Il y a des accommodements raisonnables et il y a des accommodements déraisonnables. Deux cas récents viennent clore cette année 2011 sur une note de déraison caractérisée.

L'on apprend coup sur coup que le ministère de la Sécurité publique, se pliant à un avis de la Commission des droits de la personne, tolèrera dorénavant le port du hijab par les gardiennes de prison... et - un pas de plus dans l'absurde - qu'une école maternelle a permis aux parents d'une petite musulmane de lui faire porter des écouteurs anti-bruit pour qu'elle n'ait pas à entendre les chants de ses camarades, la musique étant, on le sait, une activité sacrilège pour les talibans et compagnie.

Il y a des limites à l' «ouverture», et on les a franchies.

Si le gouvernement Charest a un semblant d'épine dorsale, il doit faire deux choses, et vite:

Primo, ordonner au ministère d'établir une règle logique et équitable pour ses agents de sécurité en leur interdisant le port de tout signe religieux.

Secundo, charger le ministère de l'Éducation de mettre fin au comportement pervers des maternelles qui se croient obligées d'obéir aux revendications les plus aberrantes de leur clientèle.

Au Québec, on considère que la musique est une activité légitime, en plus d'être un excellent outil pédagogique pour les tout-petits. C'est comme cela que ça se passe, point à la ligne.

La décision la plus pernicieuse, parce qu'elle risque de constituer un précédent, est celle qui autorise le port du foulard islamique par les gardiennes de prison.

Je ne suis pas une intégriste, et je tolère (sans m'en réjouir) le hijab chez des fonctionnaires occupant des fonctions qui n'incarnent pas l'autorité de l'État, à plus forte raison si elles n'ont pas affaire directement au public. Mais les gardiens de prison, tout comme les juges, les procureurs de la Couronne, les policiers et les douaniers, ont des positions régaliennes, c'est-à-dire qu'ils représentent le pouvoir coercitif de l'État sur les citoyens.

C'est pourquoi la Commission Bouchard-Taylor recommandait pour ces catégories la neutralité la plus stricte (les commissaires avaient toutefois oublié d'y inclure les douaniers).

Faut-il encore répéter pourquoi la neutralité s'impose dans ces domaines? Allons-y avec quelques exemples simples, puisque le gouvernement semble incapable de comprendre.

Vous êtes un justiciable musulman. Aimeriez-vous que le procureur de la Couronne chargé de monter l'accusation porte une kippa? Que le juge qui décidera de votre sort arbore une grosse croix de David?

Vous êtes une prisonnière juive ou une prisonnière qui ne cache pas, dans ses conversations avec les autres détenues, son horreur de l'intégrisme musulman. Ça vous dirait quoi de savoir que la gardienne dont vous dépendez est une islamiste si militante qu'elle tient à porter son foulard au travail?

Vous êtes un hindou. Vous passez aux douanes ou vous êtes arrêté par la GRC. L'agent est un sikh à turban (une aberration hélas permise au Canada), qui porte lui-même un kirpan mais vous tiendra rigueur de voyager avec un canif. Normal?

Ajoutant la niaiserie à l'à-plat-ventrisme, le ministère québécois a «négocié» avec la Commission des droits pour finalement obtenir que le foulard soit fixé par du velcro, vraisemblablement pour éviter que les gardiennes à hijab soient étranglées dans une rixe avec des détenues.

Il est temps de mettre fin aux compromissions absurdes que les zélotes des «droits humains» imposent au Québec.

En attendant ce jour, je vous souhaite, chers lecteurs, un très joyeux Noël, et j'insiste: Joyeux Noël, puisqu'ici, c'est Noël que l'on fête le 25 décembre, pas le solstice d'hiver ni une «fête» anonyme.