Il s'agit sans doute du film québécois le plus attendu de la saison estivale. Omertà de Luc Dionne, inspiré par la série télé culte des années 90, avait droit hier soir à sa première mondiale, au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, en présence du gratin artistico-politico-médiatique montréalais.

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Le film ne prendra l'affiche que le 11 juillet, mais son équipe de production et de distribution profitait d'une rare présence de l'un de ses acteurs, l'imprésario René Angélil, pour souligner à l'avance la sortie de ce thriller policier efficace, mais convenu, qui a peu à voir avec la série télé diffusée jadis par Radio-Canada.

Michel Côté reprend bien sûr le collier dans le rôle principal de Pierre Gauthier, qui a quitté la Sûreté du Québec pour fonder sa propre agence de détectives privés, Pulsar International. Il est sollicité par son ancien patron, devenu sous-ministre de la Justice (Michel Dumont), afin de participer à une enquête sur la mafia montréalaise, dont le parrain n'est interprété par nul autre que René Angélil.

Un meurtrier psychopathe (Stéphane Rousseau), sorti prématurément de prison pour des motifs nébuleux, propose au chef de la pègre une vaste opération de recel de faux lingots d'or fabriqués à base de tungsten. Un énigmatique spécialiste du blanchiment d'argent (Patrick Huard) sert d'intermédiaire à tout ce beau monde.

C'est d'ailleurs Huard, plus que quiconque, qui tient Omertà le film sur ses épaules. L'acteur est en grande forme, même si certaines des répliques que lui sert Luc Dionne relèvent un peu trop de la fanfaronnade d'humoriste. Oui, il s'agit d'un autre thriller policier ponctué de blagues, mettant en vedette Michel Côté: on pense inévitablement à une «formule d'été gagnante» du cinéma québécois.

Omertà le film n'est pas pour autant De père en flic, même s'il joue aussi sur les classiques antagonismes entre un policier plus vieux et un policier plus jeune, ainsi que sur la bonne vieille dynamique du «bon cop, bad cop».

Entre les bons et les mauvais, on s'y perd un peu d'ailleurs, tellement le scénario de Luc Dionne fait des efforts pour brouiller les cartes. Après une finale qui m'a semblé tarabiscotée, on se demande d'ailleurs si toutes ces fausses pistes étaient bien nécessaires.

Il n'y a d'ailleurs pas que les pistes qui sont fausses. Certains des dialogues sonnent tout aussi faux, alors que Dionne semble arranger un mariage parfois forcé, et pas toujours heureux, entre le drame et la comédie.

Le registre reste généralement plus dramatique que comique, cela dit, et Dionne, le scénariste de la série originale (réalisée par Pierre Houle), parvient à maintenir un suspense constant, même si sa réalisation reste conventionnelle. Ce film, pour tout dire, aurait pu être réalisé pour la télévision.

Omertà le film a pourtant peu à voir avec la série télé qui l'a inspiré. La presque totalité des personnages était absent du petit écran. Parmi les nouveaux personnages, il y a entre autres celui interprété par Rachelle Lefevre, une employée de Pierre Gauthier qui décide d'infiltrer les milieux criminels, et qui se livre (pour convaincre le personnage de Stéphane Rousseau) à une danse lascive bluesée pour mononcles.

Il y a aussi, bien sûr, le personnage du chef de la mafia. Sa célèbre chanteuse d'épouse aurait déclaré récemment que René Angélil crève l'écran dans Omertà. Je dirais plutôt que cela crève les yeux qu'il n'est pas comédien. Si sa présence physique comme parrain de la mafia reste crédible, un «caméo» muet aurait été suffisant. Il y a assez d'acteurs professionnels au Québec pour qu'on ne confie pas des rôles d'envergure à des imprésarios. Aussi célèbres soient-ils.