La quatrième révolution industrielle. On est en plein dedans et c'est pourquoi le Forum économique mondial (FEM) a choisi cette année de se pencher sur l'avènement de cette nouvelle ère industrielle, celle de l'internet des objets, des robots avancés, de l'impression 3D. Bien qu'insidieuses, les perturbations que génère la numérisation sans cesse grandissante de la production sont nombreuses pour les entreprises et pour l'économie.

Plusieurs ateliers du Forum économique mondial se penchent cette année sur l'importance d'avoir une bonne maîtrise de la quatrième révolution industrielle.

Après la machine à vapeur, la chaîne de montage et enfin l'implantation généralisée de la robotique, la numérisation de la production et de l'activité économique s'est progressivement imposée comme la quatrième nouvelle vague industrielle, une vague dont on a mal évalué la force de ressac.

Pierre Nanterme, le PDG d'Accenture, qui participera à plusieurs panels sur le sujet à Davos, résume bien la sournoiserie avec laquelle cette nouvelle réalité industrielle s'est implantée.

« La numérisation est la raison principale qui explique la disparition de plus de la moitié des 500 entreprises qui composaient la liste des 500 plus grandes entreprises au monde depuis 2000. C'est le principal sujet de discussion que j'ai avec les PDG que je rencontre », explique-t-il dans un document préparé en marge du FEM.

Beaucoup de leaders d'entreprise souhaitent participer à cette révolution perturbatrice plutôt que d'en devenir les victimes. Ils veulent tirer profit des données, du « big data », et innover plus rapidement.

Le succès, toutefois, selon Pierre Nanterme, n'est plus de changer souvent de stratégies, mais de développer la capacité d'exécuter de multiples stratégies simultanément.

Robert Shiller, professeur d'économie à l'Université Yale et Prix Nobel d'économie 2013, est lui aussi d'avis que la quatrième révolution industrielle est le sujet de l'heure et qu'elle doit forcer la réflexion et la prise de décision.

Alors qu'on estime à 5 millions le nombre d'emplois qui vont être éliminés au cours des cinq prochaines années en raison de la numérisation grandissante de l'économie, le professeur Shiller estime qu'il est temps pour les gouvernements de mettre en place des mesures fiscales pour prendre en compte les inégalités que pourrait générer la quatrième révolution industrielle.

Si cette révolution s'avère moins dévastatrice sur le plan de l'appauvrissement des travailleurs qu'estimée, les gouvernements ne perdront rien, mais ils auront au moins eu le mérite de prévoir. Il suffit, selon Robert Shiller, d'utiliser les outils financiers modernes de gestion de risque.

MIGRANTS, PÉTROLE, CLIMAT ET PLASTIQUE

Il ne sera évidemment pas seulement question de l'économie numérique durant les quatre prochains jours à Davos. Plusieurs sujets chauds de l'actualité vont prendre le relais durant les 250 ateliers de réflexion de l'événement.

La situation critique des migrants en Europe et ailleurs dans le monde va occuper plusieurs séances de discussion du FEM alors qu'un autre Prix Nobel d'économie, Alvin Roth, professeur à l'Université de Stanford, plaidera en faveur d'une plus grande liberté de choix des pays d'accueil pour les gens forcés à l'exil.

Selon le professeur Roth, il s'agit là d'une variable déterminante pour assurer aux migrants la possibilité réelle de recommencer une vie décente et assurer des retombées positives à la communauté d'accueil.

La chute des prix du pétrole sera aussi au coeur des discussions, d'autant que l'Iran vient de confirmer sa volonté de hausser sa cadence de production, dès la levée de ses quotas d'exportation.

Au chapitre des changements climatiques, on reviendra à Davos sur les engagements de la dernière conférence de Paris et on se penchera de façon plus large sur la dégradation générale de l'environnement. Une étude du FEM, publiée hier, nous apprend que l'on retrouvera d'ici 2050 plus de plastique que de poissons dans l'océan...

UNE SÉCURITÉ ENCORE PLUS RESSERRÉE

Je n'aurais jamais cru cela possible, mais les mesures de sécurité ont été resserrées d'un cran cette année à Davos. Visiblement, la série d'attentats meurtriers qui ont récemment frappé la France, la Turquie et même le Burkina Faso a forcé les autorités suisses à faire preuve d'une vigilance extrême.

Déjà protégées par des milliers de soldats et de policiers recrutés dans tous les cantons avoisinants pour la durée du Forum économique mondial, les autorités de la petite ville des Alpes helvétiques déployaient, lundi, des mesures additionnelles encore plus sophistiquées pour resserrer la sécurité du site.

Les hélicoptères que l'on entend sans cesse durant les quatre jours du FEM étaient évidemment bien sonores, mais leur ronron était souvent étouffé par le vrombissement des avions de chasse - des F/A 18 Hornet et des Mirage français - qui répétaient leurs manoeuvres de contrôle de l'espace aérien, qui sera totalement fermé durant l'événement.

La volonté d'être en mesure de parer à toutes les éventualités est telle que des policiers s'entraînaient même à intercepter à coups de carabine - dans une simulation - des drones miniatures dans un champ, à proximité du centre des congrès.

Photo FABRICE COFFRINI, Agence fRance-Presse

À la suite des attentats meurtriers qui ont récemment frappé la France, la Turquie et le Burkina Faso, pour ne nommer que ces pays, la sécurité a été resserrée d’un cran cette année à Davos pour la tenue du Forum économique mondial.

Photo Ruben Sprich, Reuters

La situation critique des migrants en Europe et ailleurs dans le monde va occuper plusieurs séances de discussion du FEM