Puisque cette année, le Portugal est à l'honneur au festival Montréal en lumière, autant dire que le poisson et les fruits de mer sont les aliments vedettes.

Il y a la morue, évidemment, omniprésente dans la cuisine lusitanienne, mais regardez les menus et vous verrez aussi du bar, des crevettes, des palourdes, des pétoncles, des langoustes, du mérou...

 

Si vous aimez les goûts d'océan, c'est donc le temps d'aller à un des restaurants participants. À moins que vous soyez un de ceux qui n'osent pratiquement plus manger de poisson, pétrifiés par la complexité et les contradictions des informations sur les variétés acceptables sur les plans écologique et nutritionnel.

Longtemps mis de l'avant comme sources idéales de protéines maigres, poissons et fruits de mer sont en effet maintenant au centre de toutes sortes d'importants questionnements qui transforment en casse-tête le choix de l'omble ou de l'espadon qui aura le droit (ou non) d'aboutir dans notre assiette.

Excès de mercure dans les gros poissons en fin de chaîne alimentaire, surpêche menaçant les stocks de certaines espèces hyper populaires, comme certains thons et même la morue, élevages hautement polluants en ce qui concerne certains saumons et crevettes...

La situation est complexe. Et tous les chefs, en débutant par ceux des pays où traditionnellement on mange beaucoup de poisson, se doivent d'y prêter attention.

«Les chefs portugais commencent à se poser beaucoup de questions», explique Teresa Vivas, qui a, à Lisbonne, une entreprise de communication travaillant notamment pour le grand chef portugais Vitor Sobral. «Le problème, c'est qu'il y a beaucoup de confusion.»

Comme ici, poisson rime avec interrogations.

Pour certaines variétés, la marche à suivre est limpide. On pense au thon rouge, par exemple, une espèce qui est clairement menacée. Dans son cas, la décision est simple: on n'en mange pas. Et de plus en plus de chefs, d'ailleurs, en commençant par ceux de tous les Relais&Châteaux du monde, boycottent maintenant ce produit, dont les stocks sont en chute libre.

Oui, certains établissements proposent du thon rouge qui n'en est pas (bien des comptoirs sushi offrent autre chose sous le nom de thon rouge, très rare et cher). Peu importe. Si le mot est sur le menu, vrai ou faux, on laisse tomber. Comme ça, on ne se trompe pas.

Même chose pour le bar du Chili, que l'on évite. D'ailleurs, de plus en plus de restaurants sérieux lui préfèrent maintenant la morue charbonnière, qui fait partie des poissons que l'on peut consommer sans inquiétude.

Pour d'autres poissons, par contre, les choix sont plus compliqués. Certains thons peuvent encore être mangés mais pas tous, même chose pour le saumon, les bars ou la morue. Pour faire un choix éclairé, il faut savoir quelle est la variété exacte, d'où vient le poisson - une espèce peut être fragile dans un océan et pas un autre -, s'il est sauvage ou pas, comment il a été pêché - parfois la pêche à la ligne est acceptable et pas au filet -, en quelle saison... Et les informations sur la vulnérabilité des stocks change. «On m'a dit récemment que la morue était en train de revenir», affirme Mme Vivas. Pourtant, il n'y a pas si longtemps, ce poisson était au centre des inquiétudes. Au Canada, on lui a d'ailleurs imposé un moratoire. Le Portugal, qui a longtemps pris sa morue au large de Terre-Neuve, s'approvisionne aujourd'hui en Norvège.

Quand on veut acheter du poisson, donc, par quelle question faut-il commencer? Et peut-on se fier aux serveurs qui, souvent, dans les restaurants non spécialisés, n'ont aucune idée des origines des poissons servis? Peut-on même se fier au poissonnier?

Comment choisir?

Le chef portugais Fausto Airoldi, président d'honneur du volet gastronomique du festival Montréal en lumière, s'inquiète beaucoup du poisson d'élevage. «Je n'ai rien contre l'élevage, si c'est fait correctement, dit-il. Mais il faut que ce soit vraiment bien fait», affirme-t-il, notant qu'il est essentiel, par exemple, que les poissons soient nourris de produits de la mer.

Selon le chef, il faut accepter de ne pas pouvoir manger de certaines espèces quand ce n'est pas la saison. Les élevages qui permettent d'être approvisionnés en tout, tout le temps, l'inquiètent. «C'est comme pour les fraises en plein hiver», dit le chef, qui cesse d'acheter du thon quand les taux de mercure sont trop élevés.

«Et puis, il ne faut pas oublier que nous avons encore beaucoup et assez de bons poissons sauvages. Nous avons les meilleurs poissons au monde.»

 

Comment s'y retrouver?

Comme consommateur, il faut se poser beaucoup de questions différentes si on veut manger poissons ou fruits de mer. Il faut s'informer sur l'actualité des stocks, et apprendre à faire confiance à des commerçants qui s'interrogent tout autant. Les sites web, comme celui de l'aquarium de Vancouver, qui dressent des listes des différents produits et leur donnent un feu vert, jaune ou rouge, sont aussi très utiles. Mais encore faut-il bien connaître le nom des poissons offerts au resto ou chez le poissonnier. Et s'assurer que ce qu'on nous vend est bien ce qu'on nous annonce. Dans les rayons du surgelé, au supermarché, on choisit les produits qui ont le sceau d'approbation du Marine Stewarship Council (MSC).

En m'inspirant de Taras Grescoe, qui a écrit Bottom Feeder, un livre sur la crise de la consommation du poisson, je vous propose quelques grandes lignes directrices.

> On essaie d'éviter les produits d'élevage à moins que ce soit bio, naturel ou écologiquement responsable.

> On choisit les petits poissons plutôt que les gros (thons, espadons, etc.), qui sont plus souvent menacés et plus souvent contaminés puisqu'ils sont au bout de la chaîne alimentaire.

> On privilégie la pêche à la ligne plutôt que les poissons pêchés avec des filets, qui attrapent trop de choses en plus du poisson recherché, et ceux pêchés avec des chaluts qui raclent et détruisent les fonds marins.