Que se passe-t-il au CHUM? Sous la direction de Christian Paire, ancien directeur du CHU de Rouen, en France, l'hôpital a pris de troublantes orientations.

En même temps que se multiplient les postes de la haute direction, la gestion quotidienne du CHUM se relâche.

Des blocs opératoires sont utilisés pour des opérations de chirurgie esthétique non remboursables par la RAMQ sans que l'hôpital soit remboursé. Des dentistes utilisent l'équipement et le personnel du CHUM pour des interventions non remboursées... et se font parfois payer en espèces; selon Radio-Canada, cela dure depuis 20 ans.

Dans La Presse, de nouvelles révélations de Pascale Breton soulèvent des doutes plus pointus sur la gestion de M. Paire.

L'hôpital a versé près de 300 000$ sur une période de 18 mois à un «consultant» français dont les qualifications professionnelles restent mystérieuses. La direction du CHUM n'a pas de CV à son sujet (on n'en trouve pas non plus sur Google). On doit se contenter de l'assurance que, selon sa porte-parole, «M. Paire le connaît».

Le contrat de Philippe Massat stipule qu'il reçoit des honoraires de 2500$ par jour pour prodiguer des conseils sur «la qualité performance» (sic). Au terme de son contrat, ledit «conseiller stratégique» aura reçu 228 000$ en honoraires et une allocation de dépenses de 54 000$ pour défrayer ses déplacements à partir de la France et son hébergement à Montréal... où  M. Massat n'est présent que cinq jours par mois.

Pauline Maisani, la directrice de la planification stratégique et du développement, en poste depuis 2010, a elle aussi fait toute sa carrière en France comme directrice d'hôpitaux. Question: peut-on réorienter le développement d'un hôpital québécois sans connaissance préalable du contexte québécois et canadien?

Le régime de tourisme professionnel dont bénéficie M. Massat a également marqué l'embauche de M. Paire, dont la famille vit toujours en France même si son mandat comme DG est de quatre ans.

En janvier, La Presse avait appris que les nombreuses absences de M. Paire faisaient sourciller le personnel... ce à quoi la porte-parole du CHUM avait répondu platement qu'«il a bien le droit d'aller voir ses enfants». Nul ne lui conteste ce droit. Mais pourquoi le conseil d'administration n'a-t-il pas exigé, lors de l'embauche de M. Paire en 2009, qu'il établisse son domicile familial à Montréal durant la durée de son mandat?

Au même moment, le Conseil des médecins et dentistes critiquait la «multiplication incompréhensible» des postes de direction et des recours aux «experts-conseils», au moment où l'on sabrait allègrement des postes d'infirmières. M. Paire avait créé des postes (dont celui de «délégué aux arts» !) sans consultation ni affichage, ce qui, affirmait le CMDP, soulevait la possibilité de «favoritisme».

Curieuse priorité à l'époque où le CHUM doit réduire des services essentiels, M. Paire se concentre démesurément sur les arts. Il a réclamé l'ouverture d'une Maison de la culture au CHUM. Son «délégué aux arts» a pour mission d'organiser des spectacles et des expositions.

Ô coïncidence, le premier artiste invité au CHUM a été le danseur-chorégraphe Sylvain Groud, «artiste en résidence» au CHU... de Rouen. On peut voir cette performance sur le site web de la direction générale du CHUM (section arts et culture), sur un fond musical très Nouvel Âge.

L'art a certes des vertus thérapeutiques dans des maisons de convalescence et des centres d'hébergement prolongé, mais dans un hôpital de soins aigus, le patient ne préférerait-il pas bénéficier des services de plus de préposés plutôt que de voir un danseur tourbillonner dans sa chambre?