Je suis rendu au sixième épisode de la quatrième saison d'Orange Is the New Black et je songe sérieusement à noyer au fond de la cuvette cette comédie dramatique qui m'a pourtant procuré de frénétiques séances de gavage télévisuel dans les trois dernières années.

C'est franchement décevant. Comme si les créateurs de cette émission, disponible depuis la mi-juin, en français et en anglais, sur Netflix, ne savaient plus quoi inventer pour divertir les détenues de Litchfield, de même que les téléspectateurs devant leur écran.

Les intrigues - alerte au divulgâcheur! - y piétinent de façon exaspérante. Quel ennui. Par exemple, la blonde Piper Chapman en arrache encore avec son commerce de sous-vêtements souillés. Niveau d'intérêt pour cette histoire: autour de zéro. Et Piper se la joue «gangster» d'une façon risible, même si c'est fait avec dérision et humour.

Plusieurs personnages captivants, dont l'ex-junkie Nicky et la transgenre Sophia, apparaissent beaucoup trop tard dans le déploiement de la télésérie. Par exemple, Pennsatucky met quatre épisodes avant de confronter son violeur. Même chose pour Sophia: pourquoi attendre aussi longtemps avant de s'intéresser à son cas?

En contrepartie, la production accorde de l'importance à des femmes quelconques comme Lolly, la paranoïaque aux cheveux blancs dont le délire psychotique bouffe trop de temps d'antenne.

L'ancienne copine de Piper, Alex, a perdu toute sa fougue. Elle égrène les heures en rongeant son frein, terrorisée à l'idée que le directeur Caputo ne découvre que ses camarades et elle ont assassiné, dépecé et enterré un tueur à gages dans le jardin communautaire de la prison.

En termes d'invraisemblance, ce meurtre à la Luka Rocco Magnotta bat tous les records. Voir que personne ne se rendrait compte qu'une telle boucherie a été commise entre quatre murs.

Orange Is the New Black s'éparpille un peu partout, souvent dans des affaires banales, telles la chasse à la détenue qui défèque dans la douche, la colocataire de Red qui ronfle comme un dix-huit roues et les séances de sexe parlé entre Lorna et son nouvel époux. Plate, plate, plate. En comparaison, ce qui se déroule à Wentworth (aussi en ligne sur Netflix) et Lietteville est cent fois plus palpitant.

C'est dommage, car l'arrivée des 100 nouvelles clientes à Litchfield, un établissement récemment privatisé, aurait pu insuffler un nouvel élan à cette oeuvre. Au lieu de générer des conflits, la surpopulation carcérale se manifeste d'abord par une pénurie de serviettes hygiéniques, un manque de rôties au déjeuner et de longues files d'attente pour le petit coin.

Quant aux nouveaux gardiens, qui remplacent ceux qui ont démissionné en bloc la saison dernière, aucun ne sort du lot, à part le patron Piscatella. Les autres se fondent avec la couleur des murs, et on s'ennuie gravement de Pornstache et de Bennett, qui a mis Daya enceinte. D'ailleurs, quelle drôle d'idée de faire vivre les IPL sur le campus même de Litchfield, dans des petites cabanes de camp de vacances.

Dans les notes positives, on sent la tension raciale qui bourdonne en arrière-plan. Une détenue voilée se collette rapidement avec Black Cindy. Les relations entre les latinas s'enveniment. Les Dominicaines détestent les Mexicaines, tandis que les Portoricaines se croient au-dessus de la mêlée. De leur côté, les Blanches se sentent envahies et se regroupent pour «défendre leurs droits».

Voilà du matériel riche à exploiter. Le retour dans le passé de Maritza - la détenue au eye-liner - nous fait encore plus aimer cette jeune femme intelligente malgré ses apparences d'écervelée. Par contre, l'arrivée de la rousse Judy King, un personnage à mi-chemin entre Martha Stewart et Paula Deen, apporte peu d'eau au moulin, si ce n'est que pour rappeler que les centres de détention fonctionnent, comme le système de santé, à deux vitesses.

Malgré ses défauts, Orange Is the New Black demeure l'émission de télé la plus diversifiée du petit écran. On y trouve des jeunes, des vieilles, des Asiatiques, des lesbiennes, des Noires, des plus rondes, des très maigres, des droguées, des évangélistes, nommez-les, elles y sont toutes.

C'est pourquoi je refuse de tirer la chasse. Ça ne peut pas être moche jusqu'à la fin, n'est-ce pas? J'aime trop l'humour de Taystee et la fougue de Mendoza pour les abandonner bêtement comme ça, à mi-parcours. Comme une pensionnaire de Litchfield qui purge une longue peine, je m'accroche.