L'analogie n'est pas de moi, mais de Krishen Rangasamy, économiste principal à la Banque Nationale, qui, dans une étude publiée lundi, a comparé la performance récente du dollar canadien à celle du rôle titre du film The Revenant qui a valu l'Oscar du meilleur acteur à Leonardo DiCaprio.

« Malmené et laissé pour mort il y a quelques semaines à peine, le dollar canadien revient en force », écrit M. Rangasamy en faisant référence au personnage principal du film plusieurs fois oscarisé durant la cérémonie de dimanche soir.

À l'image du Revenant, explique donc l'économiste, le dollar canadien a surpris par l'étonnante résilience qu'il a affichée depuis sa descente aux enfers de la dernière année qui l'a pratiquement mené à 68 cents US, en janvier dernier.

Depuis l'atteinte de ce plancher le 20 janvier, le huard a regagné près de 9 % par rapport au dollar américain.

Le dollar canadien, qui avait été parmi les derniers de classe tout au long de 2015, s'est soudainement transformé depuis la fin de janvier en devise de tête, affichant la deuxième valorisation (presque 3 %) de toutes les monnaies cette année, tout juste derrière le yen japonais.

Rappelez-vous en décembre dernier, bon nombre d'économistes tablaient dans un horizon de très court terme sur un dollar canadien à 65 cents US. Hier, notre dollar a clôturer à 74,55 cents US.

Cette solide et surprenante performance du huard a été en bonne partie rendue possible par le tassement du dollar américain qui a été affecté par des statistiques économiques américaines faibles en février, rappelle Krishen Rangasamy.

Mais le huard s'est aussi remplumé grâce à la très progressive, mais constante progression des prix du pétrole qui, eux, ont terminé la journée d'hier en hausse de 1,9 % alors que le baril de pétrole léger américain a clôturé à 34,40 $US.

Le dépôt d'un prochain budget fédéral expansionniste explique aussi le redressement de notre devise puisque les stimulations budgétaires prévues réduisent d'autant les probabilités que la Banque du Canada décide de baisser les taux d'intérêt pour relancer elle aussi l'activité économique canadienne.

« Les marchés commencent à comprendre que l'intervention de la Banque du Canada est moins probable dans le contexte où le gouvernement fédéral a clairement indiqué qu'il allait prendre des mesures pour stimuler l'économie », m'explique M. Rangasamy.

Chose certaine, le scénario qui se déroule présentement est conforme à celui de la Banque Nationale qui anticipe une stabilité relative du dollar canadien en 2016 alors qu'il devrait terminer l'année à 76 cents US, bien que l'institution n'écarte pas l'avènement de soubresauts épisodiques, éventualité hautement probable dans le monde très volatil des devises.

CROISSANCE-SURPRISE AU QUATRIÈME TRIMESTRE

La publication des statistiques sur la croissance du produit intérieur brut (PIB) canadien pour le dernier trimestre 2015 n'est pas étrangère à la poussée enregistrée hier par le huard, qui s'est apprécié de près de 1 cent US en cours de séance avant de se calmer un peu.

Contrairement aux attentes - dont celles de la Banque du Canada - qui anticipaient rien de moins qu'une croissance nulle de l'économie canadienne au quatrième trimestre, l'activité économique a progressé de 0,8 % durant les trois derniers mois de l'année.

L'activité économique du quatrième trimestre a été nettement inférieure à celle enregistrée au troisième trimestre lorsque le PIB canadien a progressé de 2,4 %. Une chute qui s'explique par la faiblesse des investissements des entreprises et une forte diminution des importations, situation partiellement attribuable à la faiblesse du dollar canadien.

La performance des six derniers mois de l'année a toutefois permis de renverser l'état de récession technique dans lequel l'économie canadienne était plongée au premier semestre. Au final, le PIB canadien a progressé de 1,2 % en 2015, soit la moitié moins de la performance qu'il avait enregistrée en 2014.

Photo Robert Skinner, Archives La Presse