Le premier ministre Philippe Couillard n'a pas ressuscité le Plan Nord, mais il a réussi, hier à Davos, à lui donner un peu d'air frais en annonçant la participation de Québec à des investissements de 400 millions que réalisera la société indienne Tata Steel au cours des deux prochaines années dans son projet de mine de fer à Schefferville.

À défaut d'attirer des investissements pour développer de nouveaux gisements miniers dans le Nord québécois, Québec participe au moins à la consolidation d'un projet en réalisation, mais qui risquait de s'essouffler sans l'apport de nouveaux capitaux.

Tata Steel a investi à ce jour plus de 1 milliard dans le développement de sa mine de fer à enfournement direct - une production de minerai qui prend directement le chemin de la mine au port de mer pour être exportée - à Schefferville, mais n'avait pas d'accès à un quai d'embarquement.

Le fer que Tata Steel produit à Schefferville transite jusqu'à Sept-Îles aux installations portuaires du concurrent Iron Ore du Canada (Rio Tinto) qui s'occupe de le charger sur les navires.

Tata Steel doit absorber des coûts de transbordement qui étaient raisonnables lorsque le prix du fer s'échangeait à plus de 80 $US la tonne, mais qui sont devenus prohibitifs au prix actuel de 40 $US la tonne.

« Ce n'était pas un enjeu lorsque nous avons débuté le projet, mais là il fallait trouver une solution », m'explique T.V. Narendran, le directeur général de Tata Steel.

Tata Steel est l'entreprise qui est à la base du conglomérat Groupe Tata qui regroupe plus d'une centaine d'entreprises dans sept secteurs d'activité et qui a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 103 milliards US l'an dernier.

« Cela fait plus de 100 ans que Tata Steel est en affaires et on a toujours fait de l'argent », me précise T.V. Narendran.

L'investissement de 1 milliard que l'entreprise a fait dans la mine de fer de Schefferville est le plus important qu'elle ait réalisé à l'étranger.

Les investissements de 400 millions qui seront déployés au cours des deux prochaines années vont permettre à Tata Steel d'avoir un accès au tronçon ferroviaire à partir de la jonction Arnaud à Sept-Îles jusqu'au nouveau quai multi-usager dont elle a financé en partie la construction. Québec va confirmer dans les prochains mois la hauteur de sa participation financière au projet.

« Cela va réduire nos coûts de transport et nous permettre d'augmenter la production à la mine de Schefferville », insiste le patron de Tata Steel. Trois cents emplois seront ainsi maintenus et une centaine d'autres pourraient être créés.

Tata Steel produit actuellement 2 millions de tonnes de minerai de fer par année et compte hausser à 6 millions de tonnes ses livraisons d'ici quelques années, et ultimement à 10 millions.

Tout le minerai de fer extrait au Québec est destiné aux marchés européens et chinois. En Inde, Tata Steel produit 16 millions de tonnes par année qui sont toutes absorbées par le marché local. Son objectif est de porter à 30 millions de tonnes sa production annuelle en Inde et ainsi répondre à la surprenante croissance économique indienne qui surpasse aujourd'hui celle de la Chine.

(i-tit) Auto électrique et aéronautique

Le premier ministre Couillard a aussi annoncé hier la création d'un partenariat stratégique entre Investissement Québec, le groupe PSA Peugeot-Citroën, Exagon Motors et Indus-Tech, une division d'Hydro-Québec.

Ce partenariat va mettre en marche une étude de préfaisabilité en vue du développement de composants pour véhicules électriques haute performance au Québec. On parle ici de fabrication éventuelle de moteurs et de systèmes d'entraînement, de poutres de châssis en aluminium...

Le consortium va investir 30 millions dans cette étude de préfaisabilité, dont 14 millions de Québec, 2 millions d'Ottawa et 4 millions d'Hydro-Québec. Peugeot et Exagon Motors vont injecter 10 millions dans le projet qui doit aboutir d'ici 12 à 14 mois.

Si jamais les conclusions de l'étude s'avéraient positives, le Québec pourrait décrocher le mandat manufacturier de production de ces composantes pour l'ensemble des véhicules électriques de Peugeot à l'échelle mondiale.

Le ministre fédéral du Développement économique Navdeep Bains a participé à la conférence de presse du groupe et il a fait savoir que la participation du fédéral s'inscrivait en plein dans la stratégie économique du nouveau premier ministre Justin Trudeau, qui venait tout juste de prononcer un discours à Davos.

« Le gouvernement fédéral veut faire des investissements stratégiques dans des secteurs-clés de l'économie qui vont assurer des emplois de qualité à nos citoyens de la classe moyenne », a dit le ministre Bains.

Questionné sur le traitement qu'entendait donner son ministère à la demande de Bombardier qui souhaite obtenir une participation financière canadienne équivalente à celle obtenue de Québec, le ministre Bains a été étonnamment solide.

« L'aéronautique est un secteur-clé de l'économie canadienne. C'est 29 milliards au PIB du pays, ce sont 180 000 emplois d'un océan à l'autre et 45 000 dans la région montréalaise. On étudie le dossier sérieusement », a-t-il indiqué.

Son homologue québécois, Jacques Daoust, s'est dit pour sa part optimiste en observant que la réceptivité du nouveau gouvernement Trudeau à l'endroit d'un soutien financier à Bombardier est nettement plus positive que celle du précédent gouvernement. Mais ni lui ni M. Bains n'ont voulu s'avancer sur l'échéance d'une décision prochaine du fédéral.



Justin Trudeau fait la manchette à Davos

Le premier ministre canadien Justin Trudeau a fait une apparition remarquée hier lors de son premier passage à la tribune officielle du Forum économique mondial de Davos dans une allocution qui avait pour thème «L'opportunité canadienne».

Le premier ministre Trudeau ne s'est pas tant illustré pour la pertinence de ses propos économiques que pour la chaleur et l'empathie avec lesquelles il a décliné sa vision économique du Canada, en ne se gênant pas au passage pour critiquer la rigidité du précédent gouvernement Harper.

«Nos ressources naturelles sont importantes et elles le resteront toujours. Les Canadiens savent toutefois que la croissance et la prospérité ne tiennent pas seulement à ce qui se trouve sous nos pieds, mais surtout à ce que nous avons entre les oreilles.»

Candide mais convaincu lorsqu'il a répété son plaidoyer en faveur de la classe moyenne - que l'on a beaucoup entendu durant la campagne électorale et depuis son élection - le premier ministre Trudeau a affiché un bel optimisme devant les ratés de l'économie mondiale.

Il a incontestablement laissé une forte impression à l'auditoire davossien puisque c'est une de ses photos prises durant son allocution qui a été sélectionnée comme photo du jour de la première journée du FEM.

C'est aussi à Justin Trudeau que l'on a attribué la meilleure citation du jour :

«La diversité est le moteur de l'invention. Elle génère la créativité qui fait la richesse du monde.»