Marc-André Bovet est un développeur. Un vrai. Petit-fils du fondateur des magasins de vêtements pour hommes Bovet, il a travaillé durant 10 ans pour l'entreprise familiale avant de voler de ses propres ailes. En 2006, il fonde Bone Structure, un nouveau système d'assemblage de maisons à partir de structures d'acier, un concept qui s'impose dans le marché en dépit de l'indifférence des financiers.

Lorsqu'il termine ses études universitaires en commerce et marketing, Marc-André Bovet lance avec un associé une entreprise de fabrication de meubles contemporains. Le succès vient rapidement alors que leurs meubles trouvent refuge dans des magasins prestigieux comme Mariette Clermont.

Après trois ans toutefois, il décide de se joindre à l'entreprise que son père a fait progresser avec succès depuis plus de trois décennies.

«Mon grand-père avait lancé un magasin au coin d'Ontario et Frontenac en 1907. C'était un commerce qui vivotait, mais que mon père Marc a relancé en y incorporant un salon de billard. Mais sa plus grande décision d'homme d'affaires a été de se lancer dans la conception de vêtements pour hommes de forte taille.

«Il a été le premier à faire ça. Il avait des clients de partout aux États-Unis qui venaient à Montréal pour y acheter des complets. Lorsqu'il a ouvert en 1973 son magasin du boulevard Métropolitain, ça a été la cohue», rappelle Marc-André Bovet.

En 1981, lorsque Marc-André Bovet va rejoindre son frère Pierre, de 13 ans son aîné, Bovet compte cinq magasins à Montréal. Dix ans plus tard, Bovet possède 45 magasins au Québec sous 5 bannières différentes, dont Sauvé et frères.

«J'ai quitté en 1992 parce que je voulais poursuivre le développement à fond. Je voulais attaquer le marché américain. Mon frère était plus conservateur. Moi, je voulais foncer», relate l'entrepreneur.

Après avoir fondé une boîte de consultation en publicité et en développement de marque, Marc-André Bovet se fait embaucher par Bombardier Produits récréatifs comme responsable de la commercialisation de son projet de voiturette électrique.

«J'ai visité quantité de projets de communautés à accès restreint [gated communities] aux États-Unis, le marché visé par Bombardier, et c'est là que j'ai constaté la production hallucinante de déchets que génèrent les chantiers de construction résidentielle.

«J'ai appris une autre chose chez Bombardier. L'entreprise ne fabrique aucune composante, elle les assemble», explique le développeur.

Le virage industriel

C'est ainsi qu'est née l'idée d'assembler des maisons à partir de structures d'acier léger. En 2006, Marc-André Bovet crée Bone Structure à partir du principe on ne peut plus simple de l'ossature humaine, qui compte 206 composantes.

Il embauche des architectes, des ingénieurs, des designers industriels auxquels se grefferont des urbanistes, des designers d'intérieur et des chargés de projet.

Bone Structure peut livrer une maison de 5000 pieds carrés en cinq jours. Sans marteau, sans scie, sans niveau, avec une seule perceuse et quatre assembleurs. Les frais de main-d'oeuvre, qui représentent 60% du coût d'une maison neuve en bois, tombent à 30% seulement. «C'est un immense jeu de mécano qu'on a fait breveter dans 42 pays. Toutes nos pièces sont fabriquées dans sept usines qui fournissent l'industrie automobile et aéronautique. Nos maisons ne comportent aucun mur portant et sont transformables en cours de vie», précise Marc-André Bovet.

L'entrepreneur a investi des millions dans le développement de son concept. L'entreprise a fonctionné à perte durant cinq ans et est devenue rentable depuis deux ans seulement.

Bone Structure s'est attaquée cette année au marché canadien, de Halifax à Vancouver. La réponse a été immédiate. Sur les 200 maisons que l'entreprise projette de livrer en 2014, 80% le seront à l'extérieur du Québec.

«La France, l'Italie, le Luxembourg et la Nouvelle-Zélande veulent acheter notre concept. Je vise maintenant le marché américain», expose le PDG.

Même s'il a le vent en poupe, Marc-André Bovet déplore qu'il soit toujours incapable de trouver le financement nécessaire pour le développement de son entreprise.

«On a encore le syndrome du pense-petit au Québec. Tout le monde dit qu'il faut pousser le nouveau Québec inc., mais aucune banque ne veut investir chez nous. Au début, on refusait parce qu'on disait que j'étais à l'étape de la conceptualisation. Maintenant, on me dit que je n'ai pas d'actifs, pas d'immeubles, pas d'usines. C'est bien sûr, je suis dans la R&D», laisse-t-il tomber avec dépit.

Bone Structure est, selon lui, l'illustration de la créativité québécoise. Avec ses 35 professionnels de l'innovation, l'entreprise veut amener l'industrie de la construction résidentielle à l'âge industriel. C'est beau l'innovation, mais il faut pouvoir la financer pour qu'elle s'exprime.