Alice Guy, ça vous dit quelque chose? C'est la toute première femme cinéaste de l'histoire du cinéma. Son premier film de fiction, La fée aux choux, date de 1896. On y voit un couple de jeunes mariés se promener dans un jardin potager. Juste au moment où le nouveau marié demande à sa douce si elle aimerait avoir un enfant, une fée fait jaillir d'un chou un beau poupon qui suce son pouce. Cette première oeuvre de fiction n'a pas été sa dernière. Après avoir fondé ses propres studios de cinéma, Alice Guy a réalisé de 30 à 40 autres films.

Avec un aussi beau départ, on aurait pu s'attendre à ce qu'à l'instar d'Alice Guy, les femmes prennent rapidement leur place au cinéma et fassent mentir ceux qui, comme l'a si bien dit Cate Blanchett aux Oscars, «s'accrochent à l'idée ridicule que les films faits par des femmes, avec des personnages féminins forts, sont des expériences de niche».

Malheureusement, l'élan donné par Alice n'a pas eu plus d'effet d'entraînement que l'Oscar de Kathryn Bigelow qui devait, en principe, accoucher d'une nouvelle génération de femmes cinéastes à Hollywood. C'était il y a quatre ans. On l'attend toujours.

Depuis plusieurs années déjà, le Center for the Study of Women in Television and Film de l'Université de San Diego se penche sur la place des femmes dans le cinéma américain. Sa directrice, Martha Lanzen, a trouvé un titre très évocateur pour les rapports de son groupe de recherche: The Celluloid Ceiling - le plafond de celluloïd, un croisement entre le plafond de verre et le «placard de celluloïd» (un livre et un film sur la représentation de l'homosexualité à l'écran).

En 2013, le groupe du «Plafond de celluloïd» a analysé la répartition des tâches pour les 250 films les plus populaires de l'année. Les femmes y détenaient 16% des postes, une baisse de 1% par rapport à 1998! Quinze ans et rien n'a changé.

Au poste de réalisateur, en 2013, on ne comptait que 6% de femmes - une baisse de 3% par rapport à l'année précédente. Dans les secteurs connexes, il n'y avait que 10% de femmes scénaristes, 15% de productrices et seulement 3% de directrices photo.

Avec de tels chiffres, pas étonnant que la vaste majorité des films américains raconte des histoires faites sur mesure pour les hommes, leurs frères et leurs fils. «Si on a une majorité d'hommes blancs qui détiennent les postes-clés dans l'industrie, on est assuré d'avoir une majorité d'hommes blancs à l'écran», a affirmé Martha Lanzen à une journaliste du New York Times.

Son groupe de recherche s'apprête d'ailleurs à lancer une nouvelle étude sur les personnages féminins au cinéma américain. Il y a fort à parier que les résultats ressembleront à ceux compilés par le groupe de recherche des Réalisatrice équitables chez nous.

Pendant plusieurs mois, l'an dernier, une petite équipe de chercheuses a épluché 35 films québécois sortis en 2011. Sur les 35 films, seulement 7 avaient été réalisés par des femmes. Au total, 899 personnages parlants ont été examinés.

Martha Lanzen aurait pu écrire la conclusion: les gars qui réalisent des films racontent des histoires de gars qui mettent en scène des... gars. Or, comme les réalisateurs masculins sont majoritaires, leurs personnages sont majoritaires et occupent plus de temps écran.

L'étude des Réalisatrices équitables date d'un an, mais rien n'indique que la situation a changé chez nous, sauf pour un aspect: en juillet dernier, la SODEC a modifié une mesure de son programme d'aide au long métrage. On en a peu parlé; pourtant, il s'agit d'un pas important. Désormais, un producteur ne peut déposer que deux projets par date de dépôt, mais il peut en déposer trois si le troisième est un projet réalisé par une femme. Autant dire que cette mesure incitative va faire monter la cote des réalisatrices auprès des producteurs et c'est tant mieux.

Le nouveau règlement est encore trop récent pour qu'on en mesure l'effet, mais il est presque déjà assuré que son impact sera positif pour les femmes cinéastes d'ici. Le plafond de celluloïd ne disparaîtra pas pour autant demain matin. Mais un jour, peut-être. En ce 8 mars, on le souhaite plus que jamais.

On en parle trop

Des slogans des partis politiques. La campagne électorale est encore jeune et il est normal que, n'ayant rien à se mettre sous la dent, les médias se rabattent sur les slogans qui laissent à désirer. Mais un slogan est un slogan. On vote pour un parti, pas pour un slogan. Alors on passe à go et on prend un autre appel.

On n'en parle pas assez

De la belle collaboration des commerçants d'Outremont avec les organisateurs des Trois Jours de Casteliers. À quelques endroits dans le quartier, des vitrines affichent les gigantesques figures à la fois sublimes et effrayantes de ce théâtre de marionnettes pour petits et grands. C'est une superbe initiative et un bel hommage à ce festival qui se tient jusqu'à demain au Théâtre Outremont.