La victoire inattendue des conservateurs de David Cameron est un bouquet parsemé d'épines. Deux référendums attendent le premier ministre britannique, l'un en Écosse (possiblement) et l'autre à propos de l'Europe.

Il n'est pas sûr que le Parlement écossais veuille reprendre bientôt l'exercice qui s'est soldé, l'an dernier, par la défaite serrée des séparatistes, mais l'hypothèse flotte dans l'air, après la victoire déterminante du Scottish National Party, une victoire qui a fortement contribué à la déroute des travaillistes.

La députation du SNP au parlement de Londres - une sorte de Bloc écossais - ne pèsera pas lourd, avec 56 députés sur 650. Surtout, elle n'aura aucun pouvoir de blocage, comme le souhaitaient ses partisans, qui rêvaient d'un gouvernement minoritaire où le « Bloc écossais » détiendrait la balance du pouvoir. (C'est d'ailleurs pour éviter cette éventualité que les électeurs anglais, dans un vote stratégique, se sont jetés dans les bras des Tories.)

Il reste que l'Écosse appartient désormais entièrement aux indépendantistes, qui attendent l'heure de la revanche.

Cela renforcera la pression sur David Cameron qui, dans la panique de fin de campagne référendaire, s'était engagé à consentir certains pouvoirs à l'Écosse et au pays de Galles.

Mais cette dévolution, quand elle s'amorcera, fera en contrepartie monter la grogne chez les Anglais du sud du pays. Pour les apaiser, Cameron a promis une loi interdisant aux députés écossais de voter sur des projets ne concernant que l'Angleterre... Cela, en retour, fera monter le baromètre de l'insatisfaction en Écosse. Quoi qu'il fasse dans ce dossier, le pauvre Cameron ne peut gagner.

Le second référendum auquel il fera face est beaucoup moins aléatoire que celui de l'Écosse, pour la simple raison que c'est Cameron lui-même qui s'est engagé à le tenir. D'ici la fin de 2017, en effet, la Grande-Bretagne devra décider si elle veut, oui ou non, sortir de l'Union européenne dont elle est un membre à part entière, à la différence près qu'elle n'a pas adopté l'euro.

En promettant un référendum sur l'Europe, Cameron tentait cette fois d'apaiser un autre groupe de mécontents : les « eurosceptiques », excédés par la réglementation issue de Bruxelles et par l'afflux de travailleurs du continent (lesquels viennent surtout de l'est de l'Europe).

Ils étaient réunis sous la bannière de l'UKIP (UK Independence Party), un parti de droite isolationniste et assez xénophobe. Aux dernières élections, l'UKIP n'a fait élire qu'un seul député et son chef, Nigel Farage, a été battu dans sa circonscription. Mais les résultats, faussés par le système du « first past the post » (qui est aussi le nôtre), ne rendent pas compte de la force réelle du parti (12,6 % du vote populaire)... sans compter qu'une bonne partie des conservateurs partagent les mêmes opinions.

Personnellement, David Cameron est en faveur du maintien de son pays dans l'Europe, mais il fera face à au moins 60 dissidents, ceux par exemple qui réclament ces jours-ci un droit de veto du parlement londonien sur toute loi européenne - une exigence impossible à accepter pour Bruxelles. M. Cameron s'est engagé (une autre promesse...) à obtenir des compromis de la part de Bruxelles, notamment sur l'immigration européenne et la fraude aux aides sociales, mais les autorités de l'Union européenne ont déjà fait savoir qu'il n'est pas question de mettre fin à la règle fondamentale de la mobilité des travailleurs.

Et le casse-tête n'est pas fini... À supposer que la Grande-Bretagne se prononce en faveur du retrait de l'Europe, cela apportera de l'eau au moulin des séparatistes écossais, qui tiennent à rester membres de l'UE.

Bref, il y a peut-être des jours où David Cameron se demande s'il a vraiment gagné ses élections !