C'est vrai. On accorde peut-être trop d'importance à la soirée des Golden Globes. Après tout, ses finalistes sont désignés par moins d'une centaine de «journalistes étrangers» en poste à Hollywood, dont certains ne couvrent même pas le cinéma.

Les choix de l'énigmatique et controversée Hollywood Foreign Press Association, dont certains membres ont été accusés ces dernières années d'accepter des pots-de-vin, ne sont pas des indicateurs fiables de ce que réserve la plus prestigieuse soirée des Oscars.

N'empêche. Le 69e soirée des Golden Globes marque demain le début de la saison des remises de prix et il n'y en a pas de plus échevelée, grinçante, amusante et sympathique. Grâce au champagne qui détend les stars du petit et du grand écran (en nombre record), à l'ambiance bon enfant qui règne dans la salle de bal du Beverly Hilton, le gala des Golden Globes produit d'ordinaire une émission de télévision plus divertissante que celle des Academy Awards.

>>> Consultez notre dossier sur les Golden Globes.

Cet événement strass et paillettes désormais incontournable est pimenté depuis trois ans par les commentaires acerbes du maître de cérémonie Ricky Gervais, qui ne s'empêche jamais d'égratigner et de déboulonner les monuments de «Tinseltown». En prévision de la soirée, voici un survol des principales catégories et de mes prédictions, forcément hasardeuses.

Meilleur film (drame)

Finalistes: The Descendants, The Help, Hugo, The Ides of March, Moneyball, War Horse.

Prédiction: The Descendants d'Alexander Payne, mettant en scène George Clooney en père de famille déboussolé après l'accident qui a laissé sa femme dans le coma. Entre le drame et la comédie noire, à la fois tragique et absurde, c'est un film débordant d'esprit, de finesse et d'audace qui mériterait d'être récompensé.

Meilleur film (comédie ou film musical)

Finalistes: 50/50, The Artist, Bridesmaids, Midnight in Paris, My Week With Marilyn.

Prédiction: The Artist a un «je ne sais quoi» (prononcer à l'anglaise) de magique dans son hommage à l'âge d'or du cinéma muet, qui a tout pour plaire aux journalistes établis à Hollywood. Ce pastiche très inspiré, signé Michel Hazanavicius, distribué aux États-Unis par l'influent Harvey Weinstein, est finaliste dans six catégories demain (une de plus que The Descendants et The Help). Pas mal pour un film français, muet, en noir et blanc.

Meilleur réalisateur

Finalistes: Woody Allen (Midnight in Paris), George Clooney (The Ides of March), Michel Hazanavicius (The Artist), Alexander Payne (The Descendants), Martin Scorsese (Hugo).

Prédiction: Dans ce qui s'annonce comme la catégorie la plus disputée, on lance les dés et on tombe sur Martin Scorsese, chouchou de la critique qui a réalisé lui aussi un très bel hommage au cinéma muet (celui de Georges Méliès). Mais les dés auraient aussi bien pu tomber sur un autre...

Meilleur acteur (drame)

Finalistes: George Clooney (The Descendants), Leonardo DiCaprio (J. Edgar), Michael Fassbender (Shame), Ryan Gosling (The Ides of March), Brad Pitt (Moneyball).

Prédiction: Michael Fassbender est excellent en accro au sexe dans le bouleversant drame de Steve McQueen, Shame, qu'il porte pratiquement sur ses épaules. Mais George Clooney a trouvé le rôle de sa carrière dans le film doux-amer d'Alexander Payne. Avantage à George, qui, selon moi, devrait être sacré roi de la soirée.

Meilleure actrice (drame)

Finalistes: Glenn Close (Albert Nobbs), Viola Davis (The Help), Rooney Mara (The Girl with the Dragon Tattoo), Meryl Streep (The Iron Lady), Tilda Swinton (We Need to Talk About Kevin).

Prédiction: Meryl Streep est absolument fascinante de subtilité dans le rôle émouvant et réaliste de Margaret Thatcher. Elle sera aussi sans doute la favorite aux Oscars, même si Tilda Swinton offre un numéro d'actrice percutant (du type souvent célébré dans ce genre d'événement) dans We Need to Talk About Kevin de Lynne Ramsay, un film que j'ai trouvé irritant et maniéré.

Meilleur acteur (comédie ou film musical)

Finalistes: Ryan Gosling (Crazy, Stupid, Love), Jean Dujardin (The Artist), Brendan Gleeson (The Guard), Joseph Gordon-Levitt (50/50) et Owen Wilson (Midnight in Paris).

Prédiction: Entre la nouvelle coqueluche de Hollywood, Ryan Gosling, et le nouveau visage du moment, Jean Dujardin, je crois que la Hollywood Foreign Press Association préférera le Français au Canadien. Fort de son prix d'interprétation au Festival de Cannes, Dujardin montre toute l'étendue de son talent comique et dramatique dans The Artist, un film qui a le vent dans les voiles à quelques semaines des Oscars.

Meilleure actrice (comédie ou film musical)

Finalistes: Jodie Foster (Carnage), Kate Winslet (Carnage), Charlize Theron (Young Adult), Kristen Wiig (Bridesmaids), Michelle Williams (My Week With Marilyn).

Prédiction: Une division du vote (notamment entre les actrices du film de Roman Polanski) pourrait - pourquoi pas? - profiter à Kristen Wiig, hilarante dans Bridesmaids, comédie régressive efficace et caustique qui est, selon moi, le film hollywoodien le plus drôle de l'année, malgré sa finale à l'eau de rose. Prédictions hasardeuses, qu'on vous disait.

Meilleur film étranger

Finalistes: The Flowers of War de Zhang Yimou (Chine), In the Land of Blood and Honey d'Angelina Jolie (États-Unis), Le gamin au vélo de Luc et Jean-Pierre Dardenne (Belgique), La peau que j'habite de Pedro Almodóvar (Espagne), Une séparation d'Asghar Farhadi (Iran).

Prédiction: Je parierais ma chemise, mes chaussettes et mon pantalon sur le sacre aux Oscars d'Une séparation, magnifique film d'Asghar Farhadi, qui prendra l'affiche au Québec le 24 février et qui a été plébiscité par l'ensemble de la presse internationale, notamment aux États-Unis (100% de critiques favorables selon Rotten Tomatoes). Mais aux Golden Globes, comme on dit à Hollywood, who knows?