L'investissement de près de 1,3 milliard de dollars qu'a annoncé hier la société Ericsson pour la construction d'un centre mondial de technologies de l'information et de communications dans la banlieue ouest de Montréal ne sera pas éminemment créateur d'emplois. Essentiellement un mégasite d'hébergement, le centre TIC mondial d'Ericsson devrait toutefois consolider beaucoup d'activités de recherche à Montréal.

Une soixantaine de techniciens et d'ingénieurs seront suffisants pour faire fonctionner le nouveau centre TIC mondial que va construire Ericsson à Vaudreuil-Dorion.

C'est peu en regard des investissements massifs que va requérir la construction et les équipements de ce centre, dont la superficie de 40 000 mètres carrés équivaut à celle de huit terrains de football.

Cette implantation technologique viendra surtout renforcer la place du Québec dans la constellation de sites de recherche et développement (R&D) qu'exploite à l'échelle planétaire la multinationale suédoise.

Le centre de R&D d'Ericsson à Montréal - l'un des plus importants centres de recherche du groupe situés à l'extérieur de la Suède - emploie à lui seul 1600 personnes et les activités du prochain centre TIC mondial vont faciliter la réalisation de mandats qui sont présentement éparpillés dans plusieurs endroits aux quatre coins du monde.

Le centre de Vaudreuil-Dorion hébergera et testera toutes les technologies qui sont développées dans le réseau mondial d'Ericsson et, selon son PDG canadien, Mark Henderson, les ingénieurs de Montréal vont être en bonne position pour consolider des recherches qui sont effectuées en duplication dans plusieurs centres.

«Une fois qu'un centre d'hébergement s'installe dans une région à faible coût comme le Québec - où l'électricité est deux fois moins chère qu'ailleurs -, ça peut être tentant d'y adjoindre un centre de recherche», me faisait remarquer récemment un exploitant de fermes d'hébergement.

Dans le cas d'Ericsson, c'est plutôt le contraire qui vient de se produire. En plus de son centre de R&D de Montréal, Ericsson possède un autre laboratoire à Ottawa que la multinationale a acquis de Nortel en 2009 et où s'activent 1200 chercheurs.

Cette concentration d'activités de recherche à Montréal et Ottawa, jumelée à des critères extrêmement favorables pour l'implantation de sites d'hébergement - faible coût d'approvisionnement en électricité, stabilité du voltage, climat froid l'hiver qui réduit les coûts de climatisation - ont fortement incité Ericsson à établir son centre mondial d'hébergement et de tests dans la région de Montréal.

Des attraits durables

Outre ces avantages stratégiques, le Québec offre aussi depuis longtemps à Ericsson des mesures d'encouragement fiscales liées à l'emploi qui ont facilité la rétention du géant suédois malgré les crises qu'il a dû affronter dans le passé.

On a tous en mémoire les douloureux déboires de Nortel - la plus grande société techno de l'histoire canadienne -, mais on oublie souvent qu'Ericsson a vécu le même calvaire à la même époque sauf qu'elle a réussi à surmonter les épreuves pour en émerger plus forte.

Au plus fort de son déclin entre 2000 et 2004, Nortel a vu le nombre de ses employés dans le monde chuter de 95 500 à 36 000. Durant la même période, les effectifs mondiaux d'Ericsson ont chuté de 105 000 à 46 000 employés.

L'entreprise qui, comme Nortel, était un important équipementier pour l'industrie des télécommunications était aussi, dans les années 90, parmi les plus importants fabricants de téléphones cellulaires au monde.

En perte de vitesse dans le marché du téléphone portable, Ericsson s'est associée dans une coentreprise en 2001 avec le géant Sony et a finalement complètement délaissé ce secteur d'activité en cédant sa participation en 2011.

Ericsson n'a toutefois jamais délaissé son champ premier d'activité, celui des réseaux de télécommunications et a toujours développé de nouveaux produits et de nouveaux marchés pour les exploitants de réseaux sans fil, ses principaux clients.

C'est notamment ce qui explique pourquoi elle a toujours maintenu une forte activité à son centre de R&D de Montréal où ses ingénieurs s'activent à concevoir les réseaux de demain.

Voilà ce qui explique aussi pourquoi Ericsson est redevenue le grand acteur qu'il était au début des années 2000. La société suédoise compte aujourd'hui 110 000 employés et des clients dans 180 pays. Plus de 40% du trafic mobile mondial transite par l'entremise de ses réseaux de communication. Sa technologie soutient une clientèle estimée à 2,5 milliards d'abonnés dans le monde.