Depuis des lustres, les grands théoriciens du management le disent et le répètent ad nauseam sur toutes les tribunes: l'innovation doit être au coeur de la stratégie de toute entreprise qui aspire à accélérer ou seulement maintenir sa croissance. Sans innovation, il n'y a pas d'avenir. C'est aussi l'avis que partagent les grands patrons des sociétés responsables du développement économique au Québec.

Lundi, j'ai eu le plaisir d'animer un groupe d'experts au Canadian Club de Montréal en compagnie de trois poids lourds du développement économique québécois qui étaient venus discuter des nouveaux défis que pose le financement des entreprises dans une économie en mutation.

Jean-René Halde, PDG de la Banque de développement du Canada (BDC), Christian Dubé, premier vice-président de la Caisse de dépôt, et Pierre Gabriel Côté, PDG d'Investissement Québec, sont tous les trois à la tête d'institutions financières au service des entreprises québécoises qui ont besoin de capitaux pour réaliser ou accélérer leur plan d'expansion.

Les trois financiers ont convenu que plusieurs nouveaux facteurs étaient maintenant pris en compte dans l'évaluation que leurs équipes font des projets qui leur sont soumis.

Tous les trois sont prêts à participer à des projets dans tous les secteurs d'activité économique - du manufacturier aux logiciels, en passant par l'agroalimentaire ou les mines et métaux -, mais la fonction innovation reste l'attribut principal auquel toutes les entreprises doivent accorder la priorité si elles aspirent à progresser et ultimement à se démarquer.

«Les entreprises québécoises, surtout les PME de 100 employés et moins, n'investissent pas assez et même souvent pas du tout dans l'innovation, dans l'automatisation, dans l'informatisation de leur chaîne de production», a maintes fois déploré Jean-René Halde qui termine ce mois-ci un mandat de 10 ans à la direction de la BDC.

Si les institutions qui font du développement économique préfèrent, et de loin, les entreprises qui visent les marchés d'exportation, les dirigeants d'Investissement Québec, de la Caisse de dépôt et de la BDC constatent du même souffle que les entreprises qui sortent du Québec ont habituellement intégré l'innovation dans leurs procédés industriels.

L'exemple de MAAX

Une fois nourri de ce constat unanime quant à l'importance de l'innovation pour la pérennité des entreprises, j'ai quitté le déjeuner-causerie pour me rendre dans une salle d'exposition du Mile End où l'entreprise Bains MAAX se préparait à procéder, en soirée, au lancement de deux nouvelles gammes de produits.

L'entreprise beauceronne, qu'avait fondée Placide Poulin en 1969 et qu'il a vendue en 2004 au groupe américain J.W. Childs, est venue tout près de faire faillite, en 2008, lorsque le marché immobilier s'est effondré aux États-Unis.

En 2004, MAAX gérait un réseau de 23 usines au Canada et aux États-Unis et employait 3800 personnes. Lorsque la firme d'investissement canadienne Brookfield Asset Management le rachète de la quasi-faillite, en 2008, le groupe industriel ne compte plus que 15 usines et 2000 employés.

Après avoir procédé à une nouvelle rationalisation et délaissé la fabrication de spas et de produits de niche, MAAX a décidé de réorienter totalement sa stratégie en ne conservant que huit usines, dont trois au Québec, et 1200 employés au total.

«Aujourd'hui, MAAX est redevenue une entreprise solide. Le tournant s'est opéré en 2011, lorsque notre nouveau président, Mark Gold, a entrepris d'axer toute notre stratégie de développement sur l'innovation, sur le lancement de nouveaux produits novateurs», m'explique André Deland, vice-président, développement de nouveaux produits et marketing.

Un centre de recherche et développement a été créé dans les installations du groupe à Lachine, et cette activité mobilise aujourd'hui 55 personnes au sein de l'entreprise.

Depuis 2011, MAAX a haussé de 7% ses effectifs dans ses usines québécoises, qui emploient aujourd'hui 650 personnes.

«On lance cette semaine deux nouvelles gammes de produits qui ont été conçues et développées par notre équipe d'innovation. Notre solution ModulR permet d'agencer plus de 3000 configurations possibles de combinaisons de bain et douche, selon les couleurs désirées et l'espace souvent restreint des condos en milieu urbain», souligne André Deland, en me présentant les nouveaux modèles très design que proposera le fabricant.

L'équipe de R et D vient aussi de mettre au point de tout nouveaux panneaux muraux pour douche qui reproduisent fidèlement l'apparence des murs en céramique mais dont l'installation est simplifiée au maximum.

Plusieurs appréhendaient en 2008 la fin de MAAX et de ses deux usines en Beauce. L'entreprise doit sa résurrection d'aujourd'hui aux investissements en innovation qu'elle fait dorénavant sur une base continue, et qui lui assurent sa première place au Canada et le quatrième rang des fabricants de bains et douches aux États-Unis.