Pourquoi le prix de l'essence augmente toujours plus à Montréal que partout ailleurs au Québec et même au Canada? Cette question était sur toutes les lèvres hier et même les journaux de Toronto s'interrogeaient sur la curieuse malédiction qui frappe les automobilistes montréalais.

Le temps d'un claquement de doigts, le prix du litre d'essence régulière a fait un bond de 13 cents dans la plupart des stations-service de la grande région de Montréal pour se fixer à 1,53$ hier matin.

Mine de rien, les pétrolières ont ainsi fracassé la marque record de 1,51$ le litre qui avait été enregistrée en juillet 2008 lorsque le baril de pétrole s'échangeait à son prix historique de 140$. Précisons que le baril de Brent s'échangeait hier à 115$ et le West Texas Intermediate tout juste sous les 97$, bien loin du niveau record de 2008.

Durant la matinée, les pétrolières se sont comme rendu compte qu'elles avaient poussé le bouchon un peu trop loin et elles ont subtilement battu en retraite en ramenant le prix du litre de régulier tout juste sous les 1,50$, à très exactement 1,49,9$...

Si le mouvement de hausse des prix de l'essence a touché l'ensemble des régions du Canada, c'est encore à Montréal que l'on a enregistré les plus fortes augmentations et c'est toujours à Montréal que l'on affiche les prix les plus élevés au pays.

À Toronto, les automobilistes étaient choqués de devoir absorber une hausse de 4 cents le litre qui se vendait tout de même à seulement 1,37$, soit le même prix observé hier à Trois-Rivières, un véritable prix d'aubaine comparé à celui de Montréal.

Avant d'essayer de comprendre pourquoi c'est toujours plus cher à Montréal, il faut d'abord revenir sur les raisons fondamentales qui ont commandé le mouvement de hausse d'hier. Et déjà là, ce n'est pas très clair.

Aucune pénurie ne se profile à l'horizon, la menace d'un blocus iranien du détroit d'Ormuz n'est pas plus élevée qu'elle ne l'était en janvier dernier et à l'inverse d'une pénurie, les réserves américaines de pétrole sont même actuellement à un niveau anormalement élevé.

La consommation de pétrole aux États-Unis a chuté de 2,6% durant les 4 semaines qui se sont terminées le 7 septembre, ce qui marque la plus forte baisse de consommation depuis septembre 2008 lorsque la violente récession commençait à frapper durement.

Il faut donc aller du côté des activités de raffinage pour essayer de comprendre la cherté soudaine du précieux carburant.

Mais là encore, mystère. Malgré le fait que l'on déplore sans cesse l'insuffisance des capacités de raffinage en Amérique du Nord, les raffineries américaines fonctionnent présentement à seulement 84,7% de leur capacité de production, c'est le taux d'utilisation le plus bas depuis le mois d'avril dernier.

La situation canadienne ne démontre aucune surchauffe du côté des activités de raffinage, mais c'est là que les prix ont, semble-t-il, augmenté de façon subite. C'est du moins l'explication du moins qu'avançait hier l'Institut canadien des produits pétroliers.

Cela étant dit, si les automobilistes montréalais sont toujours surtaxés lorsqu'ils doivent faire le plein d'essence - par rapport aux automobilistes des autres régions du Canada et de presque partout au Québec - c'est justement parce qu'ils sont davantage taxés qu'ils ne l'étaient il y a trois ans.

Tous les automobilistes canadiens paient la taxe d'accise fédérale de 10 cents le litre. Au Québec, on paie aussi la taxe sur les carburants du Québec dont le ministre des Finances Raymond Bachand s'est servi depuis trois ans dans sa quête de retour à l'équilibre budgétaire.

La taxe sur les carburants du Québec a été haussée de 1 cent le litre chaque année, au cours des trois dernières années. De 15,2 cents le litre, elle est passée à 18,2 cents le litre.

Les automobilistes de la région de Montréal ont aussi droit à une taxe bonus pour financer les activités de transports en commun que coordonne l'Agence métropolitaine de transport (AMT). Cette taxe de 1,5 cent a été doublée l'an dernier à 3 cents le litre. On part donc avec une prise de plus par rapport aux autres Québécois.

Et évidemment, toutes ces taxes additionnées - soit 31,2 cents le litre - sont soumises à la TPS et à TVQ, à un taux combiné de 14,975%, ce qui donne 35,87 cents le litre.

Les Québécois sont les contribuables les plus taxés au Canada. Ils sont aussi ceux qui se font le plus pomper par les pétrolières.