Ce n'est pas seulement un spectacle pour faire oeuvre utile. Pas seulement un spectacle destiné à amasser des fonds pour une fillette de 4 ans, devenue du jour au lendemain orpheline de père.

C'est un spectacle qui a valeur de symbole. Un spectacle à la mémoire d'un homme, Denis Blanchette, désormais et pour toujours associé à un événement tristement célèbre de notre histoire. Un attentat contre la première femme élue à la tête du gouvernement du Québec, le soir de son élection.

La question s'est posée. Denis Blanchette est-il un héros? S'est-il, d'une manière ou d'une autre, interposé entre l'assassin et sa cible, ou s'est-il seulement retrouvé, comme le veulent le cliché et la vidéo de surveillance du Métropolis, au mauvais endroit au mauvais moment?

Qu'importe. Un homme est mort. Un homme innocent, sans histoire. Le père d'une fillette. Assassiné froidement, dans des circonstances dramatiques. Sa mort est, restera, un symbole.

Le spectacle organisé à la mémoire de Denis Blanchette, ce soir au Métropolis, est aussi symbolique. C'est le symbole d'un deuil qui se poursuit, d'un recueillement, d'une réconciliation nécessaire.

Un spectacle pour se remettre d'un traumatisme. Pour refuser la trame, celle de la haine et de la division, que son auteur a voulu nous inspirer. «To find closure», comme disent les Anglos.

Il y a eu agression. Pas seulement contre un homme et contre celui, Dave Courage, qui se trouvait derrière lui. Pas seulement contre un parti politique, contre ses idées et contre la femme qui désormais les incarne. Il y a eu agression contre une société, sa façon de voir les choses, de les appréhender, de les définir.

Le 4 septembre, j'ai été glacé par les mots du tueur. Par son désir de vengeance. Par son visage déformé par la haine. J'ai été troublé, au cours des jours qui ont suivi, par les réactions à ses paroles. À l'interprétation que certains ont voulu donner à ce qu'il a dit, à ce qu'il a voulu dire, à ce que tout cela signifie. La blessure est là aussi. Logée dans le sens absurde que l'on fait porter à deux phrases assassines.

Un homme est mort. Presque sous nos yeux. Ce soir, des artistes de tous les horizons se réuniront, sur le lieu même de la tragédie, pour lui rendre hommage. À l'initiative d'André Ménard, de l'Équipe Spectra, qui y a réagi spontanément, comme nous tous.

Il y aura Céline Dion, qui chante en anglais et en français. Il y aura Louis-Jean Cormier et Patrick Watson, un francophone et un anglophone qui chantent ensemble. Il y aura Coeur de Pirate et Ian Kelly, Vincent Vallières et Arcade Fire. Il y aura Win et Régine, l'incarnation même de la dualité linguistique montréalaise et du vivre-ensemble. Un symbole.



On aura été avertis

J'ai été invité récemment par le camarade Patrick Lagacé à commenter à son émission, Les francs-tireurs, l'arrivée en ondes à Montréal de Radio X, la fameuse «radio-poubelle» importée de Québec. Notre entretien, avec l'humoriste Kim Lizotte et l'animateur Jean-Philippe Wauthier, a été diffusé la semaine dernière à Télé-Québec.

Radio X n'a pas encore mérité, à Montréal, son étiquette de «radio-poubelle». Je n'y ai pas encore relevé de dérapage qui mériterait d'être dénoncé. Pour l'instant, les animateurs s'animent et s'indignent surtout entre eux, sur tout et sur rien. Sur le reportage des Francs-tireurs, entre autres, qui les a occupés près d'une heure hier matin. Reste que les dérapages seront inévitables. Pour la simple raison que la formule les appelle.

En janvier dernier - pas en 2004 à l'époque de Jeff Fillion, mais il y a quelques mois -, l'animateur Carl Monette a dérapé souverainement sur les ondes de Radio X Saguenay, en suggérant que les itinérants québécois devraient être envoyés «à la pelle» dans le Grand Nord pour qu'on en soit enfin débarrassés. Pour bien lui faire comprendre que des propos de ce genre n'étaient pas tolérés à leur antenne, ses patrons l'ont promu du Saguenay à l'émission du matin de Montréal... Ben cou'donc.

En direct des studios de Radio X, situés ironiquement en plein coeur du Mile End alors que la chaîne dit vouloir séduire «le banlieusard insatisfait de 40 ans», «Monette», qui tient en haute estime André Arthur, discute plus souvent qu'autrement avec son coanimateur, un ancien concurrent d'Occupation double, de sujets insignifiants. Mais il ne faudrait pas s'y méprendre. Dominique Maurais, qui anime l'émission-phare de la chaîne en direct de Québec, aime organiser des concours du type «Combien de BS sont aptes au travail?». Je soupçonne Éric Duhaime, qui anime l'émission du midi, de s'endormir la nuit en comptant, non pas des moutons, mais le nombre d'assistés sociaux que compte le Québec.

Une prédiction: Radio X, qui se targue d'être la «seule autorisée à tourner à droite sur un feu rouge à Montréal», ne tardera pas à se démarquer dans la veine bassement populiste qui a fait sa popularité à Québec. Oui, cela peut sembler étonnant, mais il y a pire au rayon de la démagogie que Benoît Dutrizac au 98,5 FM. On aura été avertis.

Photo: archives Le Quotidien

Carl Monette, animateur de Radio X.