François Hollande, le candidat socialiste aux élections présidentielles françaises, est tout ce que Nicolas Sarkozy n'est pas: un homme placide, timoré et conciliant qui, loin de se lancer impulsivement dans des initiatives improvisées, a plutôt tendance à tergiverser devant les décisions difficiles.

C'est d'ailleurs ce qu'on lui reprochait au sein même de son parti, lors des primaires pour le choix du candidat à la présidentielle: pour Martine Aubry, l'actuelle patronne du PS, il incarnait «la gauche molle» (le sous-entendu était clair: manque de c...!).

Laurent Fabius, l'ancien premier ministre socialiste, l'a déjà traité de «fraise des bois». Durant la bataille des primaires, Ségolène Royal, son ex-compagne et la mère de ses quatre enfants, a été encore plus dure: «Peut-on citer une seule chose que François Hollande aurait faite en trente ans de vie politique?».

Effectivement, le bilan est mince. Quoique diplômé des meilleures grandes écoles, il n'a jamais été ministre, et jamais dirigé une grande organisation, exception faite du PS, qu'il a géré pendant dix ans à titre de secrétaire général avec des résultats mitigés, sans compter qu'une fonction de bureaucrate partisan n'est pas la voie royale pour la présidence d'un pays aussi difficile à gouverner que la France.

Autre titre assez peu glorieux, il est député et président du conseil général de la Corrèze, le plus petit département de France... qui est aussi le plus endetté!

L'homme a peu voyagé et n'a jamais cultivé de réseaux à l'étranger, comme en témoignent d'ailleurs ses récentes sorties assez piteuses hors de l'Hexagone, alors qu'il s'est buté, tant à Washington qu'à Berlin ou à Londres, aux portes closes des principaux dirigeants étrangers.

Au chapitre de l'expérience, du leadership et de la stature internationale, il n'y a pas de comparaison entre le candidat socialiste et M. Sarkozy, qui avait dirigé deux ministères importants (l'Intérieur et les Finances) quand il est arrivé à l'Élysée, tout en démontrant une habileté politique hors du commun, un talent oratoire exceptionnel et un véritable sens du leadership.

Mais la majorité des Français ont le coeur à gauche, et le temps est venu de l'alternance, d'autant plus que, comme je le rappelais dans ma chronique de jeudi, il y a en France, pour toutes sortes de raisons et surtout pour des questions de style et de comportement, une immense vague de ressentiment envers le président sortant.

C'est simple, on ne veut plus le voir, on ne peut plus le sentir.

On aurait préféré DSK, ou plus précisément le DSK qu'on imaginait avant que sa vraie nature ne fût révélée, alors on «fait avec» Hollande... qui est du reste un type intelligent et sympathique, plus proche du Français moyen que le bouillant métropolitain cosmopolite, descendant d'un grand-père juif de Salonique et d'un père hongrois, qu'est Sarkozy.

François Hollande est rassurant, il s'inscrit dans une longue lignée de présidents français enracinés dans le terroir franco-français depuis des générations. Et tout socialiste qu'il soit, c'est un homme modéré, qui n'a rien pour effrayer l'électorat de centre droit.

Pour l'instant, il navigue entre le besoin de ménager son aile gauche et la nécessité de parler à l'ensemble des Français. Sa campagne n'a pas eu d'éclat jusqu'à présent et n'en aura sans doute pas, car ce n'est pas le genre de l'homme. Son propre fils a confié à un reporter que la campagne de sa mère, en 2007, avait suscité plus d'enthousiasme... La belle et fantasque Ségolène dégageait plus de charisme, c'est vrai. Mais qu'importe. François Hollande se laisse porter par la vague anti-Sarkozy, et elle pourrait bien le conduire jusqu'à l'Élysée.