Certains s'attendaient à un duel entre The Social Network et The King's Speech. La 68e soirée des Golden Globes, coup d'envoi de la saison des galas, a plutôt consacré dimanche soir le grand favori de la critique américaine - incluant les journalistes étrangers en poste à Hollywood qui décernaient ses prix: The Social Network de David Fincher. 

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Ce film divertissant, retraçant les déboires juridiques du jeune créateur de Facebook, Mark Zuckerberg, a remporté les prix dans les catégories de pointe: meilleur film, meilleur scénario (Aaron Sorkin) et meilleure réalisation (David Fincher). The King's Speech, favori avec ses sept citations, n'est pas reparti du Beverly Hilton Hotel Gros Jean comme devant. Tel qu'attendu, le très éloquent Colin Firth a remporté le Golden Globe du meilleur acteur pour son rôle nuancé de roi bègue (Georges VI). Il est largement favori pour l'Oscar dans la même catégorie.
 
Le Golden Globe du meilleur acteur dans une comédie a récompensé Paul Giamatti pour sa prestation inspirée dans Barney's Version de Richard Lewis, d'après le roman de Mordecai Richler, tourné en grande partie à Montréal. L'acteur a entre autres salué «l'incroyable et belle ville de Montréal, dont je rêve». 

La Hollywood Foreign Press Association, qui regroupe une centaine de journalistes étrangers, a de façon générale fait des choix logiques, sinon prévisibles. Natalie Portman, excellente en danseuse étoile troublée dans Black Swan de Darren Aronofsky, a été sacrée meilleure actrice. Enceinte, elle a remercié son amoureux, qui a chorégraphié le film, de poursuivre la lignée familiale. 

Le Gallois Christian Bale a remporté le Golden Globe du meilleur acteur dans un second rôle, pour sa performance sidérante d'ex-boxeur toxicomane dans The Fighter de David O. Russell. Le talent de Melissa Leo tout aussi logiquement été salué pour le même film, dans la même catégorie, version féminine.
 
Annette Benning, une autre grande favorite, a reçu le Golden Globe de la meilleure actrice dans une comédie ou une comédie musicale pour son rôle de mère lesbienne dans The Kids Are All Right, délicieuse chronique douce-amère de Lisa Cholodenko.  «Merci au gagnant du Golden Globe de 1962 de l'acteur le plus prometteur, mon mari Warren Beatty», a-t-elle déclaré. 

Sans surprise aussi, Toy Story 3, le meilleur de la trilogie, a remporté le Golden Globe du meilleur film d'animation, et le prix de la meilleure bande sonore a été remis à The Social Network (pour l'excellente trame composée par Trent Reznor et Atticus Ross).
 
La réalisatrice danoise Susanne Bier (After the Wedding) a quant à elle remporté le Golden Globe du meilleur film étranger pour In A Better World, devant entre autres Biutiful d'Alejandro Gonzalez Inarritu.
 
Le grand Robert DeNiro a de son côté reçu le prix-hommage Cecil B. DeMille pour l'ensemble de sa carrière. 

Ricky Gervais décapant  

En conférence de presse la semaine dernière, l'animateur Ricky Gervais avait promis d'être assez acerbe pour ne plus être réinvité à animer les Golden Globes. Une bière à la main sur scène comme l'an dernier, il a tenu promesse. Décapant comme jamais, distillant son humour acide tous azimuts, il n'a épargné personne (Cher, les actrices de Sex and the City, Charlie Sheen, Hugh Heffner, Mel Gibson), à commencer par la Hollywood Foreign Press Association (HFPA), qui l'a réembauchée.  

L'acteur, comédien et réalisateur britannique s'est entre autres moqué de The Tourist, un échec à la fois critique et commercial, que tous le observateurs ont été surpris de retrouver parmi les cinq finalistes au prix de la meilleure comédie ou comédie musicale de l'année. «Je n'ai même pas vu The Tourist. Ce doit être bon, c'est en nomination », a-t-il dit avec son sourire ironique, avant de déclarer à la blague que les électeurs de la HFPA avaient été soudoyés. 

Certains chroniqueurs américains ont insinué que puisque les membres de la HFPA étaient des habitués de voyages de presse payés par les studios, le «junket» de The Tourist, à Paris, n'avait pas dû nuire à sa candidature. La présence au générique d'Angelina Jolie et de Johnny Depp, ne serait pas étrangère non plus à la sélection de ce film considéré comme un navet. 

Rickey Gervais, délicieusement irrévérencieux, à contre-courant du politiquement correct, s'est moqué de tous les présentateurs de prix. Il s'est même permis une blague sur les rumeurs d'homosexualité des Scientologues Tom Cruise et John Travolta. «Mes avocats m'ont conseillé pour le phrasé de cette blague. Ils ne sont pas ici…» «Je les avais avertis», a-t-il ajouté, à l'attention de la HFPA, dont le président a rétorqué à son tour avec une vanne, plus tard dans la soirée. De la télévision hilarante. 

La Hollywood Foreign Press Association, qui regroupe moins d'une centaine de journalistes étrangers en poste à Hollywood, est souvent critiquée pour son manque de représentativité (moins de 81 électeurs contre 6000 pour les Oscars) et son manque d'indépendance. Mais encore une fois cette année, elle a fait la preuve qu'elle organise le plus décoiffant, sympathique et décontracté des galas télévisés. On dira que ce n'est pas difficile…