Lorsque le président américain Barack Obama est arrivé au parlement hier matin, il a tenu à saluer la foule.

Transporté en voiture sous une arche de pierre très close où il devait serrer la main de Stephen Harper pour ensuite entrer directement dans l'enceinte parlementaire, c'est lui qui a dit au premier ministre qu'il voulait aller faire signe aux quelques centaines de personnes venues le voir, malgré la gadoue.

De loin, très loin, caché derrière une vitre pare-balles et sous les bruits spectaculaires des hélicoptères qui donnaient à la scène un style «Oliver Stone au pays des queues de castor», il a donc agité la main vers le public. Et la foule qui l'attendait depuis plusieurs heures, assez convaincue pour être venue voir ce qui ne devait être qu'une voiture, s'est mise à crier sa joie.

 

«C'est une bouffée d'air frais», m'a confié Jackie, une dame venue de Toronto pour le voir, qui s'était plantée elle aussi avec son mari sur mon bout de banc de neige en espérant apercevoir le président.

La première image qui m'est venue à l'esprit comme un drôle de flash-back, en essayant de comprendre l'effet Obama sur tous ces gens venus le voir à Ottawa malgré le temps et malgré la probabilité de ne rien voir, est celle de Stephen Harper serrant la main à son fils et à sa fille en allant les conduire à leur école primaire au lendemain de son élection en 2006.

À l'époque, on avait fait grand cas de la raideur du geste et puis on l'a oublié. Sauf que le charisme et la spontanéité du président américain sont venus, hier, nous le rappeler, par contraste.

Sur mon bout de banc de neige, en regardant Obama, je me suis dit que, dans le fond, tous ces gens étaient là parce qu'ils rêvaient d'un leader qui les embrasse au lieu de simplement leur serrer la main de loin froidement.

Avez-vous écouté la conférence de presse des deux chefs de gouvernement?

Je ne sais pas combien de fois le président a prononcé le mot «famille», mais il l'a dit souvent. Le premier ministre, lui, qui avait pourtant fait de ce mot un des leitmotive de sa dernière campagne électorale, n'était pas dans ce registre. Il a montré qu'il connaissait ses dossiers. Mais faire des liens avec nos vies, notre quotidien?

À côté du président Obama, qui ramenait constamment les grands sujets discutés, notamment les questions énergétiques, environnementales et la relance économique, sur le plancher des vaches en traçant des liens avec l'avenir de ses enfants, de nos enfants, et le bien-être des familles américaines et canadiennes, le premier ministre Harper semblait d'une cérébralité frigorifique.

Ottawa n'est pas une ville reconnue pour ses coups d'éclat passionnés, mais hier, on sentait beaucoup d'affection pour le président américain aux alentours de la colline parlementaire. Rien à voir avec la commerciale effervescence de Washington ou de Chicago. Mais quand même. Bien des commerces y allaient de leur petite trouvaille - une soupe Obama, une vitrine de magazines uniquement Obama - et quand le président a décidé d'aller faire un tour impromptu au marché By, le charme a opéré sur une foule déjà conquise, incluant un marchand de «queues de castor», une spécialité locale, qui avait pris la peine de faire une création spéciale pour Obama.

Devant le parlement, la foule était relativement peu nombreuse cependant. Tout le monde s'en étonnait.

Lorsque j'ai demandé à une caissière d'un commerce non loin de là et fan avouée pourquoi elle, par exemple, n'avait pas pris congé pour aller le voir sur la colline, elle m'a dit qu'elle n'avait jamais pensé que ça en vaudrait la peine. «Ils nous avaient dit qu'on ne le verrait même pas.»

Il est très vrai que les autorités nous avaient dit, à nous les journalistes et donc à la population, qu'il serait pratiquement impossible de voir le président durant sa courte visite. Qu'il serait toujours loin, très loin. Et furtif.

Sauf que, durant les quelque six heures qu'il a passées au Canada, le président a salué le public deux fois et a trouvé le temps de prendre un bain de foule.

Le président et le premier ministre avaient comme objectif de montrer à quel point leurs deux pays ont des terrains d'entente.

Mais s'il y a une chose que cette visite a aussi démontrée, c'est à quel point, quand vient le temps d'établir un lien avec le public, de se «connecter» sur monsieur et madame Tout-le-Monde, le président américain est sur une autre planète.

En quittant Ottawa, hier, Obama a laissé entendre qu'en ce moment, il faisait trop froid au Canada.

 

Barack Obama se voit offrir un menu composé de mets canadiens

Le premier ministre Stephen Harper a invité le président des États-Unis, Barack Obama, et d'autres représentants du gouvernement américain à un repas de travail, hier midi, dans la suite du président du Sénat. Voici la composition du menu proposé.

Thon du Pacifique, vinaigrette de chili et d'agrumes; omble chevalier du Nunavut fumé à l'érable et au miso; légumes légèrement marinés et relish de betteraves biologiques.

Bison des Prairies fumé au bois de pommier; légumes racines d'hiver et champignons locaux; mousse de chou-fleur au romarin; sauce au genièvre et au vin rouge du Niagara.

Yogourt Saugeen arrosé de sirop au citron et à la lavande; compote de bleuets et de thé des bois; tuiles au miel de sarrasin de l'Acadie et au sumac.