Assis en tailleur sur mon lit, un MacBook sur les cuisses, je commençais à me poser une question: pourquoi les gars qui se sont glissés entre les draps satinés de Carrie, Miranda, Charlotte et Samantha ont-ils pratiquement tous été des salopards de première, des guenilles molles ou des pervers en série?

Plus j'y réfléchis, plus je me demande: ouille, comment Carrie Bradshaw a-t-elle pu pondre ses chroniques du New York Star installée dans une position aussi inconfortable? Impossible de pianoter pendant plus de cinq minutes sans se donner un tour de reins.

En clopinant vers mon bureau, mon ordi sous le bras, je ne cessais de me demander: comment Carrie accumule-t-elle autant de vêtements Prada, de sacs Birkin et de Manolo en ne produisant qu'une seule rubrique par semaine? Mystère.

Retournons maintenant dans l'Upper East Side. Après six saisons et des dizaines de brunchs dominicaux plus salés que sucrés, les quatre héroïnes ont enfilé les conquêtes comme des Cosmos, puis ont jeté leurs hommes sans trop de remords, telle une paire d'escarpins Jimmy Choo de la saison passée. Pour elles, un copain a longtemps été une babiole désincarnée dont elles pouvaient discuter comme s'il s'agissait d'un article de catalogue.

Avait-il un gros pénis? Circoncis ou pas? Laissait-il des traces brunes dans ses sous-vêtements blancs? Avait-il les fesses poilues? Baisait-il comme un lapin? Maîtrisait-il l'art du cunnilingus? Aucun détail anatomique n'échappait à leurs globes oculaires cerclés de montures Versace.

En fait, peu de spécimens de la gent masculine ont trouvé grâce aux yeux du quatuor. D'accord, il y a bien eu Big, Harry Goldenblatt, Steve Brady et Smith Jerrod. Mais avant de les dénicher, les filles ont souffert le martyre. Sans blague.

Charlotte York a fréquenté un amant incapable d'atteindre l'orgasme sans la traiter de... (insérez ici une insulte comme salope ou pute). Elle a ensuite épousé Trey MacDougal, qui bandait mou ou pas du tout. La honte suprême pour un gars.

Carrie Bradshaw a aussi connu son lot de mésadaptés, dont l'écrivain Jack Berger, qui l'a plaquée en lui laissant un minuscule post-it d'explication. Quel mollusque. Et comment oublier le politicien Bill Kelley, qui a demandé à Carrie de lui uriner dessus?

Avant de retomber une 147e fois dans les bras de Big, Carrie a même suivi l'artiste Aleksandr Petrovsky jusqu'à Paris, pour découvrir - ô surprise - qu'il était manipulateur, jaloux et violent. Beau portrait.

Dans les premiers épisodes de la série, Miranda Hobbes a flanché pour Skipper Johnston, un nerd à lunettes qu'elle a d'abord méprisé, puis aimé, avant qu'il ne la largue. Vive l'indécision. L'accaparant travail d'avocate de Miranda, sa féroce indépendance et sa richesse ont ensuite fait fuir la majorité de ses soupirants. Comme si aucun New-Yorkais ne pouvait accepter que sa copine gagne plus de fric que lui.

Du côté de Samantha Jones, après avoir épuisé la banque de célibataires de Manhattan, du Bronx et de Queens, elle a finalement soufflé les mots tabous, soit "je t'aime", à l'hôtelier Richard Wright, qui l'a évidemment trompée et humiliée avec une jeune poulette. Puis, l'accumulation de déceptions amoureuses a poussé la tigresse Samantha dans les bras de la peintre Maria.

En excluant Aidan Shaw, trop parfait pour Carrie, seul Big a sauvé en partie l'honneur des gars. Oui, il a arraché Carrie des griffes du méchant Petrovsky. Mais n'oublions pas qu'il a souvent été odieux avec elle et qu'il a épousé Natasha, alias la femme de 5'10. Quant à Smith et Harry, ils ont déboulé très tard dans les vies de Samantha et Charlotte. Et j'ai l'impression que Steve a été un prix de consolation pour Miranda, qui craignait de vieillir seule.

En regardant par ma fenêtre entrouverte, tout en aspirant une bouffée de cigarette (O.K., cette partie est fausse), je me questionne toujours: les quatre amies ont-elles placé la barre trop haut? Ou est-ce nous, les hommes, qui sommes trop mollasses pour remplir les critères ISO-Sex and the City?