La commission Charbonneau réclame 18 mois de plus... Mais pour faire quoi exactement? Après bientôt huit mois de travail, la Commission en est encore à remâcher les scandales de la Ville de Montréal et du parti Union Montréal!

Combien d'histoires analogues faudra-t-il encore endurer? Après Montréal, sera-ce Mascouche, Laval, le Bas du fleuve, la Mauricie et tutti quanti?

Ça va, messieurs dames, on a compris, on en sait maintenant assez sur la mafia, la corruption des ingénieurs et du personnel-cadre des municipalités. On a visé la plus grande ville, cela devrait suffire. Inutile d'en rajouter. Et s'il y a eu des fraudes ici et là, que la police s'en occupe.

Où sont les grandes révélations sur les politiciens provinciaux? On n'a attrapé (jusqu'à présent, sans aucune preuve) que des seconds couteaux. Le PQ et le PLQ ont tous deux été légèrement éclaboussés, pour une affaire de dons plutôt insignifiante.

Remarquez, l'absence de politiciens au tableau de chasse de la Commission ne m'étonne guère. Je n'ai jamais cru que notre classe politique était aussi corrompue que le veut la légende urbaine qui court depuis quelques années. Je pense au contraire qu'à l'échelle de la corruption mondiale, le Québec, tout comme le Canada, bat tous les records d'intégrité, n'étant dépassé que par les pays scandinaves.

Mais enfin, après tout ce tapage, on se serait attendu à des révélations un peu plus sérieuses que cette liste de présumés coupables que nos grands justiciers ont dévoilée à la veille de la relâche de Noël. Au fait, qu'advient-il de ces personnages épinglés pour avoir un jour dîné au club 357c, tous frappés par un verdict de culpabilité par association? Qu'attend la Commission pour les convoquer... ou alors pour s'excuser d'avoir sali leurs réputations?

Résultat de ces audiences-spectacles: la population est de plus en plus convaincue que la politique est un jeu pourri, que tous les ingénieurs sont des fraudeurs et que le Québec est un haut lieu de la corruption mondiale.

On comprend la saute d'humeur de Jacques Parizeau, un homme d'honneur pour qui cette délectation dans le grattage de plaie a quelque chose de masochiste.

Comme le gouvernement a réagi avec un zèle excessif, instrumentalisant la Commission pour passer des législations populaires susceptibles de faire oublier son mauvais début de mandat, on va bientôt voir s'écrouler le système d'octroi des contrats publics.

D'un extrême à l'autre, du laxisme au puritanisme radical... Désormais, les règles régissant l'éthique des entreprises faisant affaire avec l'administration publique seront si contraignantes que des travaux majeurs seront retardés.

Ce sera, notamment, le cas de l'échangeur Turcot, pour la reconstruction duquel les contrats devaient être signés cette année... mais ils ne le seront qu'en 2014, à cause des multiples vérifications imposées par la nouvelle législation.

Cette conséquence d'une loi excessive votée dans la précipitation aura de pires conséquences que la distribution de quelques pots-de-vin. Le remplacement de Turcot, ce chancre de béton mal construit, est une question d'urgence, et tout retard risque de mettre lae population en danger. Faut-il qu'une immense catastrophe se produise pour qu'on s'en rende compte?

D'autres lois, elles aussi votées dans la précipitation, auront des effets débilitants sur notre vie politique. Le gouvernement, avec l'accord peureux de l'opposition, a «nationalisé» les partis politiques provinciaux (le contribuable a le dos large!), en réduisant à 100$ la contribution des particuliers.

Curieusement, il entend par ailleurs plafonner à 300$ les dons aux partis municipaux... Où est la logique, quand il en coûte plus cher de faire campagne à l'échelle du Québec qu'à celle d'une municipalité?

Hélas, il ne faut plus chercher la logique, dans cette atmosphère de suspicion généralisée.