Céline Dion qui épate les modeuses en portant un coton ouaté à l'effigie du film Titanic signé Vêtements, la griffe la plus décoiffante du moment, ça surprend. Justin Timberlake qui s'impose avec la chanson de l'été, I Can't Stop the Feeling ? Pas sûre que j'aurais misé mon chèque de paie là-dessus non plus. Mais le retour des Pokémon ? Ça, moi, en tout cas, je ne l'avais vraiment pas vu venir du tout.

On a beau savoir depuis toujours que les modes vont par cycles et que tout revient, l'omniprésence des années 90, là, est juste devenue incontournable.

On dirait que l'été 2016 est un peu l'été 2096. D'abord Martha Stewart à C2MTL, puis Clinton à la place de Clinton... Ne reste qu'à imaginer le Brexit un peu comme la suite de l'embargo européen sur le boeuf british à cause de la maladie de la vache folle - l'été 96 ! - et le tableau est presque complet.

Et on dirait que ceux qui auront compris ça arriveront à la rentrée les poches pleines...

Le titre de Nintendo, la société mère des Pokémon, jeu vidéo phare des années 90, et copropriétaire de Niantic Labs qui a développé le jeu, n'en finit plus de grimper à la Bourse de Tokyo : plus de 90 % d'appréciation depuis le lancement du nouveau jeu Pokémon GO, le 6 juillet, des milliards en capitalisation de plus, alors que celui-ci n'était officiellement offert que dans trois pays, les États-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

Ce genre d'explosion de titres, les parquets n'en voient pas souvent, même si la possibilité que cela soit une folie de passage - rappelez-vous King et Candy Crush - demeure. Après tout, le titre n'a pas encore remonté aussi haut que du temps de la Wii...

Pokémon GO, pour ceux qui auraient été en camping sans WiFi depuis 10 jours, c'est le jeu vidéo du moment, téléchargé partout même si ça ne devait pas être officiellement possible, et adopté par les adeptes de tous les âges, mais surtout les préados, ados et autres milléniaux nostalgiques des personnages fictifs façon manga de leur enfance.

En gros, le jeu nous amène à la chasse aux personnages de Pokémon - Pikachu et compagnie - avec une application qui utilise à la fois les capacités de géolocalisation des téléphones intelligents et leurs caméras, pour combiner le tout sous forme de réalité augmentée. Donc les personnages que l'on cherche apparaissent virtuellement sur notre chemin quand on regarde le paysage au moyen de notre portable. Contrairement aux jeux sur écran classiques qui exaspèrent les parents de tout ado scotché dans le sous-sol, Pokémon GO amène les joueurs à l'extérieur, fait marcher, fait prendre l'air, fait prendre conscience des lieux qui les entourent.

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Depuis qu'on a abandonné nos Game Boy pour nos Galaxy et nos Wii pour nos iPad, on ne pensait plus beaucoup à Nintendo. Super Mario ? Zelda ? Donkey Kong ? Doux souvenirs. Mais rien pour faire acheter quoi que ce soit.

Là, la machine à sous est repartie en grand.

Comme le fait par exemple King, pour Candy Crush et ses dérivés, on offre aux joueurs de payer pour passer par-dessus certains défis. Grâce à cela, seule source de revenus pour le moment puisque le jeu est gratuit, le jeu permettrait d'engranger près de 2 millions de dollars canadiens par jour selon la firme Sensor Tower, citée par le magazine Forbes.

Combien de personnes y jouent ? Difficile à dire puisque les statistiques officielles n'ont pas été publiées et que les estimations varient grandement de source en source, et de jour en jour. Le New York Times parle de 65 millions d'utilisateurs aux États-Unis, le USA Today, de 15 millions de téléchargements.

Et le phénomène ne fait que commencer.

Et d'autres sources de revenus pourraient s'ajouter.

Parce que Pokémon GO est essentiellement un jeu de chasse aux trésors. Et que fait-on quand on chasse des trésors ? On se balade et on s'arrête à toutes sortes d'endroits. Imaginez si certains de ces arrêts offraient de la bonne limonade, de bons sandwichs, des t-shirts aux couleurs du jeu ou tout autre bien commercial prêt à être acheté par les joueurs.

La porte qui s'ouvre, c'est celle de la commandite par des entreprises désireuses d'amener vers elles les utilisateurs.

Parce que malgré toutes les innovations technos qu'on pourra imaginer, une vieille vérité du marketing demeure, que ce soit dans le monde physique ou virtuel : avant d'essayer de convaincre les gens d'acheter, il faut d'abord les amener vers le commerce, vers le produit.

Et Pokémon GO peut faire ça.

Donc le défi de marketing qui attend le jeu, s'il ne veut pas devenir une des grandes passades de la décennie, ce sera d'arrimer justement ces liens publicitaires efficacement pour que la rentabilité du jeu assure sa créativité, sans qu'en chemin on perde l'intérêt de joueurs allergiques à une commercialisation trop évidente.

N'oublions pas, dans les années 90, il y a aussi eu les Tamagotchis (animaux électroniques), l'Arch Deluxe (un Big Mac sophistiqué), le Palm Pilot et le Newton, des minitablettes pré-internet qui reconnaissaient notre écriture. Et je vous le jure, on était sûr que c'était l'avenir.