celle de Céline mais celle de la journaliste de Fox Megyn Kelly avec Donald Trump, entrevue qui a mis fin à des mois d'hostilités et d'insultes de la part de Trump. Autant dire que Megyn Kelly n'a pas manqué de courage ni de cran en voulant confronter (poliment) celui qui, depuis un an, l'a traitée de chienne (bitch), d'incapable, d'incompétente et d'innombrables autres quolibets sexistes.

Refusant de tomber dans le piège de la rancune ou du règlement de comptes, la journaliste a mené cette entrevue, qui était plus psychosociale que politique, avec une intelligence et un aplomb qui forcent l'admiration. Bravo !

On dit que Megyn Kelly rêve de faire des entrevues politiques, mais aussi des entrevues plus dans l'esprit people de Barbara Walters. Si j'étais le nouveau gérant de Céline, j'en prendrais bonne note.

captures d'écran

Donald Trump a accordé une entrevue à la journaliste Megyn Kelly, qui avait provoqué son courroux lors d'un débat entre les candidats républicains il y a quelques mois.