Je ne pensais pas que ça existait sur la chic avenue Greene à Westmount, mais on peut toujours compter sur les partis politiques pour trouver des sous-sols beiges avec planchers en linoléum. C'est là que je me suis retrouvée quand les libéraux ont célébré l'élection de Marc Garneau, dans Westmount-Ville-Marie.

Je pensais que la candidate néo-démocrate, Anne Lagacé-Dowson, talonnerait d'un peu plus près l'ancien astronaute dans toute cette section centrale de Montréal. Mais non : il a gagné haut la main, avec une bonne vingtaine de points d'avance. 

Le monde change à une vitesse folle, les Bourses se plantent, se redressent, la technologie transforme le monde et nos enfants connaîtront peut-être un jour le remède à l'alzheimer... Mais il y a des choses qui semblent être comme elles sont pour toujours. Et en voilà une: Westmount élit des libéraux.

Ah oui! et voici une autre certitude de la vie: Vaudreuil-Soulanges, dans la banlieue ouest, ne vote pas pour les candidats-vedettes qu'on y parachute. Pas plus pour le conservateur Michael Fortier cette fois que Marc Garneau la dernière fois.

En fait, à bien y penser, l'île au complet ne change pas beaucoup. Des bloquistes au sud-est, les libéraux au centre, au nord, à l'ouest. Cette fois-ci, on a fait grand cas de la victoire de Justin Trudeau dans Papineau, que détenait le Bloc. Mais dans le fond, la super vedette a d'abord et avant tout repris la circonscription de l'ancien ministre Pierre Pettigrew.

En fait, c'est dans Ahuntsic que j'aurais dû aller passer ma soirée. Là, il y en avait du suspense. Digne de Jack Bauer. La dernière fois que j'ai regardé sur le site d'Élections Canada, la bloquiste et la libérale étaient à 38,9 % du vote toutes les deux.

Dans Outremont aussi, c'était assez excitant à cause de ce duel Mulcair-Dhavernas.

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Je me suis promenée dans les rues de Westmount-Ville-Marie pendant un bon moment, hier soir, avant que les résultats ne sortent, à la recherche d'un signe qui m'aiderait à voir un peu où s'en irait cette soirée électorale.

Dans les cafés et les bars, les télés diffusaient des émissions de sport ou des téléromans. Au café, personne n'avait même installé une télé pour regarder au moins les résultats défiler en sourdine, et je n'ai pas osé déranger ceux qui sirotaient leur chai latte, absorbés dans la lecture de manuels universitaires, pour leur demander ce qu'ils en pensaient.

Dans les rues, les panneaux électoraux côtoyaient les affiches annonçant les vide-greniers du long week-end.

À mon bureau de vote, j'ai rencontré des mamans avec leurs petites filles en trottinette, un monsieur pas inscrit sur la liste électorale accueilli avec un grand sourire par la dame à l'accueil qui avait l'air de dire «ah! enfin un cas problème», et aussi des ados qui avaient l'air de voter pour la première fois.

Évidemment, je n'ai demandé à personne comment ils allaient voter ou comment ils l'avaient fait. Pas par respect de leur intimité, mais plutôt parce que toute la journée, on m'a répondu des trucs tellement extraterrestres que j'avais peur que leurs propos compliquent encore plus ma compréhension de ces élections zigzagantes.

Car dès hier matin, j'ai rencontré une indépendantiste pure et dure qui a voté pour les libéraux, alors qu'au dernier scrutin, elle avait opté pour le NPD.

Ensuite, j'ai croisé un libéral pur et dur qui pensait peut-être voter NPD.

Ensuite une indécise qui hésitait entre le Bloc et les libéraux.

Je pensais qu'il n'y avait rien à comprendre, mais finalement, dans le fond, tout Montréal était là : le manque d'enthousiasme total pour les conservateurs et toutes sortes de signaux contradictoires qui ne pouvaient que nous mener directement à la case départ.

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Hier, quand je suis partie de chez les libéraux, j'en ai entendu deux qui se sont dit: «À bientôt! On se revoit au congrès au leadership?»