C’est un peu comme Noël en juillet. Ou plutôt, comme apprendre en juillet les cadeaux que l’on recevra à Noël. Un Noël des cinéphiles, en quelque sorte, à la manière d’un Noël des campeurs.

Deux des quatre plus importants festivals de films au monde ont dévoilé cette semaine leurs programmations respectives. Et la promesse qu’ils nous font de plaisirs cinématographiques au cours des prochains mois est très inspirante.

Jeudi, la Mostra de Venise a dévoilé son menu de septembre, concocté par son tout nouveau directeur, Alberto Barbera, qui semble n’avoir négligé aucun effort pour faire oublier rapidement son prédécesseur Marco Müller.

Le plus vieux festival de films du monde – et certainement l’un des plus agréables – accueillera dans son enceinte du Lido, en compétition officielle, les Takeshi Kitano, Kim Ki-duk, Terrence Malick, Olivier Assayas, Brian De Palma, Xavier Giannoli, Brillante Mendoza et autres Ulrich Seidl du septième art.

Une brochette prestigieuse de candidats au Lion d’or que n’aurait certainement pas désavouée le Festival de Cannes (et qui compte du reste plusieurs habitués de la Croisette). Hors compétition, Jonathan Demme, Robert Redford, Susanne Bier, Spike Lee (avec un documentaire sur les 25 ans de l’album Bad, de Michael Jackson), Amos Gitai et Manoel de Oliveira (à 104 ans !) ajouteront encore plus de lustre à l’événement.

Dans ce qui semble être une réplique au Festival de Cannes, vivement critiqué en mai pour l’absence de films réalisés par des femmes dans sa compétition, la 69e Mostra a sélectionné quatre réalisatrices pour concourir au Lion d’or (mais aucun Québécois).

De son côté, le 37e Festival international du film de Toronto (TIFF pour les intimes) a annoncé mardi l’essentiel de sa programmation, où seront entre autres présentés en primeur mondiale les nouveaux films de Ben Affleck, Laurent Cantet, Sergio Castellitto, Costa-Gavras, Dustin Hoffman, Neil Jordan, Baltasar Kormákur, Deepa Mehta, Mike Newell, François Ozon, David O. Russell, Margarethe von Trotta, Tom Tykwer, Andy Wachowski et Lana Wachowski.

N’étant pas un événement compétitif, le TIFF a pu sélectionner à loisir les meilleurs « morceaux » des autres grands festivals, et fera, tel qu’il en a l’habitude, une place de choix au cinéma américain. À preuve, son film d’ouverture, Looper de Rian Johnson (The Brothers Bloom), un thriller futuriste hollywoodien mettant en vedette Joseph Gordon-Levitt et Bruce Willis.

Avec une telle superproduction en ouverture, la direction du TIFF s’assure d’une soirée de première illuminée par une pléiade de stars hollywoodiennes (Emily Blunt est aussi de la distribution). Jusqu’à tout récemment, la soirée d’ouverture du Festival était animée par un film canadien.

Il y a plusieurs années que Toronto se pose en rampe de lancement du cinéma américain d’automne, en prévision notamment de la soirée des Oscars. Mais de l’avis de la plupart des spécialistes, même à Hollywood, ce 37e TIFF est particulièrement marqué par une volonté de mettre en valeur le star-système américain.

Les autres grands festivals, conscients du pouvoir d’attraction médiatique des vedettes du cinéma américain, ne tiennent pas à laisser à Toronto – favorisée par l’industrie hollywoodienne – l’exclusivité de la manne. Personne n’a l’apanage de la chasse aux étoiles.

En mai, le Festival de Cannes a fait de l’œil à Hollywood, avec insistance. Pour des raisons sans doute de stratégie politique, d’après ce que l’on a pu en juger par la qualité de certains films. De la demi-douzaine de titres américains de la compétition, aucun ne s’est particulièrement démarqué. Et certains, parmi lesquels Lawless de John Hillcoat et Mud de Jeff Nichols, ne méritaient pas leur place, selon bien des observateurs.

Le jury présidé par Nanni Moretti a d’ailleurs évacué de son palmarès tous les films américains de la compétition, ce qui a été interprété par certains comme une rebuffade envers la direction du Festival.

Sur l’échiquier des festivals de films, Cannes est considéré comme le gotha du cinéma d’auteur et Toronto, même si l’étiquette est réductrice, comme la plateforme du cinéma commercial de qualité (ou « oscarisable »). Mais voilà que l’alignement des planètes semble changer légèrement.

Pendant que Cannes semble se prendre un peu pour Toronto (après le succès étonnant aux Oscars de The Artist, lancé sur la Croisette), Venise se prend un peu pour Cannes et Toronto, un peu plus pour Hollywood.

Résulte bien sûr de cette émulation une compétition, saine à certains égards, mais qui n’est pas sans risque. À la fin du règne de Moritz de Hadeln à la tête du Festival de Berlin, la Berlinale avait sacrifié un peu de son lustre et de son prestige à trop vouloir courtiser Hollywood, sans succès. La mondialisation du cinéma et de son star-système « américanocentriste » peut avoir des effets bien pervers.

Reste la bonne nouvelle : tous ces films prometteurs, annoncés à gauche et à droite, que nous pourrons bientôt voir, avec un peu de chance, sur un écran près de chez nous.

Films de Montréal

Il en a été question dans cette chronique il y a quelques mois, lorsque le musée Pointe-à-Callière a lancé un concours afin de désigner le film qui représente le mieux Montréal dans l’histoire du cinéma québécois. Les résultats de ce sondage auprès des internautes ont été dévoilés cette semaine et ils sont à mon avis plutôt désolants.

Les cinq lauréats sont Bonheur d’occasion de Claude Fournier, Bon Cop Bad Cop d’Erik Canuel, Un zoo la nuit de Jean-Claude Lauzon, Cruising Bar de Robert Ménard et Jésus de Montréal de Denys Arcand. Deux bonnes réponses sur cinq, ça ne vaut pas cher la douzaine.