Il y a quelques jours, le poète Jean-Paul Daoust m'a envoyé un courriel dans lequel il disait vouloir me parler d'un projet qui allait réunir la poésie et l'orgue. Il ajoutait que l'évènement allait se tenir dans son coin de pays, Sainte-Mélanie. Intrigué, je lui ai donné rendez-vous au Sky, dans le Village.

Arrivé le premier, je le guettais d'un tabouret du bar. Tout à coup, les dizaines de milliers de boules aux couleurs de l'arc-en-ciel qui voûtent la rue Sainte-Catherine ont baissé les yeux. Jean-Paul est apparu dans toute sa splendeur. Veston couvert de fleurs, foulard rose et verres fumés chromés, Ulysse pénétrait dans son royaume.

Le serveur savait ce que voulait Jean-Paul Daoust : du vin blanc. Celui qui sévit chaque semaine à Plus on est de fous, plus on lit n'a pas attendu que le verre arrive pour attaquer de front le sujet. Comme s'il n'avait pas assez de projets devant lui, l'homme de 72 ans a accepté d'être le porte-parole d'un nouvel évènement nommé Rendez-vous couleurs, orgue et poésie. La première édition aura lieu les 6 et 7 octobre (week-end de l'Action de grâce) à Sainte-Mélanie.

« Disons que l'église est moins fréquentée qu'avant. Il fallait trouver une façon de lui redonner vie. Au lieu de créer le Festival du cochon qui tousse, on a pensé à la poésie. »

- Jean-Paul Daoust

Comme le lieu, érigé en 1870, est riche d'un orgue Casavant, un comité constitué d'une poignée de résidants a eu l'idée de mettre sur pied un évènement qui, chaque année, conjuguera les mots de certains poètes aux sons de l'orgue.

C'est l'excellent organiste et claveciniste Luc Beauséjour (originaire de Rawdon) qui a l'honneur d'être le premier musicien qui accompagnera les poètes invités. Simon Boulerice, Carole David, Queen Ka, Frédéric Généreux, Marco Geoffroy et Anne-Sophie Poisson vont défiler devant l'autel pour offrir leurs textes alors que se fera entendre le Casavant.

Grand habitué du Festival international de la poésie de Trois-Rivières qui culminera le même week-end, Jean-Paul Daoust a pu compter sur la générosité et l'esprit d'entraide de l'équipe trifluvienne pour obtenir la présence du poète sénégalais Amadou Lamine Sall. « C'est quelqu'un de très important, dit Jean-Paul Daoust. On est très heureux de l'avoir. » À cela s'ajoutera la présence de Chloé Sainte-Marie et d'un choeur qui vont présenter un poème de Jean-Paul Daoust rédigé en latin.

HOMMAGE À LOUISE-AMÉLIE PANET

Comme souvent « tôuttt est dans tôuttt » selon Raôul Duguay, Jean-Paul Daoust a appris que la poétesse Louise-Amélie Panet (son père était le juge Pierre-Louis Panet qui a donné son nom à la rue) a vécu dans le manoir de la Seigneurie d'Ailleboust qui se trouve à Sainte-Mélanie. Cette femme, qui fut également peintre et claveciniste, y a connu des jours heureux en compagnie de son mari Bent William Berczy (fils du peintre William Berczy) de 1832 jusqu'à sa mort, en 1862.

Jean-Paul Daoust rendra hommage à cette femme, l'une des rares qui étaient instruites à cette époque, en lisant quelques-uns de ses poèmes. On pourra également, grâce à la gentillesse des occupants du manoir, visiter les lieux en compagnie de l'essayiste et poète Gaëtan Dostie, ainsi que d'autres animateurs. Finalement, un sentier littéraire rendant hommage à Louise-Amélie Panet et Jean-Paul Daoust sera aménagé en pleine nature.

Jean-Paul Daoust me décrivait ce projet, mis sur pied avec trois fois rien, et j'en avais des frissons. Quand je dis trois fois rien, vous savez combien le comité organisateur a amassé en dons et commandites pour créer tout cela ? 29 000 $. 

Oui, vous avez bien lu. C'est avec 29 000 $ que l'on va réaliser cet évènement. Chapeau, cher comité ! C'est ce qu'on appelle du dévouement.

Cette petite ville de Lanaudière (cerclée de Joliette, Saint-Gabriel-de-Brandon, Saint-Côme et Rawdon) est devenue le port d'attache du poète il y a 34 ans. « Au départ, j'avais une maison à Montréal et une autre à Sainte-Mélanie. J'ai vendu la maison de Montréal, je me suis acheté un condo au centre-ville et j'ai rénové celle de Sainte-Mélanie pour en faire mon lieu de vie principal. En ville, je suis comme un chien fou. À la campagne, j'écris. Je suis plus calme. »

Jean-Paul Daoust et tous ceux qui ont travaillé à la première édition de cet évènement espèrent faire découvrir leur municipalité. « On veut mettre Sainte-Mélanie sur la carte culturelle du Québec. On veut montrer que tout ne doit pas venir des grands centres », dit Jean-Paul Daoust.

Ce projet a un impact sur la communauté. Il a pour effet de rassembler les gens. On a demandé aux élèves de l'école d'écrire un poème. Les textes seront accrochés à un arbre.

Tout le monde à Sainte-Mélanie se prépare à recevoir les visiteurs, à recevoir la poésie et la musique. Même le curé s'implique. Celui-ci s'est enquis récemment de la nature des oeuvres artistiques qui seront exposées dans son église et que les visiteurs pourront voir avant les spectacles du samedi et du dimanche.

« Est-ce que tout cela sera présentable ? », a demandé le prêtre, quelque peu soucieux. Vous savez ce qu'a répondu Jean-Paul Daoust ? « Ne vous inquiétez pas, monsieur le curé, ça sera comme à la chapelle Sixtine. »

Irrésistible Jean-Paul Daoust ! Comment refuser son invitation ?

Le Rendez-vous couleurs, orgue et poésie, à Sainte-Mélanie, les 6 et 7 octobre

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE-Montreal---Lancement de la programmation du Festival international de la littérature. Jean-Paul Daoust fait une lecture.----25 aout 2015-ART # 772 956