Certains ont un faible pour les films épiques et les costumes somptueux. D'autres, pour les romances à l'eau de rose ou les comédies musicales. J'ai un faible pour les films de sport.

Ce n'est pas la seule raison pour laquelle je me suis amusé ferme en découvrant Les pee-wee 3D: L'hiver qui a changé ma vie d'Éric Tessier, à l'affiche demain. J'avais vu la bande-annonce de ce film «pour la famille» sans en être impressionné. Je trouvais son titre ridicule. Je craignais le pire: une version préadolescente de Lance et compte, le film.

J'ai été très agréablement surpris. Bien sûr, Les pee-wee 3D est archiprévisible. On ne sort pas des paramètres mille fois exploités de ce genre de cinéma. Il y a beaucoup trop de buts marqués dès les premières séquences de jeu et chaque victoire semble avoir été obtenue à l'arraché, comme le veut le cliché.

Cela va de soi. J'accepte de bon coeur les conventions du film sportif. Personne ne doutait que Dean Youngblood réussirait son fameux lancer de punition dans le film portant son nom, même si le beau Rob Lowe avait l'air de patiner sur la bottine aussi péniblement que Bo Jackson dans ses pubs de Nike.

Les pee-wee 3D est un film amusant et touchant au-delà de tous ses clichés, qu'il embrasse avec joie. C'est un divertissement familial pleinement assumé qui ose, à travers les archétypes qu'il met en scène, aborder différentes thématiques: l'intimidation, la violence, le deuil. Chez les enfants comme chez leurs parents.

Il le fait avec doigté, grâce à un scénario bien ficelé, qui raconte les péripéties d'une équipe de hockey de Saint-Hilaire qui tente de se qualifier pour le prestigieux tournoi international pee-wee de Québec. Des Lynx menés par un capitaine pugnace (Rémi Goulet), malheureux de voir son autorité menacée par l'arrivée d'un surdoué du gouret (Antoine Olivier Pilon), démon blond nouvelle version, depuis peu orphelin de mère.

Le portrait que compose Éric Tessier (Sur le seuil, 5150, rue des Ormes) évite soigneusement la caricature. On devine chez les personnages, même esquissés sommairement, une certaine profondeur psychologique. Les «méchants» ont des scrupules; les «bons», des zones d'ombre.

Il y a inévitablement un père obsédé par le succès de son fils, un entraîneur russe impitoyable - qui semble tout droit sorti de L'archipel du Goulag - et une bluette qui se dessine subtilement entre la gardienne de but commotionnée et le joueur-vedette flegmatique. Mais l'ensemble reste assez réaliste.

Les acteurs (jeunes comme moins jeunes) sont très bons; les joueurs, assez doués pour être crédibles; les chorégraphies de hockey, inventives et fluides. Les dialogues ne sonnent pas faux et on n'exploite pas à outrance le pathos du jeune veuf (Normand Daneau), à couteaux tirés avec son fils unique, tentant de se refaire une vie dans une petite ville.

Sans être un grand film, Les pee-wee 3D m'a replongé, par sa vérité, dans certains souvenirs de mes 11 ans. J'ai souri en entendant l'un des joueurs des Lynx se plaindre, en parlant de ses imposants adversaires russes: «Y en a trois qui ont de la barbe!»

On disait exactement la même chose des joueurs de Valleyfield à l'époque où je jouais pour les Hawks de Lakeshore. Je me souviens aussi qu'un père furieux de la sous-utilisation de son fils avait frappé notre entraîneur au visage, après notre élimination des championnats du Québec. La tradition continue, comme on dit...

L'hiver de mes 11 ans, un film qui a marqué mon enfance a pris l'affiche. Un film qui s'est inscrit dans l'histoire de notre cinéma et dont on parle encore aujourd'hui (pas toujours pour les bonnes raisons). Le premier des Contes pour tous, riche de plusieurs idées que l'on retrouve aussi dans Pee-wee 3D. Cela laisse présager un succès populaire pour le film d'Éric Tessier. Si sa guerre des pucks a autant de résonance pour la génération de mon fils que La guerre des tuques en a eu pour la mienne.

Mes disques québécois

C'est le temps des rétrospectives. Le temps de partager, en quelques lignes, nos coups de coeur de l'année. En chanson québécoise, il n'y a pas de morceau qui a davantage cristallisé 2012 à mon sens qu'Intuition #1 d'Avec pas de casque, qui ouvre l'album Astronomie. Grâce entre autres à cette magnifique vidéo de joueurs de casseroles (disponible sur le web) s'unissant pendant les protestations étudiantes du printemps.

Mon disque québécois de l'année? Sans conteste Le treizième étage de Louis-Jean Cormier. Un album aérien et harmonieux, direct et dépouillé, de rage contenue et de grande douceur, qui a bercé mon automne. Ma découverte de l'année: sans surprise, l'Acadienne devenue Montréalaise Lisa LeBlanc, dont l'étonnant album éponyme est loin de se résumer à une chanson (Aujourd'hui, ma vie c'est d'la marde).

Chez les anglos, j'ai apprécié le retour à la grande forme de Leonard Cohen avec ses Old Ideas, Patrick Watson et ses Adventures in Your Own Backyard et, surtout, Visions de Claire Boucher, alias Grimes, plébiscité par la presse internationale (deuxième au palmarès des meilleurs disques de l'année de The Guardian et de NME, 33e à celui de Rolling Stone), notamment en raison de la perle synth pop qu'est Oblivion, nommée meilleure chanson de 2012 par Pitchfork.

Cette chronique fera relâche pendant deux semaines. Joyeuses Fêtes à tous.