Encore une autre débandade boursière attribuable à la fameuse crise bancaire américaine liée au papier commercial adossé aux hypothèques américaines à haut risque, les subprimes.

Pendant que les petits investisseurs de par le monde voient leur portefeuille fondre, les gestionnaires des fonds de couverture (hedge fund) et même ceux des portefeuilles institutionnels (caisses de retraite et fonds communs) doivent s'en donner à coeur joie.

 

C'est la course à celui qui vend le plus vite dans le dessein de faire tomber des titres le plus possible et de les ramasser par la suite au prix le plus bas. De la grande spéculation à outrance, non pas seulement sur les titres qui méritent d'être liquidés mais sur tous les titres.

Prenons hier. Que les banques américaines se fassent matraquer à la baisse... c'était normal et mérité à la suite des inquiétudes soulevées par Lehman Brothers qui s'est placée sous la protection de la loi sur les faillites. Dix grandes banques internationales (Bank of America, Citibank, Goldman Sachs, JP Morgan Chase, Merrill Lynch, Morgan Stanley, la britannique Barclays, l'allemande Deutsche Bank et les suisses Credit Suisse et UBS) se sont engagées à faciliter la liquidation des positions de Lehman Brothers dans le marché des produits dérivés.

Après avoir «investi» 29 milliards US dans le rachat de Bear Stearns et quelque 200 milliards US dans les organismes américains de refinancement hypothécaire Fannie Mae et Freddie Mac, il n'était pas question pour le Trésor américain et la Réserve fédérale d'investir cette fois dans le sauvetage de Lehman Brothers. La liquidation de cette banque d'affaires (639 milliards US d'actifs en mai dernier) deviendra la plus grosse faillite bancaire de l'histoire américaine.

Mais que plusieurs des grandes banques canadiennes se fassent donner en cours de séance hier une volée à cause des nouvelles entourant Lehman Brothers... là, les grands spéculateurs de la Bourse se montrent sous leur vrai jour de manipulateur de marché. À l'exception de la CIBC qui a une certaine exposition, les autres grandes banques canadiennes n'ont pas à écoper autant de la crise bancaire américaine. Au plan fondamental, nos institutions bancaires roulent presque sur l'or à comparer aux américaines!

Plus frustrant encore, que dire aussi des titres des autres secteurs qui ont subi hier des baisses de 10% et plus au cours de la séance?

En Bourse, il faut toujours garder en tête que ce sont les gestionnaires de portefeuilles institutionnels qui donnent quotidiennement le ton et de la volatilité aux marchés boursiers. Et le ton et la volatilité sont souvent déterminés non pas en fonction du «fondamental» qui soutient les titres (revenus, bénéfices, etc.) mais plutôt en fonction du «mental» des investisseurs institutionnels. Plus les marchés sont volatils, à la hausse comme à la baisse, plus ils sont contents. Plus les cours bougent, plus ils essaient d'en profiter.

Paradoxalement, dans leurs lettres financières, les dirigeants qui chapeautent ces mêmes investisseurs institutionnels nous font la morale en nous invitant à faire le mort et ainsi à conserver nos fonds d'actions éternellement, sans jamais profiter des hausses de marché.

Je trouve insultant d'entendre des stratèges de maisons de courtage et de fonds communs de placement conseiller aux petits investisseurs de rester passifs avec leurs portefeuilles d'actions et de fonds communs, surtout après des hausses de marché de 15% ou plus.

Juste au cours des deux dernières années, voyons voir (pour le fun) le comportement de l'indice S&P/TSX60, lequel se négocie sous le symbole boursier XIU, à la cote de la Bourse de Toronto. Cet indice représente les 60 plus grandes sociétés canadiennes.

> Septembre 2006 à janvier 2007: "15,2%

> Janvier à mars 2007: -5,3%

> Mars à juillet 2007: "16,7%

> Juillet à août 2007: -14,3%

> Août à novembre 2007: "16,7%

> Novembre 2007 à février 2008: -16,7%

> Février à juin-juillet 2008: "28,5%

> Juillet à hier: -17,8%

Comparativement à février dernier, on pourrait dire ce matin qu'un investisseur n'a pas perdu un cent avec son placement dans l'indice de la Bourse de Toronto, ce dernier se négociant pratiquement au même niveau qu'il y a sept mois.

C'est vrai. Son problème? Il a juste omis d'engranger en argent sonnant les 28% de gains qu'il avait accumulés de février à juillet.

Comme il est impossible de savoir à quel moment un marché aura touché son sommet ou son creux, l'une des meilleures recettes boursières consiste à réinvestir progressivement dans un marché déprimé et, à l'opposé, à se désinvestir progressivement dans un marché gonflé à bloc.