À force de regarder chacun des épisodes de La voix à la loupe, on finit par en découvrir la formule de fabrication. Et contrairement à la recette du colonel Sanders, celle de la télé-crochet de TVA est de moins en moins secrète.

Par exemple, le premier candidat à se pointer au début de chacune des rondes d'auditions à l'aveugle est toujours repêché, tandis que le dernier cause invariablement une méga surprise dans le studio, question de conclure sur une note puissante. C'est quasi systématique. Évidemment, tout ça est orchestré au montage.

Le premier à se jeter dans le vide hier soir, Thierry Bruyère, 30 ans, l'auteur-compositeur-interprète du Plateau Mont-Royal, a fait pivoter trois fauteuils sur quatre avec sa relecture de Pendant que les champs brûlent de Niagara. Alors que tous les téléspectateurs s'attendaient à ce qu'il choisisse Pierre Lapointe, revirement!, Thierry Bruyère a opté pour Isabelle Boulay.

Comme dans les chapitres précédents, la dernière concurrente de la soirée, Liana Bureau, 22 ans, de Québec, a rentré dans chacun des entraîneurs tel «l'iceberg dans le Titanic», pour paraphraser Marc Dupré. Cette Beyoncé blonde, qui fournit autant d'énergie qu'une centrale d'Hydro-Québec, a fini (littéralement) dans les bras de Pierre Lapointe. La foule ne s'en pouvait plus. Tombée du rideau.

Poussons maintenant l'analyse un peu plus loin. Si l'on se fie à la structure des deux premières éditions de La voix, les grands gagnants apparaissent toujours au deuxième épisode des auditions à l'aveugle.

Des preuves? En 2013, Valérie Carpentier avait interprété le classique Cry Me A River au deuxième épisode et Yoan Garneau avait amorcé la deuxième émission de 2014 avec Live Forever des Highwaymen. Deux champions en deux ans ont été découverts à la deuxième ronde des auditions à l'aveugle. Un fin numérologue comme Nostradumas y voit un signe.

Alors, se pourrait-il que la plus grande voix du Québec de 2015 soit également passée au deuxième épisode, diffusé il y a deux semaines? Parmi les candidats qui s'y sont démarqués, notons Dominique Fils-Aimé (Seven Nation Army), Anthony Cyr (Sunday Morning), Annabelle Doucet (What's Love Got To Do With It) et Rosa Laricchiuta (Perfect).

Par contre, après cette quatrième ronde des auditions à l'aveugle présentée hier soir, j'ai l'impression que cette théorie du deuxième épisode vient de s'effondrer. Car des participants très intéressants, il y en a eu plusieurs hier, à commencer par Liana Bureau, dont le Crazy in Love a explosé comme une bombe de funk. Ce n'est jamais évident de reprendre du Beyoncé et Liana a été à la hauteur.

Ensuite, Kevin Bazinet, 23 ans, le frère tatoué - façon tribale - du populaire chanteur Bobby Bazini, a aussi brillé, même si son choix de chanson (Latch de la formation Disclosure) ne l'avantageait pas spécialement. Les coachs ont d'ailleurs mis beaucoup de temps à enfoncer leurs boutons rouges. On aurait aimé l'entendre dans un autre registre que celui de Sam Smith.

La carrière du jeune Kevin Bazinet a déjà failli décoller en France, mais de graves crises d'angoisse l'ont terrassé et l'ont pratiquement enfermé chez lui, à Mont-Laurier. Marc Dupré pourrait l'amener très loin dans la compétition.

La jeune Marianne Poirier, 18 ans, de Québec, a été charmante avec son Deux par deux rassemblés de Pierre Lapointe. Elle a du Coeur de pirate dans la voix cette Marianne, qui est sourde de l'oreille gauche et qui arbore un look «artsy» super original. Le match avec son idole, Pierre Lapointe, est idéal.

Phénomène assez rare à La voix: un candidat, Francis Bédard-Pétrin, 25 ans, de Saint-Jean-sur-Richelieu, a pratiquement fondu en larmes pendant son numéro. Et comme il chantait Après toi, le déluge de Bruno Pelletier, mettons que c'était de circonstance. C'était touchant de voir ses deux parents l'encourager et le couvrir de compliments.

Encore hier, le rockeur Éric Lapointe m'a impressionné. Il a dévoilé une nouvelle facette de sa personnalité en chantant Caruso de Pavarotti avec la candidate Johanne Lefebvre, 45 ans, d'East Farnham. On ne s'attendait pas à ça du coach tatoué.

Et le public qui assiste aux enregistrements crie de plus en plus fort pour Éric Lapointe, qui connaît un excellent début de saison. Le rockeur se rendra-t-il enfin jusqu'à la Terre promise avec un de ses protégés? Chose certaine, il semble être poussé par un bon vent. Fin des jeux de mots douteux.