Avec l'élection de Marine Le Pen à la tête du Front national, tous les clignotants se sont allumés dans le monde politique français.

Avec l'élection de Marine Le Pen à la tête du Front national, tous les clignotants se sont allumés dans le monde politique français.

Tant l'UMP de Sarkozy que le Parti socialiste pressentent depuis longtemps le danger que représentera la candidature à la présidentielle de 2012 de cette jolie quadragénaire blonde, mère de famille divorcée qui projette une image plus moderne et sympathique que celle de son père.

Depuis qu'elle incarne le nouveau visage du FN, elle a réussi à atténuer l'odeur de soufre qui facilitait sa diabolisation, en évitant les dérapages racistes et en se réclamant des valeurs républicaines... dont la laïcité, qui sert de paravent à ses envolées contre l'immigration musulmane.

Les médias ne peuvent plus bouder le FN, naguère réputé intouchable. Marine Le Pen est devenue incontournable et sera jusqu'à la présidentielle sur tous les plateaux de télévision, où elle est d'une redoutable efficacité.

Un sondage réalisé pour Le Monde démontre qu'elle attire de plus en plus les partisans de la droite classique. Plus d'un tiers des sympathisants de l'UMP est d'accord avec ses idées - une augmentation de 12% en un an!

Selon un sondage du quotidien Libération, 52% des Français trouvent la fille Le Pen plus crédible que le père... et un Français sur cinq a d'elle une image «positive». Plus troublant encore, elle séduit particulièrement l'électorat ouvrier, qui la voit positivement dans une proportion de 30,7%, ce qui est la perception de 23,8% des électeurs de l'UMP.

Pour le parti de Nicolas Sarkozy, le danger est d'autant plus clair que la cote du président vacille. Si Mme Le Pen joue bien ses cartes et continue sur sa lancée, elle pourrait devenir un facteur de nuisance considérable, voire - scénario peu probable mais pas totalement invraisemblable - triompher au premier tour en puisant dans la droite classique. Cela, c'est dans l'hypothèse où Dominique Strauss-Kahn serait le candidat de la gauche, et rallierait à lui, grâce à sa réputation de leader pragmatique et modéré, des électeurs UMP désenchantés.

Selon un sondage publié par l'hebdomadaire Marianne, ce dernier remporterait le premier tour avec 30% des voix, devant Sarkozy (25%) et Marine Le Pen (18%).

Mais cette dernière inquiète également la gauche.

Le Front national, depuis des années, prospère sur les terres en friche du Parti communiste. (On le sait, ce n'est pas d'hier que l'extrême droite et l'extrême gauche se rejoignent.)

Mme Le Pen, une populiste qui passe très bien à la télé et ne parle pas la langue de bois, ratisse large dans la population franco-française des banlieues modestes ou défavorisées; elle attire les petits commerçants, la clientèle par excellence des anciens poujadistes recyclés au FN, mais aussi les ouvriers que le PS a dans son collimateur.

Scénario cauchemardesque pour les partisans socialistes: le premier tour se solde par la victoire de Nicolas Sarkozy et de Marine Le Pen... comme en 2002, alors que le socialiste Lionel Jospin s'était trouvé évincé par Chirac et Jean-Marie Le Pen, à cause de la division du vote à gauche, où pullulent les partis marginaux. Honteux et furieux, les socialistes avaient dû voter pour Chirac au second tour...

Ce scénario est loin d'être invraisemblable si le porte-drapeau du PS est son actuelle secrétaire générale, l'austère Martine Aubry.

Mais si Strauss-Kahn était le candidat du PS, un autre scénario catastrophique se profilerait, car la «gauche de la gauche» pourrait fort bien refuser de se rallier à l'ancien directeur du Fonds monétaire international, jugé trop à droite... Une fois de plus, l'atomisation du vote de gauche aboutirait au résultat de 2002.