C'était une situation incongrue pour une chaîne comme ARTV. On y diffuse une parodie de magazine culturel, soit Paparagilles de MC Gilles, sans toutefois offrir aux abonnés un vrai magazine culturel complet, qui couvre le cinéma, la télé, la musique, les spectacles, les livres et le théâtre.

L'anomalie sera corrigée en janvier 2016 avec la mise en ondes d'Esprit critique, une émission hebdomadaire d'une heure d'ARTV copilotée par le collègue Marc Cassivi et l'animatrice-journaliste Rebecca Makonnen, qui ne se gêneront pas pour y croiser le fer à propos de Taylor Swift ou d'un obscur film turc. Un peu à l'image de la dynamique entre René Homier-Roy et Nathalie Petrowski à l'époque d'À première vue, à Radio-Canada.

Le dramaturge et chroniqueur Fabien Cloutier, collaborateur à Paparagilles ainsi qu'au magazine radiophonique Plus on est de fous, plus on lit!, se greffera au duo du Mile End toutes les semaines, question de rappeler à l'ordre les deux capitaines s'ils partent sur une dérive de plateaupithèques.

«Fabien n'a pas peur d'égratigner ou de casser du sucre. J'ai l'air d'être une très bonne cible pour lui», remarque Marc Cassivi, la moitié du tandem d'Esprit critique que Twitter a rapidement baptisé Rebeccassivi. Je l'adopte.

Déjà hier, Rebecca Makonnen a donné une idée du ton parfois grinçant qu'adoptera Esprit critique: «On est rarement sur la même longueur d'onde, ça va être le fun de remettre Marc Cassivi à sa place», a lancé l'animatrice de Circuit Makonnen sur les ondes d'ICI Musique (100,7 FM).

En principe, Marc Cassivi, qui a participé à C'est juste de la TV pendant cinq ans, jouera le rôle du snob, de l'arrogant, tandis que Rebecca Makonnen incarnera la fille aux goûts plus populaires.

Les deux têtes d'affiche ne se disputeront toutefois pas pendant 60 minutes, car la critique n'occupera qu'un des cinq blocs du magazine, qui présentera également des entrevues et des débats autour de sujets de culture et de société. Comme: Kanye West méritait-il d'être inclus dans les 100 personnalités les plus influentes du Time?

Une émission pilote a été enregistrée avec Herby Moreau, Christiane Charette, Renée-Claude Brazeau et Daniel Thibault. Cet hiver, ARTV présentera Esprit critique le jeudi à 21h, directement contre Bazzo.TV à Télé-Québec, et Radio-Canada le rediffusera le dimanche à 17h.

Il aura fallu cinq ans après la disparition de Six dans la cité à la SRC pour que la critique culturelle revienne à l'antenne d'une chaîne généraliste.

Comment expliquer cette absence prolongée? La direction d'ARTV plaide qu'elle ne disposait pas des ressources financières pour assumer une production comme Esprit critique. De l'avis de Marc Cassivi, les réseaux ont été frileux. «On est dans une société consensuelle», remarque-t-il.

Le projet d'Esprit critique a d'abord bouillonné à Télé-Québec du temps où Dominique Chaloult y confectionnait la grille de programmation. La nouvelle directrice générale de la télévision de Radio-Canada a rapatrié le projet lors de son retour dans la grande tour en 2015.

«C'est clair que tu ne vas pas chercher de grosses cotes d'écoute avec un magazine culturel. Mais ça fait partie du mandat de la télévision publique», rappelle la patronne Dominique Chaloult.

Élaborer la recette gagnante du magazine culturel est loin d'être simple. Trop niché, il ne décollera pas dans les sondages Numeris. Trop grand public, il ne séduira pas la clientèle type d'ARTV. Il faut savoir naviguer entre les pôles populaire et pointu en satisfaisant les deux clientèles fort différentes qui s'y rattachent. Pas évident du tout.

La productrice attitrée à Esprit critique est Marie Brissette, dont la compagnie a été rachetée récemment par l'entreprise KOTV de Louis Morissette. Oui, vous avez bien lu: Louis Morissette se retrouve donc à être le patron de Marc Cassivi et Rebecca Makonnen.

Fin du Pow wow

C'était pourtant loin d'être une gigantesque polémique. Mais bon. Radio-Canada a joué de prudence - et de sagesse - en annonçant que la nouvelle émission musicale chauffée par Claudine Prévost et Pierre Lapointe ne portera plus le titre de Pow wow.

En point de presse hier, Dominique Chaloult a indiqué qu'elle n'était pas du genre à vouloir s'embarquer dans une controverse et que Pow wow serait tout simplement remplacé par un autre nom. On passe à un autre appel, maintenant.

Mardi, des membres des communautés autochtones, dont la poétesse innue Natasha Kanapé Fontaine, avaient dénoncé l'appropriation culturelle du terme amérindien pow-wow et sa récupération à «des fins commerciales et vides de sens». Une réaction, à mon avis, très exagérée.