Et Brian Mulroney est certes la personne la mieux placée pour parler des imprévus qui peuvent survenir dans le cadre d'une négociation cruciale, comme celle qu'il a mise en branle en 1986 en vue de la réalisation d'un accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis qui a été finalement conclu en octobre 1987.

Et Brian Mulroney est certes la personne la mieux placée pour parler des imprévus qui peuvent survenir dans le cadre d'une négociation cruciale, comme celle qu'il a mise en branle en 1986 en vue de la réalisation d'un accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis qui a été finalement conclu en octobre 1987.

Pour le Canada, il n'était pas question à l'époque de signer un accord de libre-échange qui ne serait pas assorti d'un mécanisme de règlement des différents commerciaux. Sans mécanisme, pas d'accord.

Or, le soir même de la date butoir des négociations, James Baker, l'ex-secrétaire au Trésor américain, contacte le premier ministre Mulroney pour l'aviser que les États-Unis n'avaient jamais signé une pareille clause de leur histoire et qu'ils ne le feraient donc pas.

« Je lui ai dit que j'allais appeler le président Reagan, à Camp David, pour lui demander comment les États-Unis pouvaient signer des accords de désarmement avec leur pire ennemi et ne pas être capables de signer un accord commercial avec leur meilleur ami. James Baker m'a rappelé pour me dire qu'on avait un accord », a rappelé hier Brian Mulroney lors d'un panel sur l'Accord économique et commercial global (AECG), organisé par la chambre de commerce de Montréal.

L'ex-premier ministre Mulroney était accompagné de l'ex-premier ministre du Québec Jean Charest et de Pierre Pettigrew, ex-ministre du Commerce extérieur et envoyé spécial de la ministre du Commerce international, Chrystia Freeland, à l'AECG.

M. Pettigrew a dû se rendre d'urgence en Europe vendredi dernier pour rencontrer le ministre-président de la Wallonie et tenter de le convaincre de ne pas s'opposer à la ratification de l'AECG.

On le sait, la semaine dernière, le gouvernement de la Wallonie - une région francophone de la Belgique qui compte 3,5 millions d'habitants - a décidé de s'opposer à la ratification de l'entente commerciale.

Le gouvernement de la Wallonie estime que l'Accord économique et commercial global (AECG) va rendre vulnérables ses secteurs industriels et agricoles et qu'il aura pour effet de rabaisser ses normes en matières environnementale et syndicale.

Or, en vertu de sa Constitution, le gouvernement de la Belgique doit obtenir l'assentiment de ses trois régions administratives pour pouvoir conclure un accord comme l'AECG.

Pierre Pettigrew a rencontré vendredi durant une heure et demie Paul Magnette, le ministre-président wallon, après que celui-ci s'est entretenu avec le président français François Hollande, qui a lui aussi tenté de le convaincre, sans succès.

Hier, les ministres du Commerce des 28 États membres de l'Union européenne ont reporté le vote qu'ils devaient tenir sur la question et ont plutôt décidé de poursuivre les discussions avec l'espoir de ratifier l'entente d'ici la visite en Europe du premier ministre canadien Justin Trudeau, la semaine prochaine.

Ironiquement, c'est Jean Charest - celui qui a mis en branle le processus des négociations entre le Canada et l'Europe, en janvier 2007 - qui avait souligné à l'époque que les négociations allaient devoir déborder le cadre des seuls États signataires parce que l'AECG couvrait des secteurs économiques de compétence provinciale.

Profitant de son passage au Forum économique de Davos, Jean Charest avait rencontré en 2007 le ministre allemand de l'Économie, Michael Glos, et le commissaire au Commerce de l'Union européenne, Peter Mandelson, pour sonder leur intérêt à relancer les négociations en vue de la conclusion d'un accord de libre-échange Canada-UE.

L'intérêt des Européens était manifeste, des négociations ont été amorcées et un accord a été conclu en 2014, mais il est resté en dormance jusqu'à ce que la ministre fédérale du Commerce international, Chrystia Freeland, décide, en février dernier, de le réactualiser en vue de sa ratification prochaine.

Pierre Pettigrew semblait toujours confiant hier d'obtenir l'adhésion de la Wallonie au cours des prochains jours. Il ne savait toutefois pas s'il allait devoir retourner prestement en Belgique. C'est ça, la fin d'une négociation, on ne sait jamais quand et comment exactement cela va se terminer.

Photo Alain Roberge, La Presse

Brian Mulroney, ex-premier ministre du Canada, Jean Charest, ex-premier ministre du Québec, et Pierre Pettigrew, envoyé spécial du Canada dans le dossier du libre-échange entre le Canada et l'Union européenne ont pris part, hier, à un événement organisé par la chambre de commerce de Montréal.