Du hot-dog ou bretzel est-européen du siècle dernier aux grillades moyen-orientales actuelles, reflets des goûts des chauffeurs de taxi, des petits salariés et d'une immigration dynamique aux racines culinaires variées, la cuisine de rue new-yorkaise fait partie du paysage incontournable de la métropole américaine depuis toujours.

Depuis moins d'une dizaine d'années, toute une cohorte de nouveaux joueurs provenant parfois des écoles de cuisine, parfois des cuisines de grands restaurants s'est ajoutée à ces cantines ambulantes traditionnelles. Schnitzels à roulettes, glaces aux chocolats grands crus, espresso, gaufres belges... Le menu ne finit plus de s'allonger. Tout comme les plaintes des commerçants et de certains résidants, qui s'inquiètent de cette omniprésence dans leurs rues.

Après 60 ans d'interdiction, Montréal vient aussi de se lancer dans cette expérience de cuisine de rue. Que doit-il faire pour connaître une gastronomie urbaine aussi dynamique? Pour éviter les écueils? La question a été posée à des New-Yorkais.

! VIVE LES FILES

Il n'y a rien comme une bonne file d'attente devant une cantine, explique Daniel Humm, chef triplement étoilé Michelin de l'Eleven Madison Park, la table nord-américaine la mieux classée dans la liste des 50 meilleurs restaurants au monde. «La queue signifie qu'il y a beaucoup de demande, beaucoup de roulement, et donc que la nourriture est fraîche», explique celui qui rend hommage aux classiques new-yorkais, incluant les fameux bretzels, dans ses menus dégustation. «Si c'est plein de gens, c'est là qu'il faut aller.»

@ APPUI

Si on veut avoir de la cuisine de rue intéressante, toutes sortes de commerces qui donnent de la couleur à la vie urbaine dans nos espaces publics, il faut les fréquenter. «Ce sont des petits entrepreneurs indépendants qui ont besoin de l'appui de tous», explique Luke Santy, du camion du glacier Van Leeuwen - bonjour, la crème glacée à l'Earl Grey! -, installé à l'angle de la 23e Rue et de la 5e Rue.

# DISCIPLINE

«Il faut être discipliné», explique Taiwo Animashaun, qui gère le camion de yaourt glacé Yogo, angle Broadway et 18e. Discipliné notamment côté stationnement: il faut respecter les emplacements prévus. «Regardez où je suis, c'est dans un espace légal, réservé pour les véhicules commerciaux», dit-il en montrant le panneau. Lorsque les cantines ne respectent pas les interdictions de s'arrêter ou de se garer, cela crée des problèmes, de la confusion, du ressentiment. «Qui a besoin de chaos?»

$ VALEURS SÛRES

Tout l'intérêt de la cuisine de rue est dans la variété de l'offre, explique Patranila Jefferson, actrice rencontrée alors qu'elle mangeait un hamburger du Shake Shack, dans le Madison Park, devant une file d'attente qui devait faire 80 mètres. Sauf qu'il n'y a rien comme les valeurs sûres pour attirer des gens dans un carrefour à cuisine de rue. Sandwichs, burgers, glaces... «Il y a toujours de la place pour la bonne cuisine qu'on connaît, mais bien faite, santé, naturelle, bien meilleure que le fast-food», dit-elle.

% RÉFÉRENCES

Selon Jeremy Ng, préposé à l'accueil dans un hôtel, les Montréalais doivent apprendre rapidement que pour savoir où aller, quel comptoir choisir, il n'y a rien comme un réseau. «Si vous ne savez pas quel camion prendre devant tout ce qu'il y a, demandez aux gens autour de vous», dit-il. Évidemment, on peut aussi regarder soi-même à l'intérieur du camion pour voir si c'est inspirant. Tourner autour. Mais les conseils des contacts et des amis sont cruciaux.

? MULTICULTURALISME

L'intérêt de base de la cuisine de rue, c'est sa variété culturelle, explique Daniel Humm. «À New York, ce qui est génial, c'est qu'en une heure, on puisse goûter à tant de cuisines différentes de plusieurs continents.» Et la force de la cuisine de rue est de pouvoir amener les gens à goûter facilement diverses saveurs. On achète une petite portion. On essaie. Si on n'aime pas, ce n'est pas grave. La cuisine de rue doit être une vitrine.

& TREMPLIN

Jeff Zalaznick, qui possède trois restaurants italiens aux abords de Little Italy, tient à rappeler aux restaurateurs et entrepreneurs en herbe qu'il y a plusieurs histoires à succès dans le monde de la restauration de rue à New York. Plusieurs cas de camions qui ont été démarrés avec trois fois rien par de jeunes chefs dynamiques qui n'avaient pas les moyens de se lancer en affaires avec un toit et des murs. Ils ont commencé avec un camion, et leur entreprise compte maintenant une ou plusieurs adresses fixes. On pense à Calexico et ses tacos, aux glaces Van Leeuwen.

* PROPRETÉ

Tout le monde s'entend pour dire que la Ville, les clients et les restaurateurs de rue doivent tout mettre en oeuvre pour assurer la propreté autour de la cantine et là où les clients mangent. Donc il faut que la Ville installe des poubelles en conséquence et que tout le monde s'en serve!

( MOBILIER

Autre conseil d'une touriste à New York: l'expérience cuisine de rue est grandement rehaussée quand il y a du mobilier de rue généreusement déployé, soit des tables et des chaises pour s'asseoir dans les parcs, sur les trottoirs et partout où la Ville a décidé d'interdire la circulation des voitures.

IDENTITÉ

À New York, la cuisine de rue fait maintenant partie de l'identité de la ville. Ses hot-dogs, ses bretzels... «Chaque bouchée de hot-dog goûte New York», explique le chef Daniel Humm. Quel sera le plat fétiche de la cuisine de rue montréalaise? Hâte de goûter à ça.