Mon opinion sur la violence au hockey, je me la suis faite en 1977, je crois, ou peut-être un peu avant. Je regardais encore des matchs à cette époque-là. J'aimais bien. On gagnait tout le temps la coupe Stanley avec Guy Lafleur.

Mais une chose me tapait déjà totalement sur les nerfs: les batailles. Les interminables batailles. Je trouvais ça d'une lourdeur, d'un ennui. Du temps perdu gris et visqueux. De la platitude solide comme lorsqu'il faut faire la queue pour renouveler sa carte d'assurance maladie et qu'on a oublié sa lecture. Ou quand il faut attendre aux douanes derrière un camion qui nous bouche la vue, dans le verglas. Long, long, long pour rien du tout.

 

Je ne peux pas concevoir que quiconque trouve intéressant de regarder de telles scènes de gars qui se battent sur la glace, mais il y a longtemps que j'ai décidé de cesser d'en parler. La vie est trop courte pour avoir à écouter quiconque défendre la violence au hockey.

Hier après-midi, toutefois, je me suis trouvée plongée malgré moi dans ce sujet par un groupe de gars révoltés par le niveau de la violence et l'acception de cette violence dans le hockey junior. La raison de la discussion: le procès qui vient d'ouvrir à la suite d'une attaque au bâton d'une gratuité inouïe d'un joueur envers un autre joueur, dans la Ligue junior majeur. Les gars, donc, voulaient savoir si je partageais leur indignation.

«Ben oui, c'est clair.»

- Tu trouves pas ça scandaleux?

- Oui, c'est ce que je viens de te dire.

Les gars étaient mille fois plus énervés que moi et déçus de mon calme.

En fait, ai-je tenté d'expliquer, ce n'est pas que je ne suis pas scandalisée. Je le suis. Beaucoup. Sauf qu'il y a belle lurette que les très nombreuses personnes comme moi, pas trop amatrices de ho-ckey, dépassées et découragées par l'importance qu'on accorde à ce sport dans notre espace public, ont abandonné l'idée d'avoir toute discussion là-dessus avec les fans, les membres de la secte.

Apathie? Lâcheté? Non. Dans la vie, c'est le cas de le dire, on choisit ses batailles. Et celle-là aurait dû être menée depuis longtemps non pas par ceux qui n'aiment pas ce sport, mais par ceux qui l'adorent.

Ce sont eux, parents, joueurs amateurs, spectateurs, fans, tous ces gens qui ont du plaisir à regarder le sport et à le pratiquer qui auraient dû prendre la parole longtemps avant qu'on en arrive là, à ce cirque dégénéré qui a besoin, apparemment, d'être policé par les tribunaux.

Pourquoi les amateurs ont-ils attendu que l'abcès crève et qu'on appelle les juges pour ramasser le dégât? Ne peuvent-ils pas faire eux-mêmes leur ménage? Avaient-ils peur d'être traités de peureux et de non-virils et autres épithètes inintéressantes à tendance homophobe qu'on entend, parfois, parfois, dans les vestiaires et les gradins?

Moi, je vous l'ai dit, je trouve ça d'un ennui profond, la bataille. Et quand on me dit que «ça fait partie de la game», je ne sais plus qui je trouve plus «macaque» (expression préférée des enfants actuellement). Sont-ce les joueurs violents ou leurs fans?

Alors si un juge commence à potasser là-dedans et à vous dire comment jouer, ce n'est pas moi qui serai déçue. C'est vous.