Le partenariat annoncé cette semaine à Davos entre Québec, Hydro-Québec et les sociétés françaises Exagon et Peugeot, pour la réalisation d'une étude de préfaisabilité en vue de la fabrication de composants de voitures électriques, n'est en fait qu'un premier jalon qui pourrait amener le constructeur automobile français à implanter une usine d'assemblage de voitures électriques dans la province.

«On travaille sur le retour de la fabrication automobile au Québec», explique Pierre Gabriel Côté, PDG d'Investissement Québec, qui a scellé les discussions en début de semaine entre les parties à la suite de discussions qui ont duré 18 mois.

«Si le projet franchit toutes les étapes, Peugeot a l'intention de fabriquer ses automobiles électriques au Québec, avec un mandat de fabrication mondiale. Ça fait partie du plan du partenariat qu'on a conclu cette semaine.»

Étonnamment, c'est le constructeur français qui a pensé au Québec pour la réalisation de ce projet qui a de quoi faire rêver.

À la suite d'une réflexion stratégique, Peugeot a décidé d'aborder le développement de l'auto électrique sur le mode de l'innovation de rupture, c'est-à-dire en rupture par rapport à ses projets antérieurs.

Pour accélérer la réflexion, on a sorti le projet du siège social parisien de Peugeot et on a créé un laboratoire satellite afin de repenser de zéro les processus de production et de faire une analyse poussée pour déterminer où il faudrait développer la voiture de demain.

Des spécialistes mondiaux de la localisation de sites stratégiques ont désigné le Québec comme le meilleur endroit pour concrétiser pareil projet.

Le Québec est arrivé en tête de liste en raison de l'accessibilité des ressources - aluminium, lithium, énergie propre... - , de l'expertise manufacturière de pointe qu'a développée la grappe industrielle de l'aéronautique et enfin de l'apport technologique d'Hydro-Québec et de sa division TM4, qui développe des moteurs électriques en Chine.

« Si l'étude de préfaisabilité est probante, on passe à une deuxième étape en faisant réaliser une étude de coûts qui va prendre en compte tous les paramètres: approvisionnement, logistique, main-d'oeuvre, accès aux marchés », précise Pierre Gabriel Côté.

***

Il reste que la volonté première de Peugeot est de réaliser le projet au Québec et de tenter simultanément de percer le marché américain avec sa toute nouvelle voiture propre.

Peugeot s'est associé à l'entrepreneur Luc Marchetti, PDG d'Exagon Motors. Ex-coureur automobile, Marchetti s'est recyclé en motoriste de F1, responsable notamment des moteurs du coureur Alain Prost. Depuis plusieurs années, il s'est lancé dans les moteurs électriques en participant à de nombreux rallyes en Europe.

«C'est un vrai entrepreneur qui pousse pour l'auto électrique et qui voit grand. C'est lui qui a embarqué Peugeot dans cette aventure», précise le PDG d'Investissement Québec.

Pierre Gabriel Côté ne cache pas que le rêve de ramener l'industrie automobile au Québec est emballant, mais il souligne que c'est aussi son défi et son mandat de relancer le secteur manufacturier québécois.

Ex-PDG de Bombardier Avions d'affaires, il n'a pas pris longtemps à convaincre le PDG d'Hydro-Québec, Éric Martel, d'embarquer dans le projet. M. Martel avait succédé à Pierre Gabriel Côté chez Bombardier Avions d'affaires.

«Ce n'est pas nécessairement dans le mandat d'Hydro-Québec que de prendre des participations dans des projets manufacturiers, mais Éric a rapidement vu le potentiel du projet, c'est un industriel comme moi», souligne-t-il.

J'ai demandé à Pierre Gabriel Côté s'il était en froid avec le ministre du Développement économique comme on l'entend dire depuis sa nomination au poste de PDG d'Investissement Québec, il y a exactement un an.

Durant les trois jours où j'ai côtoyé les deux hommes, je n'ai pas senti d'atomes crochus qui les liaient, mais le principal intéressé m'assure que leurs relations sont cordiales.

«Depuis ma nomination, il y en a qui cherchent des bibittes. Moi, j'ai développé une expertise comme industriel et lui, comme banquier, on travaille ensemble et on se complète très bien», me répond-il.

Jacques Daoust a tenu sensiblement les mêmes propos à mes collègues journalistes à Davos. Il a indiqué qu'il n'avait rien eu à voir avec la nomination de M. Côté, que c'était son sous-ministre qui avait pris cette décision. Tout comme il ne choisit pas son chef de cabinet.

«Je n'ai aucun problème à travailler avec M. Côté», a dit le ministre Daoust.