Les jours passent et se ressemblent, au moins pour Stephen Harper: face à ses trois opposants, il a observé hier, comme la veille lors du débat en anglais, un calme olympien, repoussant les attaques avec une infaillible courtoisie et des explications claires et succinctes. C'était également le seul, avec Michael Ignatieff, qui n'interrompait jamais ses interlocuteurs.

Les jours passent et se ressemblent, au moins pour Stephen Harper: face à ses trois opposants, il a observé hier, comme la veille lors du débat en anglais, un calme olympien, repoussant les attaques avec une infaillible courtoisie et des explications claires et succinctes. C'était également le seul, avec Michael Ignatieff, qui n'interrompait jamais ses interlocuteurs.

M. Harper avait plus à perdre au débat anglais, dans la mesure où il était le « front runner » dans le reste du Canada. Au Québec, il aura probablement réussi à maintenir sa position relativement modeste (une dizaine de comtés sur 75), peut-être même à l'améliorer.

Les chefs conservateur et libéral avaient réservé le gros de leurs munitions au débat anglais. Au débat français, c'est plutôt entre Jack Layton et Gilles Duceppe qu'il y a eu des étincelles. Les derniers sondages ont montré que le NPD, et plus particulièrement son chef, gagne en popularité au Québec. D'où l'agressivité tout à fait nouvelle de M. Duceppe à l'endroit de son ami néo-démocrate. «Vous ne serez jamais premier ministre, pas plus que moi!», a-t-il martelé, comme pour dissuader les électeurs bloquistes de pencher vers un parti pancanadien, histoire de sortir de l'isolement où les confine le Bloc.

Pour l'instant, il s'agit plutôt d'une bataille d'ego, car en fait, M. Duceppe n'a pas à s'inquiéter. Le NPD, malgré la popularité de son chef, n'a pas l'organisation, ni l'enracinement, pour menacer le Bloc. Le 2 mai, sa part du vote augmentera mais il n'aura toujours, vraisemblablement, qu'un seul député (Thomas Mulcair dans Outremont).

M. Duceppe se retrouvait hier, une fois de plus, dans le rôle du «front runner» au Québec. D'où, peut-être, son assurance et sa sérénité, alors que la veille, au débat anglais, il était perpétuellement enragé, les joues en feu, les mains crispées sur le lutrin, et tellement «dissocié» du reste du Canada anglais qu'on se demandait ce qu'il faisait là.

Michael Ignatieff, qui avait performé avec un certain éclat au débat en anglais, est resté un peu dans les marges lors du débat français, sauf lors des segments sur la question nationale et le rôle international du Canada, questions qui entrent dans ses cordes et sur lesquelles il a travaillé dans sa carrière antérieure d'«intellectuel public». Il émanait de ses interventions une certaine passion qui contrastait énormément avec la placidité de M. Harper.

Il s'est en outre efforcé de parler de son programme, davantage en tout cas que lors du débat en anglais, mais sa personnalité sera probablement restée indéfinie pour nombre de téléspectateurs. Il a beaucoup insisté sur le respect dû au parlement, mais les histoires de la colline parlementaire n'émeuvent guère Monsieur-tout-le-monde.

Curieusement, M. Layton semblait plus détendu en français que la veille en anglais. Peut-être simplement parce que pour lui, l'enjeu était moindre. Il n'avait rien à perdre et, fort de sa popularité personnelle, encore plus à gagner.

Cette année, nouveauté par rapport aux dernières élections: M. Harper semble assez sûr de lui pour réclamer clairement un gouvernement majoritaire. Il l'a fait en français comme en anglais.

On se demande toutefois combien de gens ont décroché durant la première demi-heure, alors que le débat s'enlisait dans une querelle opaque concernant des discussions datant de 2004 sur une ébauche de «coalition» (ou d'entente) entre Harper, le NPD et le Bloc, pour ensuite s'enliser encore plus dans la comptabilité logistique de l'assurance emploi. Ce n'est que dans les dernières 45 minutes que la discussion a pris un certain envol. Mais ça n'a jamais volé très haut...