Le lion, le taureau, le ver de terre et le paon. Mais toujours, le seul et même Michel Côté. Dix-huit ans après Cruising Bar, le film à succès qui a marqué sa carrière au cinéma, l\'homme aux quatre personnages reprend du service.

Pas une semaine ne s\'est passée au cours des 18 dernières années sans que quelqu\'un, quelque part, ne demande à Michel Côté s\'il avait l\'intention d\'ajouter un jour un deuxième volet à son Cruising Bar.

«J\'en étais rendu au point où je me suis demandé si je n\'allais pas me ramasser à l\'hospice sans avoir fait la suite! lance le principal intéressé. Il y a eu quelques moments marquants dans ma carrière - Broue, Omerta, C.R.A.Z.Y. - mais jamais les gens ne m\'ont autant parlé d\'un rôle qu\'avec Cruising Bar

Il faudrait plutôt parler ici DES rôles. Quand Cruising Bar a pris l\'affiche en 1989, la performance - car c\'en est une - de Côté a unanimement été saluée, même par les détracteurs du film. L\'acteur y incarnait quatre personnages, quatre types bien représentatifs de l\'espèce masculine, en chasse de conquêtes féminines un samedi soir. «Le lion» est un rocker aux muscles saillants; «Le taureau» est un dragueur bedonnant qui se croit irrésistible; «Le paon» est un snob qui compense ses insécurités en misant tout sur le paraître; et «Le ver de terre» est un pauvre homme mal pourvu par la nature, d\'une gaucherie et d\'une timidité maladives.

«Le film original se suffisait pas mal à lui-même, reconnaît Michel Côté. C\'est la raison pour laquelle il fallait attendre que le temps passe avant de penser à un nouvel épisode. Il fallait trouver un angle nouveau, un point de vue intéressant. En reprenant ces personnages-là 15 ans plus tard, on peut maintenant observer comment ils ont évolué.»

Premier clap, enfin!

Et cette fois, c\'est bien vrai. Le premier clap s\'est fait retentir sur le plateau de Cruising Bar 2 le 3 juillet. Le dernier se fera entendre le 18 août. 35 jours de tournage pour un film dont le budget s\'élève à 5,2 millions de dollars. Un montant «raisonnable» qui n\'appelle toutefois aucune extravagance. «Nous avons les moyens de nos ambitions mais nous avons quand même dû sacrifier des choses qui coûtaient trop cher, explique l\'acteur. Notamment au chapitre des cascades.» Fait à noter, Cruising Bar 2 est l\'un des rares projets à avoir reçu l\'aval des deux organismes de financement, Téléfilm Canada et la SODEC, dès le premier dépôt.

L\'équipe de création originale a ainsi été réunie, histoire de concocter une suite qui reprend l\'esprit du premier film. Il fallait aussi faire honneur au plaisir que tous ces artisans avaient pris en travaillant ensemble à l\'époque. Michel Côté et Robert Ménard se sont ainsi attelés à l\'écriture du scénario il y a un an et demi. Claire Wojas a ensuite peaufiné les angles. Pierre Mignot est de retour à la direction photo, et Ménard, qui n\'avait rien tourné pour le grand écran depuis L\'enfant d\'eau il y a 12 ans, assume de nouveau la réalisation. Nouveauté cette fois: Michel Côté coiffe aussi le chapeau de coréalisateur, une première dans son cas.

«Sur le plateau, Robert dirige, explique Côté. Je peux ainsi me concentrer essentiellement sur mon jeu. Cela dit, je m\'implique à tous les niveaux, tant sur le plan de la préparation, des choix artistiques, que sur celui de la postproduction.»

Pour Robert Ménard, cette collaboration se révèle très féconde. «Il faut bien faire place à la relève! lance-t-il à la blague. Comme Cruising Bar est avant tout basé sur une performance d\'acteur, mon rôle est de mettre cette performance-là en valeur. Dans ce genre de comédie, les spectateurs n\'attendent pas des plans de caméra vertigineux, ni de prouesses de mise en scène. Ce qu\'ils veulent voir avant tout, c\'est Michel.»

À cet égard, on a délibérément choisi de ne faire appel à aucune vedette pour donner la réplique à la tête d\'affiche. On mise plutôt sur de nouveaux visages afin que le spectateur n\'ait aucune référence par rapport aux personnages périphériques.

«Comme certaines scènes sont parfois très courtes, elles doivent faire leur effet très rapidement, explique Ménard. Dans un tel contexte, un tour de piste d\'une personnalité très connue aurait créé une distraction.»

De grandes attentes

Le récit parle par ailleurs toujours du désir qu\'ont les êtres humains d\'être aimés pour ce qu\'ils sont.

«Les rapports amoureux n\'ont pas tellement changé en 20 ans, estime Michel Côté. En revanche, les moyens que nous prenons maintenant pour nous rapprocher ne sont plus les mêmes. Les gens vivent dans une solitude terrible à notre époque. Le récit aborde aussi cet aspect des choses.»

Il n\'y a pas que les moyens qui ont changé. Le cinéma québécois a aussi subi de profondes transformations depuis l\'époque de la sortie du film original, lequel avait alors généré des recettes de 3 740 000$. Les artisans savent pertinemment que les attentes seront énormes. L\'obligation à la performance est bien réelle.

«On ne peut jamais rien prévoir dans le monde du cinéma, prévient toutefois Michel Côté. C\'est certain qu\'on sent la pression. Parce que chacun s\'est déjà fait un Cruising Bar 2 dans sa tête. Si on ne fait pas fausse route, je crois que les gens seront curieux et qu\'ils nous suivront.»

Distribué par Alliance Atlantis Vivafilm, Cruising Bar 2 prendra l\'affiche - en principe - le 27 juin 2008.