Les scandales de la SHDM et des compteurs d'eau ont sapé la confiance des Montréalais. La cote de popularité du maire Gérald Tremblay est en chute libre.

Ce ne sont pas les journalistes qui le disent, mais un sondage de la firme Angus Reid Strategies-La Presse réalisé auprès de 805 Montréalais les 6 et 7 mai, une semaine après que les rapports du vérificateur de la Ville et de la firme Deloitte eurent sérieusement écorché l'administration Tremblay. Si j'étais maire - Dieu m'en garde! -, je méditerais sur ces chiffres. Et après avoir médité, je parlerais aux gens de mon équipe et je leur poserais des questions. De vraies questions. J'arrêterais de les croire aveuglément. Mais ce n'est pas le genre du maire, qui préfère le rôle du bon gars. Le problème, c'est que la majorité des Montréalais ne croit plus en son innocence.

Mais revenons au sondage. Premier constat: la confiance s'est volatilisée. Depuis le début de l'année, le degré de confiance des Montréalais envers le maire a dégringolé de 57%. Une gifle. Que dis-je, une douche froide. Ou les deux.

Deuxième constat: le maire a perdu sa crédibilité. Cinquante-six pour cent des personnes interrogées ne le croient pas lorsqu'il jure qu'il n'était pas au courant des «malversations reliées à la SHDM et au dossier des compteurs d'eau». Seulement 22% le croient. Deuxième gifle.

Les Montréalais s'intéressent aux scandales de la SHDM et des compteurs d'eau. La complexité de la chose ne les rebute pas. Pour le plus grand malheur du maire. Près de 60% des personnes interrogées ont suivi «de très près ou d'assez près» la controverse entourant l'attribution du contrat des compteurs d'eau et environ la moitié (45%), le feuilleton de la SHDM.

C'est énorme. La vente du club de hockey Canadien, par exemple, est suivie par 56% des Montréalais. Qui l'eût cru? De vulgaires compteurs d'eau aussi populaires que le légendaire Tricolore!

La SHDM et les compteurs d'eau sont des dossiers techniques, complexes, difficiles à suivre, avec des ramifications obscures et des liens incestueux entre des élus, des fonctionnaires et des compagnies. Une chatte y perdrait ses petits. Peu importe, les Montréalais s'accrochent. Environ la moitié d'entre eux se passionne pour ces histoires de tuyaux et de ventes de terrains.

Si j'étais Gérald Tremblay, j'avalerais ma salive de travers.

L'effet scandale est indéniable. Le degré de satisfaction a chuté: seulement le tiers des Montréalais sont très ou modérément satisfaits du maire; 66% croient que les scandales ont terni l'image de la Ville et, cerise sur le gâteau, 38% croient que Gérald Tremblay devrait quitter la mairie. Des chiffres qui font mal.

Pour bien mesurer l'ampleur de la dégringolade, il faut se rappeler que le maire a toujours été populaire. Selon un sondage réalisé par Léger Marketing* en février, 54% des Montréalais étaient satisfaits et 32% étaient prêts à le réélire, comparativement à 4% pour Benoit Labonté et 5% pour Richard Bergeron.

Aujourd'hui, non seulement le taux de satisfaction a chuté de 20 points, mais l'impopulaire et obscur Benoit Labonté talonne le maire. Selon Angus Reid, 26% des Montréalais voteraient pour Gérald Tremblay, 21% pour Benoit Labonté et 10% pour Richard Bergeron.

Ouille!

Le maire a non seulement perdu son innocence, mais aussi sa couche de téflon.

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Autre question d'Angus Reid: «Parmi les personnalités suivantes, qui ferait le meilleur maire pour Montréal?» Suit une liste de huit noms: Lisa Frulla, Martin Cauchon, Pierre-Marc Johnson, Louise Harel, Gilbert Rozon, Denis Coderre, Jacques Duchesneau et Robert Laramée.

Et s'il y avait des élections, a ajouté Angus Reid, pour qui voteriez-vous? Cinq des huit personnes nommées ont battu le maire, y compris Denis Coderre.

Dur pour l'ego de Gérald Tremblay.

Les Montréalais peuvent bien chercher un sauveur et s'imaginer que Pierre Marc Johnson ou Louise Harel courront au chevet de la Ville. La triste réalité, c'est que personne, ou presque, ne veut se risquer à gouverner l'ingouvernable.

À cause de l'odeur de scandale qui flotte obstinément au-dessus de la Ville. Et à cause de l'enchevêtrement de structures qui la rend ingérable. En voulez-vous, des couches, en v'là: 19 arrondissements transformés en petits royaumes, une ville centre, 15 villes reconstituées, un conseil d'agglomération, une communauté métropolitaine.

Maire de Montréal? Pas très tentant comme boulot.

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*Le sondage Léger Marketing a été réalisé entre les 9 et 11 février auprès de 1005 répondants vivant dans les 19 arrondissements de la Ville de Montréal. Marge d'erreur: 3,1 points de pourcentage. Celui d'Angus Reid a été fait auprès de 805 personnes vivant dans l'île de Montréal les 6 et 7 mai. Marge d'erreur: 3,5 points.