Sport d'équipe par excellence, le football est une mécanique sophistiquée dont chaque pièce doit exécuter sa tâche pour qu'une équipe puisse espérer l'emporter. Mais c'est aussi, paradoxalement, le sport qui impose le plus de responsabilités à un seul joueur: le quart-arrière. Et des deux quarts en présence, hier, en finale de la Coupe Grey, c'est indubitablement Henry Burris qui a le mieux porté le fardeau.

Finaliste malheureux au titre de joueur par excellence de la Ligue canadienne, Burris n'avait pas caché sa frustration envers le supposé manque de respect des votants envers les Stampeders, plus tôt cette semaine. Il a joué hier comme un homme déterminé à prouver à ses détracteurs qu'ils avaient tort. Précis dans ses passes, courageux au sol, il a constamment maintenu la défense des Alouettes en déséquilibre et a amplement mérité son titre de joueur du match.

En face, Calvillo et l'attaque des Alouettes ont failli à deux occasions dans des moments cruciaux, au quatrième quart. Deux interceptions coûteuses, deux jeux ratés qui ont résulté en des poussées des Stampeders conclues chaque fois par un placement. «Ces deux jeux nous ont vraiment coûté la victoire, a reconnu Calvillo après la rencontre. Les interceptions leur ont donné l'élan qu'il fallait pour l'emporter.»

La fiche de Calvillo en finale de la Coupe Grey est maintenant de 1-5. Qu'il revienne ou non l'an prochain - et il est à souhaiter qu'il le fasse, car il a joué cette année comme un homme beaucoup plus jeune que ses 36 ans - sa fabuleuse carrière restera pour toujours marquée par son incapacité, sauf en 2002, à conduire les siens à la victoire finale. C'est triste, peut-être un peu injuste, mais c'est comme ça.

Les Alouettes ont pourtant eu l'occasion de porter un sérieux coup aux chances des Stampeders en début de rencontre. Sauf que les hommes de Marc Trestman ont été incapables de tirer le maximum de belles séquences (et notamment de deux longs gains de Jamel Richardson) au premier quart. Ils se sont contentés d'un petit placement de Damon Duval et ont ainsi permis à leurs adversaires de rester dans le coup.

«Ça aurait tout changé, a reconnu Ben Cahoon après la rencontre. Si on avait marqué des points, la foule, qui était déjà dans le coup, aurait été électrisée. Ça aurait rendu les choses encore plus difficiles pour Calgary. Mais on n'a rien réussi.»

Parlons-en de la foule. C'est fou comme on gaspille parfois de l'encre dans nos journaux. Toute la semaine précédant la finale, on s'est interrogé sur l'impact que pourraient avoir sur le déroulement du jeu des spectateurs très majoritairement acquis à la cause des Alouettes. Pour se préparer, les Stampeders se sont entraînés au son d'enregistrements de foule aussi tonitruants qu'un 747 au décollage. On imaginait déjà une profusion de jeux ratés et de consignes mal comprises du côté de l'attaque de Calgary.

Euh... pas vraiment. Les Stampeders n'ont tellement pas été dérangés par la foule qu'au premier quart, Burris a complété sans problème ses neuf tentatives de passes, malgré une forte pression du front défensif des Alouettes. Ça valait de toute évidence la peine de se défoncer les tympans à l'entraînement.

C'est évidemment plus facile pour l'attaque quand le quart-arrière est capable de se débrouiller tout seul en cas de besoin. Burris a une fois de plus prouvé ses qualités athlétiques au troisième quart, sur la poussée ayant conduit au placement de Sandro DeAngelis qui a porté la marque à 13-13. «Il a gagné ce match avec son bras et avec ses jambes et il a fait un travail exceptionnel», a commenté avec justesse l'entraîneur des Stampeders, John Hufnagel.

Mais les exploits de Burris ne devraient pas jeter dans l'ombre ceux de la défense de Calgary, dirigée par l'ancien coordonnateur des Alouettes, Chris Jones. «Chris Jones est un grand coordonnateur défensif et il a fait du grand boulot, a reconnu Bryan Chiu. Il nous a limités à 14 points. Ça n'arrive pas souvent à une équipe qui a une attaque aussi puissante que la nôtre. Il faut leur donner crédit. Limiter notre attaque à un point en deuxième demie, c'est incroyable.»

Parions qu'Anthony Calvillo n'y croira toujours pas quand il va se lever ce matin.