La maison du joueur du Canadien Maxime Lapierre est une sorte de château McDo, planté comme un caillou chauve au milieu d'une banlieue lunaire de la Rive-Sud. Pendant les 13 prochaines semaines, sa maison sera le théâtre d'une rénovation, mais surtout d'une émission nouveau genre qui mêle hockey, déco et téléréalité. Si je me fie à ce que j'ai vu mercredi soir à TQS, la nouveauté du concept ne prouve rien sinon que la dernière chose dont nous ayons besoin, c'est d'une émission qui mêle hockey, déco et téléréalité.

Même si le vaillant attaquant, qui s'est défoncé toute l'année pour le Canadien, vit seul dans un château que 20 familles africaines pourraient occuper sans se marcher sur les pieds, il n'est pas seul devant la caméra. Que non! En fait, c'est tout juste s'il arrive à exister à l'écran tant sa décoratrice Marie-Christine Lavoie occupe la patinoire. Celle qui est aussi la conjointe du joueur Mathieu Dandenault (c'est fou ce qu'on en apprend dans cette émission) est assistée par la très discrète et unilingue Hanna Koivu, femme de Saku, et aussi à l'occasion par d'autres femmes de joueurs que l'on coupe au montage, au gré des échanges de leurs maris.

 

Dans la première émission, Marie-Christine pose plusieurs questions existentielles à Maxime comme: «Quelles sont tes couleurs préférées autre que le rouge pompier» et «As-tu oui ou non besoin d'un coin salle à manger?»

Mais à mon avis, elle a oublié de lui poser la question existentielle la plus importante. «Peux-tu nous dire, Maxime, pourquoi avec tous tes millions et ta belle jeunesse, t'es allé te fourrer dans cette sinistre banlieue d'un complexe résidentiel qui semble avoir été rasée par une attaque nucléaire?»

Surtout que Maxime n'arrête pas de se plaindre que sa maison est trop familiale et qu'il se sentirait mieux si elle ressemblait plus à un lounge ou à un hôtel. Faudrait peut-être que quelqu'un lui dise que le centre-ville de Montréal déborde de condos et de lofts semblables à des vastes chambres d'hôtel conçues expressément pour des jeunes et vaillants célibataires comme Maxime qui n'ont jamais le temps de s'enraciner quelque part. Évidemment, si Maxime avait acheté un condo à son image plutôt que cette maison obèse dont Marie-Christine ne cesse de vanter le charme champêtre inexistant, il n'y aurait pas eu de rénovation ni de téléréalité pour sauver TQS, mais ça, c'est une autre histoire.

Pour l'instant, il n'a pas encore été question d'argent, ce qui signifie que l'argent n'est pas un problème. Ça me rappelle un célèbre dicton. S'il faut que tu demandes le prix, c'est que t'as pas les moyens de te l'acheter. De toute évidence, Maxime n'a besoin de demander le prix de rien et surtout pas du foutu mur de pierre de deux étages que Marie Christine veut à tout prix lui coller.

Mais revenons au coût de cette méga-rénovation à laquelle nous sommes conviés. Pourquoi au fait? Pour piquer des idées de décoration que nous n'aurons pas les moyens de nous payer? Pour saliver d'envie devant la vie des joueurs riches et célèbres? Pour rêver au jour où nous aurons une aussi grosse maison que Maxime ?

Comprenez-moi bien, je ne suis pas en train de critiquer ce brave Maxime qui mérite tout ce qu'il a gagné à la sueur de son bâton, y compris cette luxueuse rénovation.

Ce que je critique, en fait, c'est l'opportunisme d'un diffuseur qui profite de la saison de la Coupe Stanley pour nous en mettre plein la vue avec tout sauf du hockey et qui, mine de rien, fait l'apologie «d'une consommation ostentatoire et d'un gaspillage généralisé» comme l'écrit si bien Hervé Kempf dans son bouquin. Cela dit, merci à TQS de m'avoir montré comment vivent les joueurs de hockey. Si jamais je vire marxiste, on saura d'où ça vient.

COURRIEL Pour joindre notre chroniqueuse: npetrows@lapresse.ca