C'est la guerre des chroniqueurs.

N'ayez crainte, mes relations avec Réjean Tremblay sont au beau fixe. L'ennemi est ailleurs. L'ennemi est dans la section des arts. L'ennemi, c'est Marc Cassivi.

Marc est un ami, mais si jamais les Penguins de Pittsburgh battent les Red Wings de Detroit en six parties en finale de la Coupe Stanley, je ne réponds pas de ce qui pourrait se passer lors de notre prochaine partie de hockey cosom.

 

Tous les printemps, la salle de rédaction de La Presse organise un pool amical des séries. Cette année, à l'aube de cette deuxième finale Wings-Penguins en 12 mois, il ne reste plus que deux prétendants à la victoire: Marc et moi.

Mieux que ça: le système de pointage fait en sorte que mon estimé collègue peut uniquement me battre si Pittsburgh l'emporte en six matchs. Tous les autres scénarios - victoire de Detroit, victoire de Pittsburgh en quatre, cinq ou sept parties - sont en ma faveur.

Le problème, voyez-vous, c'est que je commence à douter. Juste un peu, mais quand même.

Je doute, parce que l'infirmerie du Joe Louis Arena est drôlement occupée ces jours-ci. Pavel Datsyuk vient de rater trois matchs en raison d'une blessure à un pied. Le «bas du corps» de Nicklas Lidstrom et Kris Draper a tenu ces deux vétérans à l'écart des deux dernières rencontres de la série contre les Blackhawks de Chicago. Et Jonathan Ericsson se remet d'une appendicectomie.

Datsyuk, Lidstrom et Draper ont participé à l'entraînement des Wings, hier, mais seront-ils au sommet de leur forme pour le difficile affrontement qui s'annonce contre la bande à Sidney Crosby et Evgeni Malkin? Il est permis d'en douter. À moins bien sûr que Mike Babcock ait délibérément choisi de leur donner un long repos en vue de la finale, en se disant que son équipe pouvait battre les Blackhawks sans eux...

Quoi qu'il en soit, les dirigeants des Red Wings se sont plaints, avec raison, du très court délai - à peine trois jours - entre la finale d'association et la grande finale. Cela leur laisse bien peu de temps pour reprendre leur souffle et soigner leurs nombreux bobos.

La LNH n'avait certes pas le choix de réviser ses plans, qui fixaient à l'origine au 5 juin le début de la ronde ultime. On se serait retrouvé avec un délai de neuf jours entre les séries - un long hiatus qui aurait risqué de briser l'engouement exceptionnel qu'on observe pour les séries cette année. Mais entre trois et neuf jours, il y aurait pu y avoir un juste milieu.

La LNH a la chance d'avoir le meilleur duel dont elle pouvait rêver pour cette finale aux allures de combat revanche. Ce ne sont pas les belles histoires qui manquent. C'est la première fois en un quart de siècle que les mêmes équipes s'affrontent pour la Coupe Stanley deux ans de suite. Après avoir triomphé d'Alexander Ovechkin, Evgeni Malkin pourrait éliminer son autre cofinaliste au trophée Hart, Pavel Datsyuk. Les Penguins ont l'occasion de faire manger ses bas à Marian Hossa, qui les a désertés (et a accepté moins d'argent) parce qu'il croyait ses chances de remporter la Coupe Stanley meilleures à Detroit qu'à Pittsburgh. Le vénérable Chris Chelios pourrait gagner la Coupe Stanley pour la cinquième fois de sa carrière, et Sidney Crosby, la première.

Il aurait été dans l'ordre des choses de donner la chance aux deux équipes de se présenter dans le meilleur état possible, surtout que les deux premiers matchs seront espacés de seulement 24 heures. Tout ça pour faire plaisir à NBC, qui ne paie pas un sou pour diffuser les matchs de la LNH. Tout ça pour s'assurer que les matchs un et deux ne soient pas diffusés la semaine, où ils risqueraient, en cas de longue prolongation, d'entrer en conflit avec les blagues de Conan O'Brien. (Versus présente les matchs 3 et 4.)

Je ne sais pas pour vous, mais moi, j'appelle ça de l'«aplatventrisme».

Un petit doute s'est installé chez moi, donc. Quand j'ai fait mes prédictions, il y a plusieurs semaines, j'envisageais une victoire en six parties des Red Wings contre les Penguins. Maintenant, je ne suis plus si certain. Invisible en finale l'an dernier, Evgeni Malkin est présentement un des grands favoris pour remporter le trophée Conn-Smythe. Sidney Crosby n'a jamais été plus dangereux autour du filet adverse. Et Marc-André Fleury s'affirme de plus en plus comme un candidat pour l'équipe olympique canadienne de 2010. (Je ne souhaite pas de malheur à Fleury, mais la dernière fois que j'ai dit ça d'un gardien, Cam Ward a accordé 17 buts en trois parties...)

Mais, en fin de compte, la profondeur des Red Wings devrait leur permettre de remporter la Coupe une cinquième fois en 12 ans. Surtout que les attaquants des Penguins, si forts soient-ils depuis le début des séries, n'ont pas encore affronté une brigade défensive du calibre de celle des Wings.

Désolé, Marc: Detroit en sept.